Inaugurée en présence d’Abdou Diouf, la Maison de la Francophonie de Lyon fut pensée dès l’origine comme un lieu de dialogue, d’action citoyenne et de rayonnement. Aujourd’hui, malgré un contexte institutionnel moins favorable, elle poursuit avec ténacité sa mission première : faire vivre la Francophonie au cœur des territoires, par des initiatives concrètes et un engagement bénévole sans faille.


C’est à Lyon, ville carrefour, que l’idée a pris corps. « Nous voulions créer un lieu qui parle de Francophonie à la société civile, sur le modèle des Maisons de l’Europe », se souvient Christian Philip. À l’époque, il est représentant personnel du président de la République pour la Francophonie. En 2008, avec le soutien d’Abdou Diouf et du maire de Lyon, la première Maison de la Francophonie française est inaugurée. Un symbole fort.
« L’installation juste en face de l’Alliance Française traduisait une volonté d’ouverture, de complémentarité, d’ancrage local », explique-t-il. Ce lancement portait un message clair : la Francophonie n’est pas qu’une affaire d’États, elle est aussi celle des citoyens.
Une relance portée par la passion
Après une courte parenthèse liée à ses fonctions de recteur, Christian Philip revient à Lyon en 2014. La Maison est en sommeil. Il décide de la relancer avec quelques fidèles. « Il fallait lui redonner vie. Nous avons rouvert des activités, repris des contacts, trouvé un point d’ancrage au sein de la MJC du 5e arrondissement. »
La Francophonie rayonne aux Fêtes Consulaires de Lyon
Depuis, la Maison multiplie les conférences, les participations aux fêtes consulaires, et mène des interventions dans les établissements scolaires. Un module pédagogique intitulé Suis-je francophone ? permet d’initier des dialogues riches et sensibles avec les jeunes. « Ce sont souvent des moments très forts, qui prouvent à quel point cette thématique parle encore aujourd’hui. »

La Francophonie en bulles : des conférences qui marquent
Parmi les événements récents organisés par la Maison, l’une des conférences les plus marquantes fut celle animée par Benjamin Boutin, auteur de la bande dessinée Francophonie : une histoire en partage. « Benjamin incarne une nouvelle génération d’acteurs francophones, curieux, engagés, pédagogues », souligne Christian Philip. À travers une approche graphique et accessible, l’ouvrage retrace les grandes étapes de l’aventure francophone, tout en questionnant son avenir.
« Cette rencontre a suscité un réel enthousiasme, notamment chez les plus jeunes. C’est exactement le type de passerelle que nous cherchons à créer », ajoute-t-il. Preuve, s’il en fallait, que la Francophonie peut se raconter autrement – et toucher un public bien plus large qu’on ne l’imagine.
Une structure modeste mais influente
La Maison ne dispose ni de budget conséquent, ni de locaux en propre. Mais elle fédère un écosystème riche : l’Alliance Française, l’Institut international de la Francophonie, Lyon-Québec, la Caravane des Dix Mots. « Ce maillage nous permet d’agir avec agilité. Nos intervenants sont souvent bénévoles, mais toujours passionnés. Et surtout, la Maison est connue. Elle est devenue un interlocuteur naturel pour de nombreuses initiatives locales. »
L’esprit du réseau international des Maisons de la Francophonie (RIMF), auquel elle est activement liée, lui ouvre également de nouvelles perspectives.
« Nous passons d’un modèle de demande à un modèle de proposition. Nous sommes porteurs de sens, d’outils, de visibilité. » - Christian Philip
Préparer la relève, amplifier la portée
Christian Philip, tout en restant profondément investi, souhaite aujourd’hui transmettre. « Il faut que la relève vienne. Quelqu’un de plus jeune, avec un bon réseau lyonnais et une vraie fibre francophone. » La Maison cherche aussi à renforcer ses liens avec les entreprises et les milieux économiques. « Avec les bons outils – l’application mobile, les partenariats, les médias francophones – on peut créer de nouveaux ponts. Il faut juste oser les proposer autrement. »
Le moment est propice. « À l’échelle du RIMF, un nouveau souffle se dessine. La Maison de Lyon peut y contribuer pleinement, en valorisant son histoire et en accompagnant les transitions. »
Une première maison qui a essaimé
La Maison de la Francophonie de Lyon, créée en 2008, ne fut pas seulement une innovation locale : elle a ouvert la voie. « C’était une première en France, mais avec l’ambition d’enclencher un mouvement », rappelle Christian Philip. Et ce mouvement a bel et bien eu lieu. Depuis, plusieurs autres Maisons ont vu le jour, à Marseille, à Toulon, à l’étranger aussi — à Ottawa, au Cameroun, à Port-Vila ou encore au Sénégal. La Maison de Lyon n’est pas un îlot isolé, mais bien un point de départ.
« Nous avons semé une idée simple : faire de la Francophonie une réalité citoyenne et décentralisée. Aujourd’hui, ce réseau se structure autour du RIMF, et c’est très encourageant de voir des initiatives fleurir sur tous les continents. »
Une Francophonie vivante, portée par les citoyens
Et si la Maison de la Francophonie de Lyon, fidèle à l’élan qui l’a fondée en 2008, s’affirmait plus que jamais comme un espace d’avant-garde, un lieu d’échanges et de reconnaissance mutuelle entre les cultures francophones ? Car la Francophonie ne se résume pas à une langue, mais à une mosaïque de récits, de valeurs partagées, de solidarités en devenir.
Aujourd’hui, cet engagement citoyen trouve de nouveaux leviers grâce aux outils proposés par le Réseau international des Maisons des Francophonies (RIMF) : une application mobile pour relier les initiatives, un média collaboratif pour faire entendre les voix locales, bientôt une web-radio pour amplifier les échanges. Autant de passerelles numériques pour rapprocher des territoires souvent éloignés mais profondément liés par une volonté d’agir ensemble.
La Maison de Lyon, en pionnière, s’inscrit dans cette dynamique. Et c’est en tissant des liens avec d’autres francophonies — comme celle, vigoureuse, portée par les communautés canadiennes hors Québec réunies autour de la FCFA — qu’elle peut continuer à jouer un rôle moteur. Car c’est bien dans cette diversité assumée, dans cette circulation des idées et des engagements, que la Francophonie de demain prendra toute sa force.
Dernière née des Maisons, celle de Port-Vila inaugurée en juin 2025
Sur le même sujet

















