Bonne nouvelle, les réservoirs de la ville débordent ! Mais Chennai va-t-elle bien gérer ses réserves pour éviter de revivre la grave crise de l’eau de 2019 ?
De l’eau pour au moins un an
Sans rentrer dans un détail trop technique et chiffré, les principaux réservoirs (lac Veeranam, Red Hills, Poondi, Chembarambakkam, Kannankottai Thervoykandigai) sont bien remplis et bien gérés pour les mois à venir. La semaine dernière, les cinq installations avaient un niveau de stockage de plus de 11 milliards de pieds cubes. Les niveaux satisfaisants sont la conséquence d’une mousson qui s’est poursuivie jusqu’en Janvier 2021, apportant plus de dix fois les précipitations normales pour le mois dans le Tamil Nadu.
« L'eau disponible est suffisante pour étancher la soif de la ville pendant une année entière sans aucune difficulté » déclarait il y a quelques jours un responsable de Metrowater. Une bonne nouvelle pour Chennai ! En effet, il est toujours douloureux de rappeler l’année 2019 : Au cours de l'été, l'eau douce est devenue rare en ville. Les robinets ont cessé de fonctionner, et la municipalité s'est retrouvée incapable de fournir de l'eau aux habitants… Chennai est même arrivé au fameux « Jour Zéro » : tous les principaux réservoirs étaient asséchés, obligeant le gouvernement à acheminer l'eau potable par camion. La crise de l’eau a eu de graves conséquences, d’abord sur la santé de la population assoiffée (qui passait des heures à faire la queue aux rares camions citernes), mais aussi pour l’économie : les restaurants fermaient, les agriculteurs perdaient leurs cultures etc… Au final, ce sont 10 millions de litres d'eau par jour qui ont manqué.
Comment Chennai a pu en arriver là ?
Les médias du monde entier s’étaient alors interrogés sur les raisons pour lesquels Chennai, ville humide, avait pu à se point manquer d’eau. Si le changement climatique, la géographie et les conditions météorologiques particulières de 2019 ont joué un rôle, le principale cause de la crise de l’eau semble être une mauvaise planification, mais aussi de mauvaises décisions.
En effet, la grande ville reçoit en moyenne 1 400 mm de pluie par an, soit plus du double de ce qui tombe sur Londres et près de quatre fois le niveau de Los Angeles. Mais, avec une importante croissance, l’augmentation rapide de la population et la disparition de lacs et rivières avoisinants au profit de constructions (Entre 1893 et 2017, la superficie des plans d’eau est passée de 12,6 km² kilomètres carrés à environ 3,2 km², selon les chercheurs de l'université Anna de Chennai), la nappe phréatique s’est dégradée.
Le gouvernement du Tamil Nadu est actif, mais l’est-il assez ? En 2003, il a adopté une loi exigeant que tous les bâtiments récupèrent l'eau de pluie. Oui, cela a aidé à préserver la nappe phréatique, mais pas assez selon le Conseil central des eaux souterraines du ministère de l'agriculture. La stratégie mise en place a été alors de construire de grandes usines de dessalement, solution très coûteuse et non sans conséquences pour l’environnement… Depuis peu, le gouvernement semble avoir une nouvelle approche : "City of 1,000 Tanks". Le projet consiste à restaurer certains réservoirs des temples et à en construire des centaines de nouveaux avec des pentes vertes dans toute la ville pour absorber et filtrer les fortes pluies, recharger la nappe phréatique et stocker l'eau pour l'utiliser pendant les mois secs. Car l’idée n’est évidemment pas que d’assurer l’été 2021, mais bien tous les suivants…