Ces dernières années ont vu un changement important dans les méthodes de campagne de communication des politiciens, a commencer par l’utilisation importante de l’Intelligence artificielle pour influencer l’opinion des votants.
L’Intelligence Artificielle à l'aide des candidats
Selon Venugopal Ganganna, CEO de la start-up Langoor (LS Digital Group Company), entre 80 et 100 crores de roupies ont été investis par les différents partis politiques dans l’IA pour les élections. Dans un article publié par la chaîne spécialisée dans le marketing Storyboard 18, il déclare que l’Intelligence Artificielle permet l'optimisation des stratégies médias : L'IA aide à prédire l'engagement et la portée des campagnes médiatiques, ce qui permet une planification et une optimisation plus efficaces.
De plus, grâce à des algorithmes avancés, les partis peuvent personnaliser leurs messages pour chaque électeur, ce qui améliore l'efficacité des campagnes. Les partis politiques utilisent désormais WhatsApp pour envoyer des vidéos où des avatars de leurs représentants transmettent des messages personnalisés à des électeurs spécifiques, les encourageant à voter en leur faveur. Cette pratique s'accompagne de l'utilisation de voix clonées pour appeler directement les électeurs. Selon M. Shakti Singh Rathore, membre du BJP, cette approche a remplacé celle où les électeurs raccrochaient lorsqu'ils recevaient des appels de représentants de partis. Il souligne l'efficacité de cette méthode pour capter l'attention des électeurs.
De même, l’Intelligence Artificielle permet aux politiciens de comprendre le comportement, les préoccupations et les sentiments des électeurs à un niveau plus profond, ce qui aide à définir les stratégies de campagne et de communication. Ceux-ci peuvent ainsi concentrer leur discours et leur présence sur les réseaux sociaux sur ce que les électeurs souhaitent entendre ou sur ce qui serait susceptible de les faire réagir, parfois au détriment des faits.
Des deepfakes pour déstabiliser certains candidats
En début de semaine, une vidéo a largement circulé sur les réseaux sociaux : le ministre de l'Intérieur Amit Shah y promettait dans un discours au Telangana la fin des réservations, ces places attribuées aux communautés les plus désavantagées du pays dans la fonction publique ou dans les universités. Problème : la vidéo est fausse : c’est un deepfake.
En réalité, Amit Shah dans son discours promettait, si le BJP est élu, de mettre fin aux réservations des musulmans, car selon le BJP, les musulmans n’ont en aucun cas besoin de la discrimination positive, contrairement aux populations tribales et aux "basses castes".
Le porte-parole du BJP au Tamil Nadu, ANS Prasad, a déclaré que la vidéo ayant été partagée par le Ministre en chef du Telangana, Revanth Reddy, il était certain que le parti du Congrès et l’Alliance I.N.D.I.A. étaient derrière cette campagne de désinformations. Plusieurs plaintes ont été enregistrées contre le CM Revanth Reddy et contre X, pour savoir qui était à l’origine de cette vidéo.
À Mumbai, la cyberpolice de la région de Mumbai Ouest a enregistré une plainte concernant la vidéo deepfake du ministre de l'Intérieur Amit Shah. Dans la plainte, il est mentionné que des membres des partis du Congrès et du NCP ont partagé la vidéo falsifiée sur 17 liens URL de comptes Twitter. La plainte a conduit à l'enregistrement d'un FIR (First Information Report) en vertu des articles pertinents du code pénal indien et de la loi sur les technologies de l'information, notamment pour la promotion de l'hostilité entre deux groupes et des infractions relatives à l'usurpation d'identité, à la falsification et à la manipulation.
Revanth Reddy a nié toute implication dans la création de la vidéo et a qualifié la convocation par la police de Delhi d’"atroce", il a aussi demandé au Premier ministre Modi combien de temps il continuerait à "gouverner en instillant la peur parmi les gens".
Ce deepfake n’est que le dernier d’une longue série de vidéos, extraits de montages trompeurs ou fausses vidéos plus ou moins réussies, qui ont circulé sur les réseaux sociaux ces dernières semaines.
Pour contrer la propagation rapide de fausses informations en ligne, la Commission électorale indienne a mis en place des unités à travers le pays. Ces unités surveillent les contenus diffusés à la télévision ainsi que les images captées par les caméras publiques. À titre d'exemple, deux vidéos deepfake créées par l'intelligence artificielle ont circulé, montrant des stars de Bollywood critiquant le Premier ministre N. Modi et incitant à voter pour le parti d'opposition, le Congrès. Ces vidéos, qui ont attiré un demi-million de vues, ont été supprimées et ont fait l'objet d'une enquête policière en vue de poursuites judiciaires contre leurs auteurs.
La désinformation dans les discours politiques
Chaque jour, des articles "fact-check" sont publiés par les différents journaux et réseaux sociaux de l’Inde pour analyser les différents discours des politiciens. La tactique n’est pas nouvelle : accuser le parti politique adverse d'avoir fait des promesses de campagne ou tenu des paroles auxquelles aucun Indien ne pourrait adhérer.
Exemple : Dans un discours récent, Modi a déclaré que dans son manifeste, le Congrès a déclaré vouloir faire une enquête sur les richesses personnelles des Indiens afin de les saisir et les redistribuer aux "infiltrés" et à ceux qui ont le plus d'enfants, un terme généralement utilisé comme référence aux musulmans. Le parti du Congrès a porté plainte auprès de la Commission Électorale mais la multiplication de ces "incidents" est un signe du temps qui pourrait influencer les résultats finaux mais aussi le taux de votes : dans les journaux, beaucoup de témoignages de citoyens lassés des mensonges des différents partis et qui préfèrent encore ne pas voter.