Edmundo Gonzalez Urrutia, le candidat de l'opposition qui revendique la victoire à la présidentielle du 28 juillet au Venezuela, ne s'est pas rendu lundi à une convocation du parquet, qui le convoque à nouveau mardi.
Dans une vidéo publiée dimanche soir sur les réseaux sociaux, celui qui n'est pas apparu en public depuis trois semaines a accusé le procureur général Tarek William Saab de se "comporter comme un accusateur politique": "Il condamne à l'avance et impulse maintenant une convocation sans garantie d'indépendance".
Le procureur Saab a indiqué lundi à l'AFP que M. Gonzalez Urrutia était "cité (à comparaître) une deuxième fois", mardi.
Vendredi, il avait estimé que le candidat de l'opposition devait "se rendre à cette convocation pour parler (...) de sa responsabilité avant le 28 juillet, pendant le 28 juillet et après le 28 juillet pour sa +récalcitrance+, sa désobéissance aux autorités légitimement constituées".
Considéré comme l'un des hommes les plus influents du pays, Diosdado Cabello, vice-président du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), dont Nicolas Maduro est le président, a prévenu lors d'une conférence de presse : "Ce sera aux organes du système judiciaire de prendre les décisions nécessaires" après la non-comparution de M. Gonzalez Urrutia.
"Les grâces et pardons sont terminés, celui qui attaque les institutions, celui qui s'attaque à notre peuple doit assumer sa responsabilité. Trop c'est trop!" a-t-il lancé.
L'annonce de la réélection de M. Maduro, 61 ans, a provoqué des manifestations spontanées qui ont fait 27 morts et 192 blessés, de source officielle. Quelque 2.400 personnes ont en outre été arrêtées, selon la même source.
Nicolas Maduro accuse régulièrement M. Gonzalez Urrutia d'être responsable des violences et le traite de "lâche".
"Il est temps que vous compreniez une fois pour toutes que la solution ne réside pas dans la répression, mais dans la vérification internationale indépendante et fiable des résultats", lui a lancé M. Gonzalez Urrutia dimanche soir.
Jeudi, sans surprise, le Tribunal supérieur de justice (TSJ), considéré comme inféodée au pouvoir, a validé la réélection de M. Maduro pour un troisième mandat. Une décision "historique et indiscutable", a estimé M. Maduro. "Nulle", selon l'opposition.
- Appels à manifester mercredi -
M. Maduro a été proclamé vainqueur avec 52% des voix par le Conseil national électoral (CNE), qui n'a cependant pas rendu publics les procès-verbaux des bureaux de vote, se disant victime d'un piratage informatique.
Une telle attaque est jugée peu crédible par l'opposition et de nombreux observateurs qui y voient une manœuvre du pouvoir pour éviter de divulguer le décompte exact.
Selon l'opposition, qui a publié les procès-verbaux fournis par ses scrutateurs, M. Gonzalez Urrutia a obtenu plus de 60% des voix.
Sans les montrer, le TSJ a assuré avoir vérifié les procès-verbaux remis par le pouvoir, ainsi que la réalité de l'attaque informatique contre le CNE.
Lundi matin, Juan Carlos Delpino, considéré comme le seul membre de l'opposition parmi les cinq recteurs du CNE, a dénoncé des "irrégularités" : "Tout ce qui s'est passé avant, pendant et après l'élection présidentielle montre la gravité du manque de transparence et de véracité des résultats annoncés", a dit M. Delpino, qui vit désormais caché.
"Ce monsieur a quitté son poste et depuis un mois il a disparu" a rétorqué M. Cabello, assurant que M. Delpino était en Colombie avec l'intention de rendre aux Etats-Unis.
La page internet du CNE, en panne depuis la soirée électorale, a recommencé à fonctionner lundi, sans explication du Conseil.
M. Gonzalez Urrutia risque une arrestation depuis que le parquet a ouvert début août une enquête contre lui et la cheffe de l'opposition Maria Corina Machado, pour "usurpation de fonctions, diffusion de fausses informations, incitation à la désobéissance aux lois, incitation à l'insurrection, association de malfaiteurs".
Mme Machado a lancé samedi un appel à manifester mercredi 28 août, "un mois après notre glorieuse victoire".
M. Cabello a aussi promis des manifestations du pouvoir le même jour pour célébrer la "victoire" de M. Maduro.
Si Mme Machado, qui a dit craindre pour sa vie, est apparue à deux manifestations de l'opposition - arrivant sur un camion entouré par la foule et disparaissant à moto -, M. Gonzalez Urrutia n'a pas été vu depuis le 30 juillet, y compris aux manifestations de l'opposition et aux convocations du TSJ.
Joel Garcia, avocat d'opposants emprisonnés, a assuré à l'AFP que "pour tout le catalogue de crimes, la peine" encourue par M. Gonzalez Urrutia "peut atteindre trente ans", soit la peine de prison maximale dans le pays.