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Pakistan: pour la police, l'attentat de Peshawar a été commis en représailles à ses actions

Écrit par AFP
Publié le 31 janvier 2023, mis à jour le 1 février 2023

L'attentat qui a fait cent morts dans une mosquée au sein du quartier général de la police de Peshawar, dans le Nord-Ouest du Pakistan, a été commis en représailles aux opérations policières visant des groupes islamistes armés, a estimé mardi le chef de la police locale.

Environ 300 à 400 policiers étaient rassemblés lundi dans une mosquée située à l'intérieur de ce périmètre habituellement très surveillé, quand l'explosion s'est produite à l'heure de la prière de midi.

Le gouvernement de la province du Khyber Pakhtunkhwa, dont Peshawar est la capitale, a annoncé que le dernier bilan était de cent morts et 221 blessés. Selon le ministre de l'Intérieur Ranah Sanaullah, l'attentat a tué 97 policiers et trois civils, et 27 blessés étaient dans la soirée dans un état critique.

"Nous sommes sur la ligne de front" dans ce combat contre les mouvements islamistes armés "et c'est pourquoi nous avons été visés", a déclaré à l'AFP le chef de la police de Peshawar, Muhammad Ijaz Khan.

- "Créer la panique" -

"Les terroristes veulent créer la panique en ciblant ceux qui remplissent leur devoir consistant à défendre le Pakistan", a déclaré dans un communiqué le Premier ministre, Shehbaz Sharif.

Les attaques menées par des insurgés contre des patrouilles, des barrages ou des postes de police ont augmenté à Peshawar, située à une cinquantaine de kilomètres de la frontière avec l'Afghanistan, et dans les anciennes zones tribales alentour, depuis le retour des talibans au pouvoir à Kaboul en août 2021.

Elles sont principalement conduites par les talibans pakistanais du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP), qui ont retrouvé leur liberté de mouvement avec le départ des forces américaines d'Afghanistan, ou par l'EI-K, la branche régionale du groupe jihadiste Etat islamique (EI). Mais les attentats de grande ampleur, comme celui-ci, restent plutôt rares.

Moazzam Jah Ansari, le chef de la police provinciale, a déclaré à la presse qu'un kamikaze avait réussi à pénétrer dans la mosquée, portant sur lui dix à douze kilos "d'explosifs en petits morceaux".

Il a ajouté qu'un groupe parfois affilié au TTP, parfois dissident, pouvait être derrière cette attaque.

Shahid Ali, un policier de 47 ans qui se trouvait sur les lieux, a raconté à l'AFP que l'explosion s'était produite peu après que l'imam a commencé la prière.

"J'ai vu de la fumée noire monter vers le ciel. J'ai couru pour sauver ma peau", a-t-il dit.

- Piégé sous les débris -

Les autorités se demandent comment la sécurité de ce lieu, qui abrite aussi les locaux de différentes agences de renseignement, a pu être mise en échec.

Des corps ont continué d'être retirés mardi des décombres de la mosquée dont le toit et un mur se sont effondrés.

A l'hôpital, Wajahat Ali, un policier de 23 ans, a dit être resté piégé sous les débris avec le corps d'un mort sur lui pendant sept heures. "J'avais perdu tout espoir de survivre", a-t-il dit.

Des dizaines de policiers ont déjà été enterrés dans des cérémonies avec garde d'honneur, leurs cercueils alignés et ceints du drapeau pakistanais.

afp

Les analystes estiment que le TTP a été enhardi par le succès des talibans. Le Pakistan reproche à ceux-ci de laisser ce groupe utiliser le sol afghan pour planifier ses attaques, ce que Kaboul conteste.

"Le terrorisme est redevenu un enjeu de sécurité nationale pour le Pakistan, comme il y a une décennie, et cela va empirer si une action concertée n'est pas menée pour y remédier", a dit l'expert Madiha Afzal, de Brookings Institution.

Le TTP a nié être responsable de l'attentat. Après sa création en 2007, il avait tué des dizaines de milliers de civils pakistanais et membres des forces de sécurité, avant d'être chassé des zones tribales par une opération militaire lancée par l'armée en 2014.

- "Un endroit sacré" -

Revenu en force ces derniers mois, il se veut moins brutal que par le passé et affirme ne plus cibler que les forces de sécurité et en aucun cas les lieux de culte.

afp

Mais un responsable sécuritaire local ayant requis l'anonymat a indiqué à l'AFP que les autorités envisageaient toutes les éventualités, y compris l'implication d'une faction dissidente du TTP, de l'EI-K ou une attaque coordonnée de plusieurs groupes.

"Souvent par le passé, des groupes armés, dont le TTP, ont mené des attaques dans des mosquées sans les revendiquer, parce qu'une mosquée sunnite est considérée comme un endroit sacré", a-t-il souligné.

A Washington, une porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche a déclaré mardi que les Etats-Unis "condamnent avec force" cette attaque.

Elle a qualifié l'attentat de "tragique et déchirant", ajoutant: "le terrorisme est indéfendable et il est impardonnable de viser des personnes fréquentant un lieu de culte".

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Publié le 31 janvier 2023, mis à jour le 1 février 2023