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DIANE ARBUS - Le Freak, c’est choc !


Le musée du Jeu de Paume consacre une rétrospective à la photographe Diane Arbus, "anthropologue" de l'Amérique des années 60. Une première en France, sous forme de plongée déroutante dans l'univers des "freaks" et autres petites bizarreries


Enfant avec une grenade en plastique dans Central Park, New York 1962 (Copyright © The Estate of Diane Arbus)


"Confier un appareil photo à Diane Arbus, c'est comme donner une grenade à un bébé"
. Cette remarque signée Norman Mailer, lui-même "portraituré" par la photographe, fait écho à l'une des photos les plus célèbres d'Arbus, d'ailleurs choisie pour l'affiche de l'exposition : un garçon maigrichon à la mimique crispée, serrant une grenade en plastique en plein Central Park.

Jumelles identiques, Roselle, N.J. 1967 (Copyright © The Estate of Diane Arbus)

Dans les années 1950-60, la photographe arpente les Etats-Unis, et plus particulièrement New-York, ville natale devenue son champ d'investigation privilégié. Née d'une riche famille de commerçants, Diane Arbus (1923-1971) se passionne pour cette Amérique étrange, interlope, marginale. S'immerge dans le monde des forains et des phénomènes de foire (transformistes, géants, lilliputiens?), ces "Freaks" qui passionnent et terrifient à la fois. Elle promène son Rolleiflex 6x6 dans des camps de nudistes, chez des travestis ou des excentriques en tous genres. Entretient une fascination troublante pour les  jumeaux ou triplés, "créatures" identiques et pourtant uniques.

Jeune homme en bigoudis chez lui, 20e Rue, N.Y.C. 1966 (Copyright © The Estate of Diane Arbus)


Traquer l'étrange derrière l'ordinaire
Les 200 clichés exposés au Jeu de Paume, principalement des portraits, épousent tous le format carré et sont dépourvus du moindre texte. A chacun de se faire sa propre perception. Dérangeants tout le temps, malsains parfois, intrusifs tout le temps. Mais un héritage indélébile : "Les photographies sont la preuve que quelque chose était là et n'est plus. Comme une tache. Et leur immobilité est déroutante. On peut leur tourner le dos, mais quand on revient, elles sont toujours là en train de vous regarder", confiait l'artiste. La présentation est chic, les sujets chocs, mais l'accumulation débouche parfois sur une vague impression nauséeuse.

Couple d'adolescents à Hudson Street, New York 1963 (Copyright © The Estate of Diane Arbus)


Chez Diane Arbus, le sujet importe plus que la technique. Elle pose son ?il singulier sur ces "êtres" qui peuplent le monde. Débusque et traque l'étrange derrière l'ordinaire, étudiant au plus près le rapport entre apparence et identité. A travers son objectif, une vieille dame apprêtée au chignon impeccable ou un jeune patriote bourré d'acné et au regard glaçant confinent au surnaturel.

A partir de 1968, Diane Arbus se rend régulièrement dans des prisons, des hôpitaux psychiatriques et autres institutions pour arriérés mentaux, poursuivant son exploration de cette société que l'on ne montre pas. Elle ne ressortira pas indemne de ce travail d'anthropologue. Mi juillet 1971, la photographe assiste au pique-nique de la Fédération des personnes handicapées. Deux semaines plus tard, elle met fin à ses jours.
Thomas Lepresle (www.lepetitjournal.com) mardi 15 novembre 2011


"Diane Arbus",  Jeu de paume. 1, place de la Concorde (Paris 8e)
Du mardi au vendredi de 12 heures à 19 heures
Samedi et dimanche de 10 heures à 19 heures
8,50 ? et 5,50 ?
Jusqu'au 5 février
Tél. : 01-47-03-12-50
Sur le Web : Jeudepaume.org

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