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Damien Regnard : "Il faut donner les moyens à la CFE"

Cette tribune nous a été envoyée par le sénateur Damien Regnard et s'intitule : "La protection sociale et l’assurance santé, une des toutes priorités pour nos compatriotes établis hors de France." Le parlementaire y évoque les rumeurs auxquelles fait face depuis quelques semaines la CFE et ses pistes de réflexion.

Le sénateur Damien RegnardLe sénateur Damien Regnard
Écrit par Damien Regnard (LR)
Publié le 7 septembre 2023, mis à jour le 11 septembre 2023

Chers Conseillères et Conseillers des Français de l'étranger,
Chers Délégués consulaires,
Chers élus,

 

       La Caisse des Français de l’Étranger a été créée en 1978 par le sénateur Jean-Pierre Cantegrit. Adhérent avec ma famille aux Etats-Unis pendant de nombreuses années, j’ai également eu l’honneur de siéger au Conseil d’administration de la Caisse pendant trois ans. 

 

C’est avec une profonde surprise que j’ai appris il y a quelques semaines par voie de presse, bien mal informée par un membre du conseil d’administration, non respectueux des règles concernant la confidentialité des débats, qui laissait entendre que les finances de la CFE accusaient de lourdes pertes à hauteur de 42 M€. 

 

De quoi effrayer et entamer la confiance de ses quelque 200.000 adhérents ! 

Sans rentrer dans une analyse détaillée d’expertise comptable, il me semble plus que nécessaire de faire le point et de donner quelques précisions sur ce chiffre :

  • 17 M€ ont été provisionnés pour risque de dépréciation des actifs financiers : il ne s’agit donc pas de pertes. C’est une obligation comptable imposée à la CFE. Les produits générés par les placements en 2022 ont même été d’un bon niveau (8,2 M d’euros) 
  • À cela s’ajoutent 4 M€ qui ont été délivrés au titre de la « catégorie aidée », permettant aux assurés à revenus modestes de bénéficier d’une couverture santé à un tarif très bas (210€/trimestre).  
  • Ensuite, le coût des anciens contrats santé mis en place avant la réforme de la CFE en 2019, plus avantageux, est de 13 M€. Un mécanisme de revalorisation progressive de la cotisation est en place.
  • Enfin, le reste du déficit comptable prend sa source dans des cotisations santé trop faibles par rapport aux prestations remboursées, qui augmentent fortement du fait de l’inflation médicale. Et la crise mondiale de la Covid 19 n’a pas aidé !

 

L’offre d’assurance santé s’est aujourd’hui élargie à d’autres prestataires totalement privés ; de plus il existe des contrats avec des différences importantes entre les résidents européens, ceux dans des pays tiers avec ou sans convention et selon son statut (étudiant, salarié, artisan, entrepreneur, retraité etc).

 

La CFE est un organisme de droit privé, mais chargée d’une mission de service public. Elle est une société privée… mais elle demeure soumise à un encadrement et un contrôle strict de l’État, devant se soumettre à de très nombreuses contraintes : décrets du Conseil d’État, tutelle de Bercy et du ministère des Affaires étrangères, le tout face à un environnement hyperconcurrentiel qui ne doit pas se plier aux mêmes exigences et règles. 

 

Nous, parlementaires, devons travailler ensemble (entre autres dans le cadre du PLFSS 2024) pour donner les moyens à la Direction et au Conseil d’Administration de revenir à un équilibre et laisser une plus grande liberté de gestion à cette société privée !

 

Quelques pistes de réflexion pourraient être mises en avant, telles que :

  • Alors que la solidarité nationale vient en aide aux plus démunis en France au travers de la CMU et de l’AME (plus d’un milliard d’euros !), c’est la CFE – et donc ses clients ! - qui doit prendre en charge la quasi-totalité des 4 M€  pour les catégories aidées.  Où est la solidarité nationale pour nos compatriotes établis hors de France ?! 
  • Il est grand temps de permettre à la CFE, d’avoir les moyens de définir sa politique tarifaire sans les contraintes de l’État. En effet, les tarifs sont déterminés par des arrêtés ou des décrets. En 2022, la CFE a augmenté ses tarifs de 2% dans un environnement inflationniste alors que d’autres sociétés privées avaient des augmentations tarifaires qui pouvaient dépasser les 20%.
  • Aussi surprenant que cela puisse paraître pour une société « privée », la CFE ne peut maîtriser la gestion de ses ressources humaines sans avoir l’accord de l’État ! Pour mettre en place une structure commerciale permettant d’atteindre les objectifs de croissance de ses clients, elle doit redéployer des salariés sur d’autres postes. Une véritable ineptie.
  • Une certaine flexibilité et liberté (encadrée) devraient être accordées à la CFE pour ses placements; or ils sont strictement encadrés par un arrêté ministériel de juin 2019. 
  • En tant que société de droit privé, il semblerait normal de tout mettre en œuvre pour faciliter les accords avec des pays tiers, dans le respect d’un cadre défini.

 

Si certains, comme j’ai pu le lire, souhaitent une mission de l’IGAS, c’est, il me semble, une mauvaise option. En effet, l’IGAS n’a aucune expertise ni connaissance de l’international et des spécificités des expatriés. Qu’un audit soit effectué pour aider la Direction et le CA dans ses choix stratégiques, pourquoi pas ? Mais l’IGAS n’est certainement pas la meilleure entité pour effectuer ce travail.  

 

Ce ne sont là que quelques pistes de réflexion qui me semblent prioritaires aujourd’hui, pour que la CFE reste l’assurance santé accessible à tous et pour nous tous, Français à l’étranger, et parvienne rapidement, par ces mesures, à rétablir son équilibre financier.

 

damien Regnard
Publié le 7 septembre 2023, mis à jour le 11 septembre 2023