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Une journaliste et un photographe lancent un festival de photoreportage à Timisoara

Ruxandra Dumitrescu et Jean-Christian TiratRuxandra Dumitrescu et Jean-Christian Tirat
Mihaela Munteanu, animatrice radio, avec ses invités du jour à l’émission Week end cu prieteni de Radio Iasi
Écrit par Grégory Rateau
Publié le 17 avril 2023, mis à jour le 17 avril 2023

Notre rédaction est allée à la rencontre de la journaliste/reporter roumaine Ruxandra Dumitrescu et du reporter photographe français passionné de la Roumanie, Jean-Christian Tirat. Ensemble, ils ont lancé le projet d'un festival de photoreportage à Timisoara (du 1er au 31 juillet) où de grands noms du photoreportage en France seront attendus. Un événement qui est coorganisé par les universités Universitatea de Vest et Facultatea de Arte si Design de la ville.

 

 

(...) un photographe toulousain, aujourd’hui décédé, a vécu à Timisoara où il a photographié les événements de décembre 1989, puis a participé à la création de Vest Matinal, l’un des premiers quotidiens indépendants de la région. Il s’appelait Brice Fleutiaux et il fut rendu célèbre par la mobilisation de Reporters sans Frontières lorsqu’il fut pris en otage huit mois durant par des bandits tchétchènes. Nous tenions à lui rendre hommage en donnant son nom au festival.

 

Grégory Rateau : Pouvez-vous vous présenter brièvement?

Ruxandra Dumitrescu : D’abord reporter et coréalisatrice d’émissions à Radio Târgu Jiu, je suis ensuite passée à la presse écrite. Co-créatrice du quotidien Obiectiv Gorj Magazin, nous portions alors une voix puissante et indépendante, notamment contre un projet de saccage de la Colonne sans Fin, au prétexte d’une prétendue restauration. Nous avons remporté cet âpre combat et découvert que la volonté de Constantin Brancusi, avait été trahie par l’ancien régime. Vous l’aurez compris, l’œuvre de Brancusi est l’une de mes passions.

 

Jean-Christian Tirat : Originaire de Toulouse, j’ai d’abord été reporter photographe pour le quotidien Sud-Ouest et l’agence Sygma ; une époque d’aventures, très agitée et passionnante pendant laquelle j’ai notamment couvert au Cambodge la prise de Phnom Penh par les khmers rouges, la première guerre civile du Liban, le non respect des accords d’Helsinki en URSS, la fin du régime de Yann Smith en Rhodésie-Zimbabwe... Mais, las de toute cette violence, j’ai ensuite ouvert un atelier photographie à l’école supérieure des Beaux Arts de Toulouse. Cela me laissait assez de temps libre pour pratiquer un journalisme indépendant et une photographie documentaire, en particulier sur le canal du Midi et les voies navigables européennes. À partir de 1990, j’ai orienté mes activités vers la Roumanie pendant les longs, très longs congés universitaires. J’ai pris ma retraite d’enseignant il y a deux ans pour poser définitivement mon sac ici. En binôme avec Ruxandra j’y poursuis à plein temps mes travaux photographiques et des recherches historiques.

 

Ruxandra, pouvez-vous expliquer à nos lecteurs votre passion pour la France et plus largement pour la francophonie?

Venant d’une famille traditionaliste, j’ai reçu dès l’enfance mes premières notions de français, ainsi que les mots usuels, les formules de politesse… de la part de ma mère. Mes premières revues ? Pif, et Tintin, évidemment ! Puis, j’ai eu la chance de l’étudier à l’école alors que la langue russe s’imposait. On peut donc dire que je fus gâtée. Mes lectures ont ensuite développé mon goût pour la France. Pour la connaître, bien sûr, j’ai poursuivi mes études de français à l’Université de Bucarest. J’aime surtout la poétique musicalité de votre langue, la culture française, son histoire, la chanson (Edith Piaf, Jacques Brel, Georges Brassens, Barbara, et tant d’autres…)... Il est difficile de décrire en quelques mots ma passion pour un pays que je n’ai pu visiter qu’après les événements de ’89. Enfin, l’histoire de Jean-Christian a éveillé mon intérêt de journaliste. Je le connaissais déjà un peu quand il a publié un livre-enquête sur la catastrophe de l’usine toulousaine d’AZF. J’ai donc consacré toute une série d’articles à ses actions humanitaires, culturelles, sportives et journalistiques ; cela nous a rapprochés. Maintenant, nous sommes partenaires … Nous partageons des idées, nos recherches, mais aussi, quand nous avons le temps, des loisirs et des sentiments… Trop tard ? Certes non !    

 

Jean-Christian, quel lien entretenez-vous avec la Roumanie?

J’ai découvert la Roumanie en mission humanitaire pour la Croix Rouge Française, quelques semaines après les événements de décembre 1989. Ce fut un traumatisme quand nous avons découvert les orphelinats, aussi appelés camin spital. Ce fut aussi un coup de foudre en découvrant la culture d’un peuple qui savait tout de nous ou presque, alors que nous ne savions quasiment rien de lui. Passionné de randonnée moto tout terrain, un excellent moyen de découvrir un pays dans toute son authenticité, j’ai arpenté l’été suivant la presque totalité de l’arc carpatique et de la Transylvanie. J’en fus émerveillé. En 1991 j’ai crée le Raid des Carpates, un rallye moto qui suivait les mêmes chemins. C’est ainsi que j’ai appris les bases de la langue roumaine, en discutant avec les bergers et les paysans pour tracer nos itinéraires. C’est aussi dans ce cadre que j’ai connu Ruxandra. Elle organisait pour nous une épatante étape à Târgu Jiu. Cependant, après 9 éditions, il était temps d’arrêter avant que le succès ne nous transforme en horde sauvage peu respectueuse de l’environnement. Aujourd’hui, je continue mes escapades hors des sentiers battus, mais au guidon d’un formidable VTT avec assistance électrique ; un moyen encore plus propice à la photographie documentaire.

Enfin, incapable de rester inactif, je me consacre aussi à l’organisation d’un festival de photoreportage qui se tiendra en juillet prochain à Timisoara.

 

Pourquoi un événement photoreportage à Timisoara?

Jean-Christian Tirat : En 2017, j’ai exposé mon travail sur les camin spital à la Fondation Timisoara’ 89. Le mois suivant je présentais un reportage sur le Cambodge au festival Interfoto qu’organise la Faculté des Arts et du Design de la ville. C’est de là qu’est venue l’idée d’un festival international de photoreportage en co-organisation avec cette faculté. De plus, un photographe toulousain, aujourd’hui décédé, a vécu à Timisoara où il a photographié les événements de décembre 1989, puis a participé à la création de Vest Matinal, l’un des premiers quotidiens indépendants de la région. Il s’appelait Brice Fleutiaux et il fut rendu célèbre par la mobilisation de Reporters sans Frontières lorsqu’il fut pris en otage huit mois durant par des bandits tchétchènes. Nous tenions à lui rendre hommage en donnant son nom au festival.

 

1975_Cambodge_NB_08_28b_3-casques-et-3-bonzes : Mars 1975, Banlieue de Phnom Penh (Cambodge) 3 bonzes marchent vers le front, certains que Bouddha les protègera. Les soldats tentent en vain de les en dissuader. Photo JcTirat.
Mars 1975, Banlieue de Phnom Penh (Cambodge) 3 bonzes marchent vers le front, certains que Bouddha les protègera. Les soldats tentent en vain de les en dissuader. Photo JcTirat.

 

 

Des grands noms du photojournalisme en France seront-ils présents?

Jean-Christian Tirat  : Cette première édition sera très modeste, une sorte de test. José Nicolas, dont les images iconiques de la « Révolution » à Bucarest qui ont fait le tour du monde, présentera son travail pour la première fois en Roumanie. Il sera exposé au Mémorial de la Révolution, puis l’an prochain au Musée National Militaire Regele Ferdinand I.

Séra, auteur de récits dessinés historiques s’inspirant de photographies, présentera ses planches originales avec les photos qu’il a utilisées pour ses derniers ouvrages traitant de la tragédie cambodgienne. C’est un travail très puissant.

Patrick Chauvel, actuellement en Ukraine, a couvert depuis la guerre du Vietnam tous les conflits de la planète. Il sera probablement présent pour la deuxième édition avec quelques autres confrères de renom. Nous souhaiterions aussi exposer l’immense photographe paysagiste roumain, Jeno Major.

grégory rateau
Publié le 17 avril 2023, mis à jour le 17 avril 2023

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