Même ascension, mêmes revers: Emmanuel Macron a retrouvé mercredi à Ottawa le Premier ministre canadien Justin Trudeau, tout juste rescapé d'une motion de censure, de quoi replonger le locataire de l'Elysée dans une ambiance aussi électrique qu'à domicile.
Le président français, arrivé de New York où il venait de prendre la parole à la tribune de l'Onu, a été reçu par son hôte dans sa résidence de Rideau Cottage à Ottawa, la capitale canadienne, pour un dîner en tête-à-tête.
Justin Trudeau, apparu sans cravate et décontracté sur le perron de sa demeure, a échappé peu avant à une motion de censure déposée par son principal rival, le conservateur Pierre Poilievre.
Le Premier ministre et son hôte présidentiel, qui incarnaient tous deux une nouvelle génération de dirigeants, jeunes et audacieux, connaissent aujourd'hui les mêmes déconvenues politiques.
Au sommet du G7 en Italie, peu après l'élection d'Emmanuel Macron en mai 2017, leur complicité affichée avait fait couler beaucoup d'encre. Une "bromance" (romance fraternelle), avaient alors lâché des commentateurs.
Sept ans plus tard, Emmanuel Macron a perdu les élections législatives qu'il avait lui-même convoquées et partage désormais le pouvoir avec un Premier ministre de droite.
Justin Trudeau, lâché par son principal allié de gauche, est extrêmement fragilisé, impopulaire et reste à la merci d'autres motions de censure, tout comme son homologue français Michel Barnier à Matignon.
Dans cette ambiance plombée, les deux dirigeants ont décidé de mettre l'accent sur le partenariat stratégique entre leur deux pays, liés par une longue proximité culturelle et linguistique, ainsi que sur des thèmes porteurs, francophonie et intelligence artificielle en tête.
"Le Canada est un pays extrêmement proche, l'un des plus proches en dehors de l'Union européenne", a rappelé la présidence française en amont de la visite.
- "Vive le Québec" -
Emmanuel Macron va discuter jeudi matin de la relance de la francophonie au Canada, au-delà du Québec, avec des acteurs impliqués dans ce domaine, une semaine avant un Sommet de la Francophonie en France. Le Québec est la seule province canadienne à majorité francophone.
L'ambition est de "faire contribuer le secteur privé au renforcement de nos actions en matière de francophonie, y compris l'enseignement, l'ouverture de nouvelles écoles", a souligné l'Elysée, en promettant des annonces en la matière.
Emmanuel Macron retrouvera ensuite Justin Trudeau pour un entretien officiel à Ottawa, suivi d'un déjeuner sur l'intelligence artificielle, auquel le Premier ministre participera également, et d'une conférence de presse commune à Montréal, où vivent quelque 200.000 Français.
Le Canada est un pays en pointe sur l'IA, ce qui intéresse particulièrement Paris, à quelques mois d'un sommet sur le sujet en février en France.
Emmanuel Macron vantera aussi "l'attractivité de la France" auprès d'investisseurs canadiens, comme il l'a fait mardi à New York lors d'échanges avec des grands noms de la finance, a souligné l'Elysée.
L'instabilité politique et les débats sur la hausse des impôts en France suscitent une inquiétude croissante dans le monde économique, y compris à l'international.
Rendez-vous incontournable, le président français s'entretiendra aussi avec le Premier ministre du Québec, François Legault. La rencontre aura lieu à Montréal, et non à Québec, ce qui a fait grincer des dents chez certains francophones, attachés au symbole de la "capitale" québecoise.
En 1967, c'est depuis le balcon de l'hôtel de ville de Montréal que le général Charles de Gaulle avait lancé le slogan des indépendantistes québécois : "Vive le Québec libre!", semant la consternation à Ottawa.
Autre symbole fort de cette visite, le président a convié Justin Trudeau à son traditionnel rendez-vous devant la communauté française à Montréal, l'une des plus grandes du monde.