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Argentine : Pourquoi des manifestations massives en défense de l’université publique

Mercredi 2 octobre 2024, la manifestation en défense de l’université publique a réuni près d’un million de personnes dans toute l’Argentine. A Buenos Aires, la place du Congrès a été investie par des dizaines de milliers de manifestants, mobilisés contre le président Milei. Étudiants, enseignants, organisations politiques et syndicales se sont tous retrouvés pour protester contre une politique anti-sociale et en défense de l’éducation publique argentine. Mais qu’est-ce qui a précisément déclenché un tel mouvement ?

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Unsplash
Écrit par Jeanne Bas-Uhlhorn
Publié le 22 octobre 2024

 

L’éducation publique : plus qu’un droit, une tradition argentine 

Avant d’expliquer la situation politique actuelle, il est crucial de comprendre qu’en Argentine, l’éducation publique n’est pas juste une institution comme les autres mais un véritable patrimoine national. Ainsi les argentins vous diront volontiers que c’est, avec le football, l'une des meilleures choses de leur pays. L’école laïque, obligatoire et gratuite a été établie en 1884 et malgré quelques suspensions pendant les dictatures du XXème siècle, c’est un aspect de la société argentine qui a perduré dans le temps. Parce qu’en plus d’être gratuite, les universités argentines (et notamment la Universidad de Buenos Aires ou UBA) sont classées parmi les meilleures du continent latino-américain, attirant de nombreux étudiants étrangers. Par ailleurs, elle est publique et repose uniquement sur les financements de l’Etat. L’excellence de l’éducation est donc une des forces du pays ainsi que son accessibilité (grâce à sa gratuité).

 

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Une loi pour rescaper l’université publique de la crise 

L’université publique est en crise depuis quelques années. De la même manière que toutes les institutions publiques, les moyens manquent cruellement pour subvenir aux besoins en termes de matériel et de personnel. Les salaires et les financements publics ne suivent pas l’inflation, montée jusqu’à plus de 200% en 2023. Ainsi, une loi (dite loi de financement universitaire) a été précisément conçue pour remédier partiellement à ces problèmes. Il était notamment prévu une hausse des salaires puisque les employés de l'université se trouvent pour la majorité sous le seuil de pauvreté. La loi prévoyait également un système bimensuel d’actualisation du budget de l’université selon le pouvoir d’achat, l’inflation et le taux de change. Après débat au sein des deux chambres qui forment le pouvoir législatif argentin, le Congrès a finalement approuvé le loi courant septembre 2024. La joie des syndicats, des salariés et des étudiants a été cependant de courte durée puisque Milei a immédiatement annoncé qu’il poserait son veto, annulant immédiatement le passage de la loi. 

 

Marcher pour l’université et contre le veto en Argentine 

C’est donc à la suite de ces événements que des centaines de milliers de personnes sont sortis dans la rue le mercredi 2 octobre. L’annonce que le véto du gouvernement était imminent a poussé une foule diverse (jeunes, retraités, travailleurs) à sortir défendre ce pilier de la société argentine qu’est l’université. A Buenos Aires où les heurts avec la police sont fréquents, la manifestation s’est faite de manière pacifique. Sur la place du Congrès, les slogans fleurissaient. Sans éducation pour le peuple, il n’y aura pas de paix pour le gouvernement, disait l’une d’entre elles. Les argentins étaient tous réunis ce jour-là pour protester contre la liberté de leur gouvernement à aller contre les décisions du pouvoir législatif de passer cette loi. Malgré ces manifestations massives, le véto de Javier Milei a été déposé et approuvé à majorité par la chambre des députés le 9 octobre 2024. La loi du financement universitaire ne sera finalement pas appliquée.

 

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Impossible de prédire la suite des événements et des mobilisations en faveur de l’université publique. Depuis l’approbation du véto de Milei, certaines universités (notamment la UBA de Sciences Sociales) ont été occupées par des étudiants et des salariés en guise de protestations. Les organisations étudiantes tentent d’établir un plan de lutte et de protestation incluant le blocage des cours mais il reste à voir si le gouvernement sera sensible à la colère de sa jeunesse. Rien n’est moins sûr.

 

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