Édition internationale

CHRISTINE OCKRENT – La reine glisse de son trône


Enlisée dans un mauvais film mêlant espionnage et guerre de clans, Christine Ockrent, numéro 2 de l'Audiovisuel Extérieur de la France (AEF), passe à la contre-attaque en portant plainte pour "harcèlement moral". Le Royaume de la "reine Christine" ne serait-il qu'un château de cartes prêt à s'écrouler ?

Christine Ockrent, la directrice générale déléguée de l'Audiovisuel extérieur de la France (AEF), a annoncé, dans un entretien dimanche au Monde, vouloir porter plainte "dès la semaine prochaine" contre X pour "harcèlement moral". Christine Ockrent (photo AFP) avait été mise en cause pour sa possible implication dans une affaire d'espionnage informatique au sein de l'Audiovisuel extérieur de la France (AEF) -société chapeautant RFI, France 24 et une partie de TV5 Monde (lire notre article)-. L'ancienne star du PAF est ouvertement en conflit avec le PDG du groupe, Alain de Pouzilhac.

Christine victime
Dans cette guéguerre des chefs, la numéro 2 de l'AEF avait perdu une bataille importante en décembre dernier lorsque le personnel de France 24 avait voté à 85% une motion de défiance à son encontre. "Il existe une crise au sein de l'AEF qui n'est pas de mon fait, mais dont je suis la victime", affirme-t-elle pourtant, précisant n'avoir plus accès "à aucun dossier" depuis quatre mois et vivre dans "un climat de violence, d'humiliation et de souffrances intolérables". La compagne de Bernard Kouchner fustige l'attitude de son supérieur hiérarchique l'accusant de considérer France 24 comme "sa chose, sa propriété personnelle". "Il s'est débarrassé avec brutalité d'un directeur de l'information qu'il jugeait trop proche de moi et a imposé, contre ma volonté, un directeur de la rédaction qui n'a pas caché qu'il voulait ma décapitation!", explique-t-elle.

Une reine plus politique que journalistique ?
Si Christine Ockrent rappelle que seule sa plus proche collaboratrice, Candice Marchal, est impliquée dans l'affaire d'espionnage informatique et que l'enquête de police l'avait blanchie "sans même qu'il ait été nécessaire" qu'elle soit entendue, la querelle de chefs qui règne à l'AEF n'est à l'avantage d'aucun des opposants. Dans les couloirs de la CNN à la française, on regrette en particulier l'attitude politicienne de la journaliste. "On attendait de Christine Ockrent qu'elle vienne faire du journalisme, elle n'a fait que de la politique", déplore un journaliste interrogé par Libération. Fille du diplomate belge Roger Ockrent, compagne d'un ancien ministre des Affaires étrangères, la diplômée de l'institut d'études politiques de Paris et de l'université de Cambridge ne peut s'empêcher de vivre le journalisme en témoin privilégiée des arcanes du monde politique. Si elle a été baptisée la "reine Christine" pour avoir été la deuxième femme à présenter le JT (sur France 2), elle a été intronisée par les colonnes politiques de l'Express, sur Europe 1 ou encore dans ses émissions sur France 3. Sa ligne éditoriale en serait d'ailleurs teintée de subjectivité. Richard Labévière, rédacteur en chef à Radio France Internationale (RFI) et licencié en juillet 2008 après avoir interviewé le président syrien Bachar al-Assad avait déclaré devant le Syndicat de la presse le mois suivant : "Derrière la vitrine d'une presse libre, on assiste en fait (?) à la mise au pas de l'Audiovisuel extérieur de la France, RFI et TV5 Monde ? à France 24, le travail est déjà fait ? par le publicitaire Alain de Pouzilhac et Christine Ockrent-Kouchner, qui s'inscrivent dans cette volonté d'imposer une lecture et une pensée unique résolument néoconservatrice et pro-israélienne."

Une reine controversée
Christine Ockrent peut affirmer qu'en "quarante ans de métier" son honneur n'a souffert d'aucune "ombre", ses méthodes journalistiques n'ont pourtant pas toujours été vues d'un très bon ?il. En 1979 déjà, son interview durement menée et controversée de l'ancien Premier ministre du shah d'Iran, Amir Abbas Hoveyda, dans les geôles des révolutionnaires islamiques, et juste avant son exécution, a laissé un goût amer. Son avidité pour les "ménages"  - prestations de journalistes qui mettent leur notoriété au service de l'animation de débats en tous genres ? a fait couler beaucoup d'encre au début des années 2000. Christine Ockrent aurait monnayé ses services, selon le publiciste Guy Birenbaum, 18.000 euros la demi-journée. La spécialiste des Etats-Unis, pays qu'elle connaît bien pour y avoir travaillé pendant plusieurs années, avait également été épinglée lors de la sortie de son livre La Double vie d'Hillary Clinton (2001) dans lequel elle aurait plagié un livre américain de Gail Sheehy.

Malgré cette nouvelle affaire, Christine Ockrent garde la tête haute et affirme ne vouloir "absolument pas" démissionner de son poste. Avec un salaire de 300.000 euros par an, la reine Christine gagne plus que Barack Obama ou Nicolas Sarkozy, de quoi régner paisiblement, tout au moins financièrement, sur un Royaume de plus en plus illusoire.
Damien Bouhours (www.lepetitjournal.com) mardi 29 mars 2011

En savoir plus

Article d'Acrimed, Christine Ockrent, le passe-droit permanent
Dépêche AFP, France 24: Christine Ockrent va déposer plainte pour "harcèlement moral"

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