Le gouvernement indien a publié le samedi 31 août le registre national des citoyens (National Register of Citizens - NRC) dans l’état de l’Assam au nord-est de l’Inde. 1,9 millions de personnes résidant dans cet état en sont exclues. Le registre est la liste des personnes qui peuvent prouver qu’elles sont arrivées dans l’état de l’Assam avant le 24 mars 1971, date à laquelle le Bangladesh voisin s’est déclaré indépendant du Pakistan. L’Assam est devenu un état indien lors de la partition Inde-Pakistan de 1947 mais a été ensuite divisé en plusieurs états (7) par le gouvernement indien dans les années 70.
L’objectif du registre est d’identifier les personnes nées en Assam et qui sont donc citoyens indiens par opposition aux immigrants du Bangladesh voisin. C’est la première mise à jour du registre et elle était devenue une priorité du BJP, le parti au pouvoir, dans sa lutte contre l’immigration illégale.
Over 19 lakh people left out from final list of NRC Assam
— ANI Digital (@ani_digital) August 31, 2019
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Les familles résidant en Assam devaient fournir la documentation prouvant leurs ascendance. En cas d’absence de preuve, elles ont été considérées comme étrangers en situation illégale.
La mise à jour du registre inclut 31,1 millions de personnes et exclut 1,9 millions d’habitants de l’état. Sa publication a suscité beaucoup de critiques et de colère parmi les exclus mais aussi parmi la classe politique. Le ministre des finances de l’Assam, estime qu’il y a eu de nombreuses irrégularités et affirme que la plupart des immigrants illégaux ont réussi à y être inclus.
#NRCAssam
— Himanta Biswa Sarma (@himantabiswa) August 31, 2019
Names of many Indian citizens who migrated from Bangladesh as refugees prior to 1971 have not been included in the NRC because authorities refused to accept refugee certificates. Many names got included because of manipulation of legacy data as alleged by many 1/2
Les personnes exclues de la liste ont 120 jours pour faire appel, mais rien n’est clair quant à la procédure à suivre. Le gouvernement indien affirme que ce processus est nécessaire pour identifier les immigrants illégaux. Un millier de personnes suspectées d’être des étrangers en situation irrégulière sont déjà détenues dans des camps temporaires installés dans les prisons d’état. La déportation n’est pas une option envisageable pour le gouvernement.
De nombreuses familles exclues sont pauvres et analphabètes, elles n’ont pas les moyens de fournir la documentation demandée ni de financer un appel auprès des tribunaux spécialement créés pour étudier leur cas : les Foreigner Tribunals (il y en aurait plus de 200). Une journaliste indienne a étudié les comptes-rendus de plus de 500 décisions de ces tribunaux et révèle qu’ils auraient déclaré illégaux plus de Musulmans que d’Hindous et que les personnes concernées n’ont, pour certaines, pas pu assisté au jugement et ne sont donc pas au courant de leur situation.
Le processus de mise à jour du NRC a été qualifié par beaucoup d’opposants comme une chasse aux sorcières contre les minorités de l’Assam. La première version de la liste publiée l’année dernière excluait 4 millions de personnes.
L’Assam est un des états indiens dont la population est multi-ethnique et regroupe des Hindous parlant Bengali et Assamese (la majorité), des Musulmans parlant Bengali (1/3 de la population) et une vaste variété de tribus. L’immigration illégale en provenance du Bangladesh a été un souci depuis plusieurs décennies. Selon le gouvernement central, il y avait plus de 20 millions d’étrangers en situation irrégulière vivant en Inde en 2016.
De plus, l’Assam est le théâtre de violences pour le partage des ressources entre ethnies. Mais, depuis l’annonce de la mise à jour du registre, l’état a aussi recensé un nombre important de suicides de personnes qui ont eu peur d’être déclarées illégales.