Du lycée Ste Claire de Pok Fu Lam à l'école du soir des travailleurs illettrés d'Aberdeen, des camps de réfugiés du Laos aux rues de Katmandou, Nicole Sicard n'a eu de cesse de s'occuper des autres. Entière, déterminée, elle est restée fidèle à ses rêves de jeunesse.
"Je n’ai jamais eu un tempérament de peureuse", s’amuse la dame âgée. Un regard espiègle serti par de jolies rides, un sourire omniprésent, Nicole Sicard garde l’énergie de ses 20 ans. Du haut de ses 82 ans, la Nantaise a dévoué sa vie aux autres et n’a pas tari d’efforts.
Alors qu’elle reçoit du Rotary Club en mai 2017 le prix "The One Hong Kong" comme Runner-up pour son engagement et son association Mayaa Nepal, Nicole Sicard ne peut s’empêcher de se cacher derrière le sourire des enfants qu’elle a aidés et qu’elle aide encore. Après plus de 50 années en Asie, cette ancienne professeure de biologie garde la foi chevillée au corps. Une foi énergique, contagieuse qui irradie chacun de ses actes d’Hong Kong jusqu’au Népal.
Et justement, c’est cette force qu’elle qualifie de divine qui a engendré ce dévouement. "La religion, la foi, c’est en moi, affirme-t-elle sans ciller. Je pense que je n’aurais pas réussi si je n’avais pas eu cette force de la foi".
À l’écouter, les choix de vie de Nicole Sicard sonnent comme des évidences. Comme si l’ouverture et le don de soi étaient des qualités naturelles. Mais son caractère n’y est pas pour rien. Déjà petite, elle le scandait debout sur sa chaise: "Quand je serai grande j’enseignerai aux petits chinois". Ainsi inspirée par son père, qui prenait sur son temps libre pour passer de longues heures avec des patients et personnes âgées à l'hôpital, la jeune femme a mené des études en biologie à Toulouse avant d’atterrir à Hong Kong en 1964.
Enseignante au lycée Ste Claire de Mount Davis road, elle crée avec ses élèves une école du soir pour les ouvriers illettrés d’Aberdeen. Pendant 22 ans, 200 ouvriers viendront chaque soir, entre 7 et 9H, suivre les cours de cantonais, d'anglais, de mathématiques, d'hygiène dispensés par les élèves de Ste Claire et des garçons du Raimondi College.
"L’éducation est une chose essentielle. Pour moi, c’est aider les élèves à s’épanouir", explique-t-elle. Chose unique pour une non chinoise, elle reçoit d'ailleurs le titre de "Meilleur Professeur" en 1996 par le gouvernement de Hong Kong. L’école étant aujourd’hui gratuite et obligatoire à Hong Kong jusqu’à 16 ans, le programme a pris fin. Mais Mayaa Hong Kong est toujours indispensable, notamment dans les Nouveaux Territoires où il y a encore une "pauvreté incroyable".
Périples humanitaires en Asie
Si elle s’occupe toujours des enfants hongkongais et donne des cours aux jeunes dyslexiques du quartier, Nicole Sicard porte son amour au-delà des frontières. À l'été 1971, l’aventurière quitte Hong Kong pour la première fois depuis son installation pour visiter trois de ses amies près de Paksé au Laos. Pendant quelques semaines, elle vit et travaille dans des camps de réfugiés, remplaçant des soeurs infirmières. Depuis plusieurs années, la guerre fait rage entre les communistes et les non-communistes dans le Nord du pays. Les Laotiens des montagnes, fuyant les combats, se regroupent dans la plaine dans des villages insalubres, infestés d'insectes.
Ce premier voyage laisse des traces. Bouleversée par la misère et la dignité de ces réfugiés, Nicole Sicard fait plusieurs séjours au Laos dans les années 1970, mais elle se rend également dans d'autres camps à Bataan et Palawan aux Philippines. L'ile accueille alors nombre de rescapés qui ont besoin de parler, d'être respectés, reconnus dans leurs souffrances et leurs traumatismes. La biologiste écoute et on l’en remercie. "On me disait merci d’avoir vécu avec nous, comme nous", se remémore-t-elle. Et des scènes de souffrances elle en a vu. Un jour, alors qu'elle visite un village reculé avec une amie infirmière, un homme meurt dans leurs bras. Père de deux fils, il a préféré se sacrifier et donner à ses enfants son unique bol de riz quotidien pour qu'ils vivent.
Rencontres imprévues au Népal
Bien que ses voyages dans de nombreux pays d'Asie aient marqué à jamais Nicole Sicard, c'est auprès des enfants tibétains et népalais que celle-ci a choisi de s’impliquer durablement. Partie sur un coup de tête au Népal, l’enseignante rencontre l’association CONCERN qui s’occupe des jeunes des bidonvilles. Dans le pays près de 60% d’entre eux travaillent pour aider leur famille.
Dans un premier temps, elle parraine l’association en formant les enseignants des écoles. Puis l’organisme se dissout. L’idée de laisser ces enfants sans aide est insoutenable pour Nicole Sicard qui reprend le flambeau avec Mayaa Népal. "Le but est de scolariser les enfants qui travaillent, décrit-elle. Le problème c’est que pour leur famille ce sont des gagne-pains, alors on a essayé de convaincre les parents que s’ils veulent que leurs enfants aient un meilleur avenir, il faut qu’ils aillent à l’école".
Aujourd’hui l’association couvre cinq écoles au sein de bidonvilles du pays. Leur action permet de scolariser environ 20% des enfants. "Nous avons 180 enfants, détaille celle qui parie sur une bonne qualité d’enseignement. Nous n’en prenons pas trop car le but est que les élèves aillent au bout de leur scolarité". Plus tard Nicole Sicard sait que ces jeunes aideront à leur tour leur prochain.
C'est là sans doute sa plus belle réalisation, avoir suscité et entretenu une chaîne d'amour, d'entraide et d’espoir.
Je n’ai jamais regretté ou douté d’avoir dédié ma vie à cela. Lorsque l’on reçoit le sourire d’un enfant c’est le plus beau. conclut-elle
Pour plus d'informations, consultez le site de Mayaa Nepal et Hong Kong.
L'association organise également les dimanche 3 et lundi 4 Juin un vide dressing "Soli'dressing" à central au profit de MAYAA Nepal et Hong Kong. Plus de détails sur l'ExpatGuide