Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--

Justine : «J’ai passé 39 jours en quarantaine à Hong Kong»

Justine en quarantaine covid dans un camp à Hong KongJustine en quarantaine covid dans un camp à Hong Kong
Justine, après plus de 30 jours en quarantaine
Écrit par Karine Yoakim Pasquier
Publié le 23 septembre 2021, mis à jour le 24 septembre 2021

Cet été, Justine, la grande gagnante 2020 du Prix du Public des Trophées des Français de Hong Kong, et sa famille rentrent en France pour les vacances. Lors de leur retour, l’impensable se produit : l’une de leur fille – âgée de 3 ans et demi – est testée positive au Covid. La famille est alors séparée et s’ensuit une longue période de séparation et de quarantaine. Pour ce faire, Justine a accepté de répondre à nos questions et nous relate leur parcours du combattant.

 

"Nous sommes rentrés en catastrophe à Hong Kong!"

Vous avez décidé en dernière minute avec ton mari de rentrer en France cet été, peux-tu me raconter ?

Effectivement, on avait au départ décidé à contrecœur de rester à Hong Kong cet été, car ayant trois enfants en bas âge (2, 3,5 et 6 ans), on n’imaginait pas les enfermer 3 semaines dans une chambre d’hôtel au retour.

Lorsque les règles ont changé début août, permettant aux enfants des personnes vaccinés d’effectuer leur deuxième et troisième semaine de quarantaine chez eux, on a littéralement sauté dans un avion ! En effet, ayant la chance d’avoir un petit jardin, ces 3 semaines de quarantaine nous paraissaient déjà un peu plus raisonnables.

À 13 h, nous achetions nos billets d’avion (après avoir passé quelques heures à tenter de décortiquer l’annonce du gouvernement…), à 14 h, nous faisions nos tests d’anticorps et à 23 h nous étions dans l’avion. Tout juste le temps d’appeler ma Mamy Yo pour lui demander de mettre une brioche au four pour notre arrivée ;)

 

A peine avoir rejoint ta famille dans les Alpes, les règles changent à nouveau et la France passe en catégorie A. Peux-tu me relater ce retour en catastrophe.

Après avoir passé une chouette semaine avec ma belle-famille, nous venions de rejoindre la mienne à Méribel. Nous y étions depuis deux jours, à peine, lorsqu’on s’est réveillé le 16/08 avec mille messages des copains de Hong Kong nous disant « les règles rechangent vendredi [20 août], rentrez vite ! ». C’était la panique à bord, car il était inenvisageable pour nous de s’enfermer avec nos enfants pendant 21 jours. On a donc passé — comme beaucoup d’autres — une journée des plus stressantes à tenter de modifier nos réservations d’hôtel de quarantaine et de vols. C’est très simple, il était absolument impossible de joindre les équipes de réservation d’hôtel, toutes prises d’assaut. J’ai tenté de joindre un autre département de l’hôtel 5-6 fois d’affilée avant de me mettre à faire semblant de pleurer pour qu’ils me passent quelqu’un au département des réservations et que par chance la personne modifie mes dates. Nous voyions les vols disparaître les uns après les autres en direct sur les sites de réservation, puisque tout le monde se précipitait pour rentrer.

 

salle d'attente de l'aéroport de Hong Kong pour les tests Covid
La petite famille, dans l'attente de rejoindre leur hôtel de quarantaine, à l'aéroport

 

Nous avons racheté des vols retour passant par Londres pour apprendre 2 h plus tard (via les réseaux sociaux) qu’un seul pied en Angleterre, même pour une escale d’une heure, nous ramenait à 21 jours de quarantaine. Nous avons donc racheté un 3e lot de 5 billets retour pour des vols avec deux escales… Le premier vol partait de Lyon au petit matin le 18. Il nous fallait rejoindre un laboratoire référencé, faire les tests PCR, obtenir les résultats ET les faire signer avant le lendemain 18 h. Mission quasi impossible puisque c’est tombé le jour d’un bug informatique… mais on les a eus. On est partis en catastrophe à 2 h du matin vers Lyon, tristes de dire au revoir précipitamment et la boule au ventre de ce stress inutile créé par une nouvelle annonce si tardive.

 

"Notre arrivée à l'hôpital de Hong Kong n'a pas été facile"

Le 6ème jour de votre quarantaine, votre fille a contracté le virus. Comment se sont passés le transfert et le séjour à l’hôpital ?

C’est le Department of Health qui nous a appelés pour nous prévenir que notre fille de 3 ans et demi avait été testée positive et qu’elle devait être transférée à l’hôpital alors que le reste de la famille allait être transférée pour 21 jours à Penny Bay si le test se confirmait positif. Ils m’ont dit que c’était mieux que je ne l’accompagne pas, mais — heureusement — j’ai pu le faire.

Notre arrivée à l’hôpital n’a pas été facile : nous n’avions aucune information claire sur les étapes à venir, sur les choix que nous pouvions faire ou ne pas faire, pas plus que sur les médicaments qu’on nous demandait de prendre, ce qui a été très stressant les premières 24 heures.

 

La prise en charge à l'hôpital de Hong Kong pour le Covid
La petite Mia, à l'hôpital

 

Le Consulat a rapidement prévenu le DOH et les choses se sont tout de suite améliorées. Il faut savoir que Consulat ne peut strictement rien faire pour réduire les ordres de quarantaines des familles comme la nôtre, mais veille à ce que ça se passe « bien » et c’est important.

Nous sommes restées 12 jours en isolation stricte, dans une chambre séparée du couloir par un sas dans lequel les rares personnes (aides-soignants) entrant dans la chambre se changeaient.

L’essentiel de nos échanges se faisait par téléphone (avec les médecins) ou par talkie-walkie (pour le personnel de l’hôpital). Nous pouvions recevoir des choses de l’extérieur et cela nous a vraiment aidées à surmonter ces longues journées : des jouets et surprises pour Mia et des petits plats que les copines réchauffaient aux micro-ondes de l’hôpital avant de les monter au personnel hospitalier qui nous les apportait.

 

De quoi est faite une journée type à l’hôpital en tant que patient Covid ?

Il ne se passe pas grand-chose ! Nous avions chacune un médecin qui nous suivait par téléphone : Mia pour l’évolution de son « CT rate » et moi pour voir si je devenais positive.

Sachant qu’il me resterait 21 jours à Penny Bay après la sortie de l’hôpital, j’ai tout tenté — en vain — pour attraper ce virus et rentrer plus vite. « Malheureusement » mon vaccin a eu raison de moi !

Nous avons passé deux petites semaines à nous occuper toutes les deux. Je pense n’avoir jamais autant collé d’autocollants de ma vie ! Mia a été traumatisée de sa première journée sur place, donc j’essayais de mon mieux de faire diversion et l’occuper à des choses joyeuses tout en me faisant conseiller par une pédopsychiatre basée en France pour l’aider à surmonter ses peurs. Elle va déjà beaucoup mieux depuis qu’elle est rentrée à la maison, 12 jours après son entrée à l’hôpital et après 3 tests négatifs consécutifs.

 

enfant en quarantaine à Hong Kong
Les petites attentions des copains pour illuminer le quotidien en quarantaine

 

"Finalement à Penny Bay, c’est pas mal par rapport à l’hôtel parce qu’on peut ouvrir la fenêtre"

Pendant ce temps, ton mari et tes deux autres enfants étaient à Penny Bay. Comment cela s’est-il passé pour eux ?

Ils ont été transférés pour 21 jours au camp de quarantaines de Penny Bay et ont pu obtenir (en insistant) une chambre « familiale », un peu plus grande que les chambres standards.

Comme mon mari travaillait pendant tout ce temps, il a rapidement organisé les journées selon un emploi du temps précis pour occuper les enfants et pouvoir les laisser s’autogérer un maximum. Il les couchait tard, car il était plus simple pour lui de passer du temps avec eux le soir que le matin. Ça lui laissait une bonne partie de la matinée pour travailler efficacement.

Les enfants faisaient pas mal de puzzles et arts plastiques le matin. Ils prenaient l’iPad à tour de rôle pour travailler sur des applications « d’apprentissage » en ligne, puis après le déjeuner, Sacha allait à la sieste alors que Nina faisait des devoirs à côté de son papa.

 

quarantaine covid au camp de Penny Bay de Hong Kong
Le 1er jour de leur arrivée à Penny Bay, Nina et Sacha prennent pleine possession des lieux.

 

Nos super amis se relayaient toutes les après-midis à 16 h 30 pour organiser un Zoom pour occuper les enfants et c’était un moment fort de la journée : on a eu des lectures, des blind tests Disney, des quizz, des « dessinez c’est gagné », des cours de yoga et de danse et j’en passe !

Après ça, les enfants faisaient toujours un cours de sport/danse sur YouTube puis jouaient ensemble avant le dîner, le temps que mon mari termine son travail.

Les enfants sont bien plus résilients qu’on ne le pense, et si certains moments ont été très durs, ils ont été super forts et pleins de ressources pour s’amuser. Mon mari, de son côté est la personne la plus calme et optimiste que je connaisse, donc son résumé de la situation c’est que « finalement à Penny Bay c’est pas mal par rapport à l’hôtel parce qu’on peut ouvrir la fenêtre ! ».

Ils sont sortis tous les trois le 15 septembre, et je suis sûre au fond de moi, qu’une partie de lui a apprécié ces moments sacrés avec deux de ses enfants qu’il a fait vivre 3 semaines en sous-vêtements parce que « ça va plus vite »…!

 

"Ce qui nous a vraiment aidés, c’est le soutien de nos amis en France et à Hong Kong"

Comment avez-vous réussi à garder le moral pendant cette période ?

Le jour où le test de Mia a été confirmé positif à l’hôpital, et qu’on savait qu’on entrait dans un long tunnel cauchemardesque, je me suis « cachée » pour pleurer sous la douche, puis je me suis fait une promesse, c’est que tout allait bien se passer, et qu’il était hors de question que tout cela gâche notre joie de vivre.

À partir de là, tout était plus facile : on a tout fait pour rendre la (més) aventure plus joyeuse… et on a pris toutes les aides qui venaient à nous ! Je n’ai pas hésité à « passer le flambeau » à une psy quand j’ai vu que l’humeur de ma fille m’échappait, ni à faire venir une copine jusqu’à l’hôpital juste pour m’apporter un Starbucks la fois où j’ai passé une nuit blanche.

Les nombreux messages de personnes suivant mes stories sur Instagram me faisaient un bien fou et j’ai reçu beaucoup de bons conseils, autant pratiques que mentaux.

 

a l'hopital pour enfants de Hong Kong
Nina, Mia et Sacha en pleine séance de yoga, via Zoom

 

Ce qui nous a vraiment aidés, c’est le soutien de nos amis (et même d’autres) et leurs gestes. Il n’y a pas eu un jour sans qu’on ait reçu à l’hôpital un petit (ou gros !) colis. Mia criait alors « Maman, deliveryyyyyyyyyy ! » et courait sur l’appui de fenêtre pour voir si les copines de passage nous faisaient coucou d’en bas ! Alors que le fils d’amis nous préparait des vidéos de tours de magie quasiment tous les jours, une copine a écrit pour nous « La famille écureuils et le coronoisette », un récit retraçant nos aventures que nos amis et familles se sont mis à lire eux aussi au fur et à mesure des épisodes ! Même les professeurs d’école, de musique, de yoga, etc. des enfants nous ont envoyé des vidéos pour les occuper. Nous avons été littéralement portés par tout ce soutien, et c’est grâce à eux que je pense avoir réussi à tenir la promesse de la douche ?.

 

Quelles ont été les choses les plus surprenantes que tu as pu remarquer ?

Il est difficile de tout citer, tant tout est lunaire, mais pour faire un top 5 :

  • L’employé du dimanche du Department Of Health qui se trompe et donne un ordre de quarantaines à Penny Bay à ma fille qui vient d’être testée 3 fois négative… puis se ravise une heure plus tard pour finalement la renvoyer seule à la maison — elle a 3 ans et demi.
  • Mon fils de 2,5 ans qui après 28 jours d’enfermement dégomme des puzzles 100 pièces ?
  • Ma helper qui est envoyée 3 jours à Penny Bay alors qu’on ne l’a pas croisée depuis notre départ en France il y a 21 jours…
  • Le médecin de Penny Bay qui m’envoie en ambulance à l’hôpital de Tung Chung pour… une toux sèche !
  • Le fait que mâchouiller la brosse à dents de ma fille après l’avoir frottée sur sa langue ne me donne pas le virus qui aurait raccourci ma peine… Mais est-ce si surprenant… étant donné que je suis doublement vaccinée, que j’ai des anticorps, que j’aie survécu à 7 jours confinée avec elle dans une chambre d’hôtel à la bisouiller et que j’ai répondu par la négative aux quarante douze tests précédents ?!

 

le camp de quarantaine covid de Hong Kong
Penny Bay, au crépuscule

 

"En attendant ma sortie à Hong Kong, je fais ce que je n’ai jamais le temps de faire"

Te voilà seule à Penny Bay. Un ressenti ?

Quand Mia est rentrée à la maison, j’ai été transférée à Penny Bay. Les autorités ne m’ont pas laissée rejoindre mon mari et mes enfants (ou il aurait fallu qu’ils reprennent leurs 21 jours du début). C’était super dur de voir rentrer Mia sans nous [jusqu’au retour de mon mari et deux autres enfants 9 jours plus tard], même si on a une incroyable nounou et des voisins géniaux. Puis très dur d’accepter ma date de fin de quarantaine que je jugeais injuste, car ils ont compté 21 jours sur place à Penny Bay, au lieu de compter 21 jours à partir du moment où Mia n’était plus positive… L’arrivée au camp a été assez difficile le premier jour, car ça ressemble quand même beaucoup à une prison, tant dans l’architecture que dans l’ambiance : les gardes, les annonces via les haut-parleurs, les repas déposés sur l’appui de fenêtre, et j’en passe.

Après 2-3 jours « d’atterrissage » puis de colère qui ne faisait de mal qu’à moi-même, je me suis remise tranquillement à mes activités et ça a été beaucoup mieux. En attendant ma sortie, j’ai décidé de penser à moi et faire ce que je n’ai jamais le temps de faire : des grasses matinées, des formations en ligne et même des puzzles ! Croyez-le ou non : je n’ai pas encore eu le temps de regarder une seule série !

 

Justine conclut en souriant : « Je partagerai mes “bons plans” de prisonnière une fois sortie pour ne pas risquer qu’on me retire mes privilèges durement acquis ! »

Toute l’équipe de Lepetitjournal.com lui souhaite de belles retrouvailles avec sa famille !

 

Pour être sûr de recevoir GRATUITEMENT tous les jours notre newsletter (du lundi au vendredi)

Ou nous suivre sur Facebook et Instagram

 

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions