Le Sanjay Gandhi National Park, poumon vert au nord de la ville, abrite une population de léopards qui serait en développement alors que c’est une espèce classée vulnérable par l’Union internationale pour la conservation de la nature. Il semblerait que ce soit la proximité d’une population nombreuse de chiens errants qui alimenterait la croissance des léopards “mumbaïkars”.
Une étude publiée fin mars 2019 révèle qu’il y aurait 47 léopards adultes et 8 petits dans le parc d’environ 100 km2. C’est une densité 2 à 3 fois supérieure à celle de certaines des savanes africaines ou du Sri Lanka. L’étude a été menée par une équipe comprenant le directeur du Sanjay Gandhi National Park et un membre de la société de conservation des animaux sauvages indienne (Wildlife Conservation Society-India, WCS-India) et elle indique aussi que les félins seraient en augmentation : de 35 en 2016, à 41 en 2017 et 47 aujourd’hui.
Les léopards “mumbaïkars” vivent près de “campements” de personnes et chassent et tuent les chiens qui errent autour de ceux-ci. En moyenne, les chiens représenteraient environ 40% de leur régime alimentaire !
Les léopards sont connus pour être parmi les félins possédant de fortes capacités d’adaptation et ils sont capables de s’alimenter avec environ 100 types d’animaux différents. Mais qu'entre 63 et 75% d'entre eux ont déjà disparu de leur habitat traditionnel.
Il n’est pas rare de voir dans les journaux locaux un article relatant l’apparition surprise d’un léopard dans un centre commercial ou dans les rues du nord de Mumbai. Le 3 avril 2019, un léopard se serait introduit dans un immeuble résidentiel du quartier de Marol à Andheri et s’y serait promené pendant plus de cinq heures avant d’être attrapé et ramené dans son habitat naturel. Ce serait la deuxième fois qu’un tel animal pénètre dans un complexe résidentiel de ce quartier depuis 2017 et le sixième incident de ce type à Bombay depuis deux ans.
L’experte Vidya Athreya de WCS-India, qui a supervisé l’étude de la population féline du Sanjay Gandhi National Park, remarque : “Le fait que la population humaine importante de Mumbai cohabite avec les léopards sans conflits ou presque est très positif.” L’étude a aussi révélé que les léopards étaient très dispersés dans le parc et a souligné qu’il était important que le gouvernement de la ville prévoit des passages pour que les animaux sauvages puissent traverser en toute sécurité les routes et les voies de chemin de fer. “C’est une nécessité absolue. Le corridor Samjhauta entre Mumbai et Nagpur en est équipé. Le département des forets du Maharahstra a déjà recommandé en 2013 la création de ponts et de tunnels pour que les animaux sauvages puissent se déplacer sur tout leur territoire.”, ajoute-t-elle.
Les léopards habitent la zone depuis bien plus longtemps que les millions de personnes qui vivent aujourd’hui dans la mégalopole mumbaïbar. Il y avait aussi auparavant une forte population de tigres. La périphérie du parc n’a jamais été aussi peuplée et c’est la raison pour laquelle on note de plus en plus d’apparitions de léopards dans la ville.
La brillance des yeux est un excellent moyen pour identifier la présence d’un félin qui a une structure à l’arrière de chaque œil qui reflète la lumière et lui permet de mieux voir dans le noir. “Auparavant, les gens se couchaient plus tôt et il y avait moins de véhicules et de lumières.”, remarque Vidya Athreya. “La présence de léopards si près des hommes montre les capacités d’adaptation de ces deux espèces qui partagent le même espace,” dit-elle en ajoutant : “L’idée que ces félins ne devraient pas vivre si près de nous est une idée préconçue des gens de la ville. Si vous allez dans la campagne, les gens savent que les léopards ne sont pas loin et les “adivasis” (les groupes ethniques indiens) considèrent que cet animal fait partie de leur identité culturelle.”
La présence des léopards à Mumbai est un sujet qui revient aussi dans les journaux étrangers.
En mars 2018, le Guardian a publié une étude concluant que les léopards, en s’alimentant en partie de chiens errants, permettaient d’en contrôler la population autour du parc et réduiraient ainsi les coûts de stérilisation pour la municipalité. Le Monde, dans un article du 2 mai 2019, aborde aussi le même sujet.
Les habitants de “Aarey Milk Colony”, une zone proche du Sanjay National Park, n’éprouvent pas d’inquiétude majeure à vivre aux côtés de ces félins, même si un certain nombre d’attaques ont été recensées. Chandunushay Jadhav, un d’entre eux, a déclaré aux médias : “Ne me dites pas d’être inquiet à cause des léopards.” Cet homme de 64 ans habite dans une petite structure sans porte et trois léopards visitent régulièrement sa ferme. “Je n’ai pas peur, je n’ai même pas l’électricité. Ne le provoquez pas, ne le dérangez pas et le leopard ne vous attaquera pas.” Il sait que les léopards vivent dans cette zone depuis fort longtemps et pense qu’ils ne vont pas disparaitre de si tôt. “Pourquoi construisons nous là où les léopards vivent ? Ils visiteront toujours Mumbai puisque c’est leur territoire !”, ajoute-t-il.