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EXPAT – Le choc culturel, ça fait mal !

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Écrit par Marie-Pierre Parlange
Publié le 24 avril 2019

Tous les expatriés, ou presque, font l'expérience d'un choc culturel plus ou moins violent, une fois la curiosité et l'enthousiasme passés. Ce stress est ressenti lorsque l'on passe d'une réalité familière à une réalité inconnue. Pas de panique, c'est une étape normale avant la phase d'acceptation et d'intégration

Jacques Brel le disait : "Ce qu'il y a de difficile pour un homme qui habiterait Vilvoorde et qui voudrait aller à Hong Kong, ce n'est pas d'aller à Hong Kong, c'est de quitter Vilvoorde". En effet, si tout changement génère de l'anxiété et du stress, que dire quand l'expatriation vous emmène durablement au bout du monde ? Quitter un monde familier pour l'inconnu exige de grandes qualités humaines. Rares sont les expatriés qui ne subissent pas le 'choc culturel', une période de frustration et de critique de ce qui les entoure. La violence de ce choc ne dépend pas du pays mais bien de l'expatrié lui-même.

Un affaire de distances
Au début de cette aventure qu'est l'expatriation, tout est merveilleux. L'expat a choisi ce nouveau départ, cette nouvelle vie, et est dans la phase de découverte. Très occupé par son installation, il appréhende son nouveau pays avec le regard d'un touriste, et en profite pleinement. Jean-Luc Cerdin, auteur de S'expatrier en toute connaissance de cause, décrit cette phase comme "la lune de miel".
Et puis? la carte postale se fane. Après quelques mois, la magie n'opère plus. L'incompréhension s'installe, amplifiée parfois par des difficultés à s'exprimer dans une nouvelle langue. L'étranger se sent exclu et isolé. L'éloignement avec la famille et les amis restés en France se ressent plus fortement. "Ma famille me manque, les coutumes françaises et une certaine façon de vivre aussi" avoue Lucile, expatriée en Chine.
Au-delà de la distance kilométrique, c'est bien la distance culturelle, climatique, religieuse, politique qui pèse. L'expatrié se rend compte des différences qui existent entre son ancien et nouvel environnement. Sans repères, l'individu devient stressé anxieux, tendu, confus, agacé, voire indigné ou dégouté face à son pays d'accueil. Signes de ce choc culturel, qui se manifestent à un degré variable selon l'individu : la lassitude, la confusion, la mauvaise humeur, l'agressivité, la colère, le désarroi et le repli sur soi.

Les grosses difficultés d'adaptation ne sont pas rares chez les expatriés (photo AFP)
Ainsi Marie au Caire, ne sort plus de chez elle : "je suis tellement enervée de perdre mon temps dans les bouchons que je me suis enfermée chez moi". Juliette, après quelques mois à Bangkok, explique : "Je ne peux plus supporter la lenteur des Thaïs quand ils marchent. Ça me donne envie de leur rentrer dedans." Au Moyen Orient, "se faire un bisou, avoir un geste tendre, se tenir la main? ces gestes qui, pour nous occidentaux, relèvent de la chose la plus banale, sont interdits, explique Magali. Ok, rien d'insurmontable, il faut juste perdre ses reflexes. Mais ca devient pénible quand il faut se dire au revoir à l'aéroport, en se faisant juste un signe de la main !!" Ludovic, un Suisse en Indonésie, témoigne : "Il existe un véritable choc culturel entre les Suisses précis, exigeants, organisés, efficaces en diable, et les Indonésiens placides, impénétrables, souriants et un peu décontenancés. Perdre son calme est aussi mal vu dans ce pays qu'arriver en retard au travail l'est chez nous." Françoise, au Brésil depuis 3 ans, s'agace : "Ce qui m'a choquée, c'est l'habitude du climatiseur dans les bus, le mètro, au bureau. Une ambiance glacée pour pouvoir se mettre des costumes de cadre européen ?" Autant de petites exaspérations plus ou moins graves qu'il faut savoir surmonter.

Comment en minimiser l'impact ?
Il n'y a pas de solution magique au choc culturel, mais pour en minimiser l'impact, il est déjà important d'admettre qu'on en souffre. Ce n'est pas un signe de faiblesse, être mal à l'aise quelque part ne se commande pas. Avant de devenir aigri et négatif, voire de sombrer en dépression nerveuse, une seule solution : aller vers les autres. L'ouverture  d'esprit, le sens de l'humour, la curiosité, les attentes positives et réalistes, l'esprit de tolérance, voilà de quoi trouver un apaisement certain et une motivation nouvelle.
Il faut résister à la tentation du repli sur soi. Votre intégration dépendra de votre capacité à accepter et à comprendre les us et coutumes locaux. Privilégiez les activités sociales plutôt qu'individuelles. Si vous le pouvez, prenez contact avec le tissu associatif local, et prenez le temps d'apprendre la langue du pays. Apprenez les règles de vie propres à votre pays d'accueil. Si les coutumes sont différentes, elles ne sont pas meilleures ni pires.  Comprendre une autre culture est un processus extrêmement lent, et pour favoriser son adaptation, mieux vaut faire un va et vient régulier entre les membres de sa communauté d'origine et ceux du pays d'accueil. Le soutien social de votre groupe de compatriotes joue alors un rôle primordial. Surtout, ne restez pas isolé.

Profiter pleinement de son expatriation
Il y a quelques individus qui ne s'adapteront jamais vraiment bien à leur nouvel environnement et ceux-ci seront toujours critiques envers leur pays d'accueil. Mais d'autres vont profiter pleinement de leur expatriation. En faisant le deuil de ce que l'on a laissé, on commence à percevoir différemment la manière d'être des habitants. Petit à petit, on est davantage en confiance, plus sensible aux sons, aux odeurs, aux aspects positifs de cette nouvelle réalité. Les évènements, les réactions des habitants ne nous prennent plus par surprise. Lorsque l'on connaît suffisamment les codes, on se sent plus à l'aise. En découle un enrichissement certain, c'est la phase de réconciliation.
Ainsi, Hugues, au Cambodge, s'estime "heureux de pouvoir [se] confronter à ce choc culturel. Cela me permet au contraire de m'émerveiller tous les jours sur les différences, d'apprécier la beauté et la valeur des gestes qui semblent, à nous occidentaux, ne pas être les meilleurs". Au Brésil, Françoise est épatée par "l'extrême gentillesse des gens, le fait qu'ils sont à l'écoute des personnes autour d'eux,  les jeunes cèdent leur place. Les passants sont très disponibles pour aider une personne qui semble chercher quelque chose. Mais aussi le fait qu'ils sont tellement bien dans leur corps, même si le corps est disgracieux, handicapé. L'acceptation du handicap et l'accueil du handicap par le corps social, j'admire! "

Alors, parce que c'est pour vivre des expériences fortes que vous êtes partis, puisez dans cette période de spleen presque inévitable l'inspiration pour une expatriation réussie.

Marie Pierre Parlange
Publié le 5 octobre 2012, mis à jour le 24 avril 2019
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