

C'est avec un flegme que l'on qualifierait volontiers de britannique, qu'il dirige depuis peu une des plus grandes agences de presse française en Europe
Arrivé en Espagne à l'automne, après un parcours qui l'a mené de Londres à Paris, en passant par Hong Kong, Tokyo ou Washington, David Williams est rompu à l'étonnement que suscite sa présence anglo-saxonne au sommet d'un emblème de la francophonie dans le monde. "Pour beaucoup de Français, l'AFP c'est le fil national. Mais en fait il y a deux identités : le fil national et le fil international, qui existe en plusieurs langues. Les dépêches rédigées en anglais représentent 40% du volume total de notre production, juste derrière le français. Viennent ensuite l'espagnol, l'allemand, l'arabe et le portugais." Internationale donc l'AFP, qui délivre de l'information sur l'Espagne à une clientèle française certes, mais à de nombreux journaux du monde entier aussi.
(David Williams, dans son bureau à Madrid / Photo Lepetitjournal.com)
Lepetitjournal.com : Selon vous, qu'est-ce qui distingue l'AFP des autres grandes agences de presse ?
David Williams : Chaque agence a sa spécialité. Par exemple, Reuters est reconnue pour sa couverture de l'économie, et tout ce qui concerne les entreprises et les marchés. AP, c'est surtout les Etats Unis... Je pense que l'AFP a une approche plus régionale et des racines plus profondes dans chaque région où elle est présente. Notre griffe, c'est aussi peut être une approche un peu plus analytique des sujets que nous couvrons, ce qui est sûrement le fruit de notre culture française. Le fait de ne pas être une agence anglo-saxonne justement, constitue une spécificité en soi : cela nous ouvre notamment certaines portes dans les pays du Proche Orient. Enfin, nous avons un service photo mondialement reconnu pour la qualité de ses clichés.
En Espagne, qu'est ce qui fait votre "pain quotidien" ?
Dès que je suis arrivé ici, ce qui m'a frappé c'est l'énorme intérêt mondial pour ce qui se passe en Espagne dans le domaine du sport. 80 % des reprises de notre production sont liées au sport et 80% de ce qui est repris sur le sport concerne le football... Et 80 % du football concerne le Barça ou le Real! Avec Nadal, Alonso ou la moto, le sport a même connu un regain d'intérêt supplémentaire dernièrement. Cela dit, nous couvrons bien entendu un spectre informatif beaucoup plus large, mais la tendance est bien celle-là.
Qu'est ce qui fait le buzz aujourd'hui (vendredi) ?
Aujourd'hui il n'y a pas de foot... Nous travaillons principalement sur les annonces faites par Rubalcaba concernant la restructuration des cajas. Il y a eu des fuites dans la presse, des informations circulaient sur Internet et le ministre a confirmé il y a peu que le gouvernement travaille sur un nouveau plan.
Quelle est la dynamique que vous souhaitez instaurer au sein de l'AFP en Espagne ?
Ce que je souhaite c'est faire sortir encore plus les journalistes du bureau, les emmener toujours plus sur le terrain, augmenter la production vidéo. Je veux consacrer encore plus de ressources sur le sport : compte-tenu de l'intérêt international sur la question, nous pouvons faire mieux encore.
En évoquant le traitement de l'information, vous faites souvent référence à l'importance donnée au "client". Est-ce que c'est finalement le client qui dicte l'information que vous couvrez ?
Le but d'une agence de presse, ce n'est pas de faire de l'argent et ce n'est donc pas seulement de satisfaire le client, même si cela constitue un critère très important. Notre but, c'est que nos dépêches soient lues et que nos photos soient vues. Si l'on couvre une actualité qui n'intéresse personne et que notre production n'est pas publiée, alors on travaille pour rien. Je dirais qu'on ne travaille pas pour le client, mais plutôt pour l'audience.
En parlant d'argent, la couverture de la crise espagnole vous a-telle permis de bénéficier d'une demande plus importante d'informations de la part des médias ? Vous a-t-elle bénéficié économiquement ?
Non. Avec la crise nos clients se sont appauvris et ils ont dû réduire leurs coûts. Aujourd'hui, on se trouve face à la situation suivante : les journaux abonnés au fil de plusieurs agences de presse décident d'en couper un. Nous essayons de faire en sorte que ce ne soit pas le notre. Internet représente aussi une grosse concurrence, car certains clients estiment pouvoir se passer de nous et trouver toute l'information sur le web. C'est d'ailleurs un de nos gros défis dans l'immédiat, qui consiste à identifier et stopper le piratage gratuit de notre production.
Propos recueillis par Vincent GARNIER (www.lepetitjournal.com - Espagne) Lundi 24 janvier 2011










































