La Voie Appienne est un vestige de l'Empire romain trop souvent ignoré dans la ville éternelle. Construite il y a plus de 2 300 ans, elle dévoile une facette oubliée du génie romain de l'époque. Elaborée au départ de Rome, elle a contribué à son expansion et à sa réussite future
La Via Appia Antica de son nom italien, passerait presque inaperçue dans les faubourgs de la ville éternelle. Construite à partir de 312 avant J.-C., elle devait permettre à la ville d'optimiser son ravitaillement. Au départ, le projet prévoyait de construire la voie à partir des Thermes de Caracalla mais l'expansion rapide de la ville repousse les travaux jusqu'à la Porte St-Sébastien, au sud-est de Rome. Deux ans après le début de sa construction, la voie reliait déjà Rome à Capoue. Elle est ensuite prolongée jusqu'au port de Brindes, dans les Pouilles, afin de créer un accès direct à la Méditerranée, sur une longueur totale de six cents kilomètres.
La Via Appia Antica. Source photo : wikimedia
Malheureusement, l'artère romaine va tomber en désuétude après la chute de l'Empire romain d'Occident en 476. Les pillards et les truands qui avaient pignon sur rue y faisaient régner une insécurité incompatible avec le transport de marchandises. Ce n'est qu'au XVIIIème siècle que le Pape Pie VI décide sa restauration en hommage aux premiers chrétiens enterrés le long de l'ancienne voie. C'est à la même époque que les travaux de la Via Appia Nuova débutent. Cette dernière remplacera l'ancienne Via Appia et reliera Saint-Jean-du-Latran à Brindes.
Le génie romain
Les pavés de la voie. Photo LPJ de Rome
Cette route a permis à Rome d'étendre son autorité à tous le sud de l'Italie, de prélever des taxes aux paysans qui habitaient le long de l'axe et la ville pouvait ainsi nourrir sa population toujours plus nombreuse. Le port de Brindes était aussi un point stratégique qui permettait de lancer des offensives rapides vers l'Orient et la Grèce. La rentabilité du service de poste s'est améliorée puisque qu'un courrier mettait environ 14 jours à parcourir le trajet Rome-Brindes. C'est donc toute l'administration et le prélèvement des taxes qui ont été optimisés grâce à la Voie Appienne.
Au temps des empereurs romains, il était interdit d'enterrer les morts dans la ville. La voie servait donc de cimetière et on y trouve encore de nombreux mausolées et catacombes. Parmi-eux, on peut citer les catacombes de St-Calixte, pour les premiers chrétiens et les premiers papes, ou le tombeau de Cécilia Métella, fille de Crassus qui régnait dans le fameux triumvir aux côtés de César et de Pompée. En parcourant à peine une dizaine de kilomètres, vous pourrez aussi admirer les vestiges d'aqueducs et d'anciennes villas au milieu d'un environnement verdoyant et calme.
Le tombeau de Cécilia Métella. Source photo : wikimedia
On ne la surnomme pas la "reine des voies" pour rien. C'est sur ses pavés que le Christ serait apparu à Saint-Pierre alors qu'il fuyait la répression de Néron, lui conseillant de faire marche arrière et d'affronter la crucifixion avec courage. C'est ici encore que 6.000 esclaves furent décapités par l'Empereur Crassus lors de la bataille des esclaves menés par Spartacus entre 73 et 71 avant J.-C. Aujourd'hui, la voie est fermée à la circulation, excepté quelques centaines de mètres après la Porte St-Sébastien et nombreux sont les cyclistes et promeneurs à s'y rendre. Pour un moment de détente, de culture et de découverte, l'Appia Antica a tout pour vous faire passer une après-midi couronnée de succès.
Jean-Marie Cornuaille (www.lepetitjournal.com/rome ) Mardi 12 Juin 2012
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