Les prix astronomiques de l’immobilier et l’inflation ont pour effet de pousser progressivement une partie de la classe moyenne vers la pauvreté. Les gouvernements jusqu’alors inactifs font face à une gronde de plus en plus intense.
Beaucoup de Hongkongais ont travaillé dur pour s’élever jusqu’à la classe moyenne au cours des dernières décennies. Mais avec les prix immobiliers, l’inflation, certaines personnes sont ainsi dans des situations pires que celles touchant les aides sociales. Ce groupe a été surnommé la « classe sandwich » car il a le sentiment d’être coincé entre la pauvreté d’un côté et des aspirations qu’il ne peut pas atteindre de l’autre. Il correspond en fait à la classe moyenne inférieure.
Les voix appelant le gouvernement à venir en aide à cette catégorie s’amplifient. Ils restent cependant les grands oubliés des discours politiques, ce qui entraine des tensions de plus en plus notables dans la société.
Comment définir la classe moyenne ?
L’ancien secrétaire financier, John Tsang Chun Wah, avait donné comme définition de la classe moyenne le fait de regarder des films français ou de boire du café.
Pourtant, aux yeux de la plupart des citoyens de Hong Kong, le capital économique est le critère le plus important pour définir la classe moyenne, plus que l’éducation, l’occupation, les valeurs et la sensibilisation aux problèmes sociaux. La propriété - d’une valeur comprise entre 2 et 8 millions de HKD – en est un élément crucial à quoi s’ajoutent des actifs évalués à au moins 500,000 HKD et un revenu mensuel compris entre 30,000 et 60,000 HKD.
Idéal de vie
Les années 80 et 90, lorsque l’économie locale était en pleine prospérité, ont été l’époque glorieuse de la classe moyenne de Hong Kong. De nombreuses personnes ont réussi à grimper l’échelle sociale grâce à l’éducation mais aussi à de longues heures de travail. D’autre part, l’ouverture de l’économie de la Chine continentale a amplement bénéficié aux employés et aux entrepreneurs de Hong Kong. Par conséquent, on a assisté à cette époque, à une croissance spectaculaire du niveau des revenus et des prix de la propriété, qui a permis l’émergence d’une classe moyenne forte.
Cette partie de la population, éduquée et ayant une bonne position professionnelle, a ainsi constitué le groupe le plus important de contribuables et a beaucoup oeuvré pour le développement économique et social de Hong Kong. Beaucoup de personnes rêvaient alors d’appartenir à cette classe moyenne, perçue comme un idéal car c’était dans leur esprit l’assurance d’un revenu stable, l’occasion d’accumuler de la richesse, en un mot l’espoir d’améliorer sa qualité de vie.
Disparition de la classe moyenne
Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il y a plusieurs raisons à cela.
D’abord, en raison de la spéculation immobilière par des investisseurs chinois et d’une réglementation relâchée du gouvernement, les prix du logement sont devenus inabordables. En fait, depuis 7 années consécutives, Hong Kong est devenu le marché immobilier le plus cher du monde. Une enquête menée par Demographia dans 406 villes a ainsi montré que le prix des logements est ici 18 fois plus élevé que le revenu médian annuel brut des ménages alors que cette même enquête considère comme « gravement inabordable » tout logement dont le prix est supérieur à 5% du revenu médian. Et en effet, à Hong Kong, il est courant de voir que l’emprunt immobilier peut dépasser 50% des revenus du ménage !
Par ailleurs, la classe moyenne paye relativement beaucoup d’impôts mais elle ne reçoit que très peu d’avantages sociaux. L’éducation des enfants, l’assurance médicale ou le coût pour s’occuper de leurs parents âgés notamment représentent de lourds fardeaux financiers et ont gravement fait baisser la qualité de la vie et le pouvoir d’achat de cette dernière.
Très peu entendue par le gouvernement, la classe moyenne hongkongaise est négligée et ne reçoit que très peu de bénéfices de sa part.
A cela s’ajoute un ralentissement du marché du travail doublé d’une« inflation académique » dans la société du fait d’une augmentation du nombre d’étudiants à l’université. En raison de la diminution des offres d’emploi, les jeunes sortant de l’université se voient obliger d’accepter des emplois moins qualifiés et moins bien payés. L’ascenseur social semble aujourd’hui en panne surtout pour les jeunes diplômés.
Le risque, c’est bien évidemment d’assister au déclin de la classe moyenne. C’est déjà le cas pour certaines familles vivant dans des logements publics et qui sont parfois en plus mauvaise posture que des familles bénéficiant du CSSA (Comprehensive Social Security Assistance). Se dirige-t-on à termes vers une « M-shaped society », une société polarisée avec des gens très riches d’un côté et des gens très pauvres de l’autre ?
L’avenir ?
Jusqu’alors considérée comme la majorité silencieuse à Hong Kong, le mécontentement de cette « classe sandwich » envers les hommes politiques et le gouvernement gronde et les a poussés dans la rue à plusieurs reprises. Il est important de pousser le gouvernement à fournir des compensations pour ce groupe sous forme d’aides sociales ou d’allocations fiscales, principalement en matière de logement, d’éducation et de dépenses médicales dans le but de maintenir un développement stable et harmonieux de la société.