Depuis le début de l'année scolaire, nous sommes alertés sur les nouvelles décisions prises par le gouvernement français concernant la gestion à la fois financière, pédagogique, humaine et professionnelle des établissements français de l'Étranger.
Tout d'abord, il faut savoir que tous ces établissements ne disposent pas du même
statut.
Pour 74 d'entre eux, ce sont des EGD (établissements à gestion directe de l'AEFE), comme le lycée français Jean Mermoz de Dakar ou le lycée français de Madrid. Ce statut d'EGD est très important car il garantissait jusqu'à présent des avantages non négligeables aux élèves, à leurs familles et aux personnels. Ils sont des composantes de l'établissement public et leur budget est agréé chaque année par l'AEFE sous la tutelle du Ministère de l'Éducation Nationale.
Quelques exemples concrets: la garantie de passer des examens français pour les élèves (Brevet, Épreuves Anticipées de 1ères, Baccalauréat), la possibilité de demander des bourses à l'Ambassade de France pour les parents, celle de préparer un concours interne de l'Éducation Nationale (comme le CAPES ou l'Agrégation) pour les enseignants recrutés localement, un quota minimum de 50% d'enseignants titulaires.
En parallèle, 153 établissements sont conventionnés, c'est à dire qu'ils ont signé une convention administrative, financière et pédagogique avec l'Agence. Ils sont gérés par des associations de parents d'élèves et relèvent du droit privé local. Une partie de la convention porte sur les conditions de rémunération et d'affectation des enseignants titulaires de l'Éducation Nationale y officiant mais comme la plus grosse partie du budget repose sur l'association des parents d'élèves, les titulaires y sont moins nombreux que dans les EGD. De plus, les classes de lycée y sont souvent en apprentissage type CNED (Centre Nationale d'Enseignement à Distance Français) faute de moyens pour recruter des titulaires. Exemple: le lycée français Jules Verne de Pretoria en Afrique du Sud, le lycée Condorcet de Sydney en Australie ou encore le lycée français François Mitterrand de Brasilia au Brésil.
Le dernier type d'établissements du réseau sont les lycées et collèges dit "partenaires". Ils sont les plus nombreux avec 265 structures regroupées sous le statut de la MLF (Mission Laïque Française) et ils accueillent plus de 60.000 élèves. Ils sont aussi gérés par des associations de parents d'élèves et relèvent du droit privé local. Les appuis de la part de l'agence se situent principalement au niveau de la formation continue des personnels et de l'aide à l'application des programmes français. Exemple : l'école française internationale de Varna en Bulgarie, le collège Cours-Sévigné à Abidjan en Côte d'Ivoire ou encore le lycée internationale Néfertari au Caire en Égypte.
Or, depuis la rentrée 2017, le gouvernement a annoncé puis mis en place des coupes budgétaires drastiques à l'attention des lycées français de l'Étranger : une augmentation dès la rentrée prochaine des frais de scolarité pour les familles, une fermeture massive de postes de professeurs titulaires sur l'ensemble du réseau mondial et le déconventionnement de certains établissements à gestion directe de l'agence, comme c'est déjà le cas pour l'établissement Paul Gauguin au Maroc, l'école française André Malraux à Saint Petersbourg, ou le lycée franco-mexicain de Mexico. Qui sera le prochain ?
Du coup, très inquiets pour l'avenir du réseau et de ses élèves, parents, enseignants, syndicats et associations d'anciens élèves ont décidé d'unir leurs forces pour faire remonter leurs inquiétudes justifiées au gouvernement français et exiger la garantie effective et pérenne de ces établissements, ainsi que des réponses claires.
Il y a quelques mois, Katia, Hassan et Damien, tous les trois basés à Madrid, ont créé un groupe sur Facebook qui regroupe aujourd'hui 9.500 membres afin d'informer un maximum d'internautes sur la situation inquiétante actuelle.
Leur implication est bénévole, il sont libres et apolitiques.
En bref, voici leurs objectifs : faire entendre leurs voix jusqu'au Président de la République française, la voix de tous les parents de 350.000 enfants scolarisés dans le réseau AEFE, continuer d'être soutenus par les sénateurs et députés des français de l'Étranger, maintenir la qualité de l'enseignement, stabiliser les frais de scolarité sous peine de voir de plus en plus de familles dans l'incapacité de pouvoir offrir ce type d'enseignement à leurs enfants, donner plus de place aux associations de parents d'élèves dans le cadre du débat sur l'avenir du réseau, enfin, stopper la précarisation des enseignements titulaires qui se voient refuser leurs détachements au sein du réseau ou rompre leurs contrats pour un retour immédiat sur le territoire français à la rentrée scolaire prochaine.
En parallèle, ils ont mis en ligne une pétition Sauvons les lycées français du monde qui a déjà atteint 12.700 signatures en trois semaines, avec plus de 100 pays signataires. Cette pétition sera adressée au Président de la République, M. Macron.
Et ils ne vont pas s'arrêter là car ils prévoient de rencontrer dans quelques jours messieurs Hamon et Lemaire à Madrid ainsi que des députés et sénateurs durant tout le mois d'avril.
De leurs côtés, certaines associations de parents d'élèves demandent aux familles de payer les frais de scolarité du troisième trimestre en retard pour se faire entendre et signifier leur mécontentement. Enfin, des associations de parents d'élèves ont lancé des procédures juridiques (procès) contre le gouvernement français et la MLF.
Et pour les Personnels, tous types de contrats confondus (locaux, résidents et expatriés) des établissements du réseau, également très inquiets pour la suite, ils en sont à leur troisième jour de grève générale depuis novembre 2017. Ils ont mis en place des actions théâtrales démonstratives dans les lycées, comme le fait de mimer le défilé d'un cortège funéraire ou encore un code vestimentaire « tous en rouge » pour manifester leur colère et l'incompréhension de la situation. Certains viennent de faire en sorte d'annuler les épreuves blanches du Brevet et du Bac au sein de leurs établissements, faute d'enseignants surveillants et de correcteurs.