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COMMUNAUTE - Benoît Mayrand : "Un bout de Bretagne à Bucarest"

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Écrit par Franco-Roumanie
Publié le 1 octobre 2018

Notre rédaction est allée à la rencontre de Benoît Mayrand, un Français installé depuis 27 ans en Roumanie et qui vient d'ouvrir une crêperie bretonne dans le centre de Bucarest, avec le chef français Philippe Dupré.

 

 

 

Grégory Rateau : Pouvez-vous nous présenter brièvement votre parcours ?

Benoît Mayrand : Je suis né en France, je suis arrivé en Roumanie sur la demande d’une entreprise pour créer une société d’irrigation dans le domaine agricole et je suis tombé amoureux du pays. Je vis depuis à plein temps à Bucarest, j’y ai trouvé beaucoup de plaisir et d’intérêt. J’ai aujourd’hui 52 ans, j’ai donc vécu plus ici qu’en France, mais je reste attaché à mon pays. C’est pour cela que je représente les Français installés en Roumanie et en Moldavie, je m’implique sur un plan politique et associatif. J’ai été élu il y a 4 ans de ça conseiller consulaire. J’ai créé ma propre société de recrutement et je pars aujourd’hui sur une nouvelle aventure par nostalgie de mon enfance, de la Bretagne. Je me suis associé avec le chef Philippe Dupré pour monter cette crêperie que vous découvrez aujourd’hui, la crêperie Harbour.

 


Comment jugez-vous la qualité de vie ici ?

Ici il est encore possible de prendre des initiatives, de tenter des choses mais il faut, il est vrai, avoir un peu d’argent au départ pour se lancer. Je suis un privilégié, j’en ai parfaitement conscience, je suis libre ici, voilà pourquoi je prends aussi le temps de m’impliquer pour les autres. On peut, quand on désire des choses simples, être heureux en Roumanie, ce qui devient de plus en plus difficile en France avec un revenu modeste.

 


Comment vous est venue l’idée de monter une crêperie à Bucarest ?

Alors, d’abord on a choisi Bucarest car c’est le centre économique de la Roumanie, ce pays reste assez centralisé. Je suis également très attaché à cette ville. Toutes mes activités partent de Bucarest, et mes amis sont ici en grande partie. Cette ville devient de plus en plus agréable, elle a beaucoup changé. Il était beaucoup plus difficile de vivre ici il y a 20 ans de cela. Aujourd’hui la ville devient plus propre, par exemple je trouve Paris beaucoup plus sale que Bucarest quand j’y retourne. La ville reste encore trop polluée mais il y a une douceur de vivre, c’est indiscutable, un autre rythme, un climat continental agréable qu’on n’a plus en France, avec des vraies saisons.

 

Et pour la crêperie ?

Philippe a été l’élément moteur car c’est un chef connu et apprécié, depuis 7 ans en Roumanie,  je ne me serai pas lancé sans lui. C’est aussi lié à une madeleine de Proust, j’avais déjà monté une crêperie en 1994 en souvenir de mon père qui m’emmenait tous les étés en Bretagne pour manger des crêpes. Je voulais partager cette passion avec les autres, trouver un lieu de rendez-vous convivial pour échanger et être un peu dépaysé. Avec Philippe c’est différent de ma première tentative, le savoir-faire est aussi au rendez-vous. La carte reprend des spécialités de « Ici et Là » et les prix sont abordables pour permettre aux gens de goûter à tout et de se faire une idée pour revenir ensuite s’ils apprécient.

 

Qu’est-ce qui serait une crêpe réussie selon vous ?

Ça parait simple à faire en apparence mais en réalité il faut d’abord les bons produits, par exemple la farine de sarrasin est importée de France. La crêpe qui a le plus de succès est la crêpe au saumon fumé et aux poireaux. On a un fumoir, on fume nous-même notre saumon. Cette association avec la fondue de poireaux est un mélange assez détonnant qui apporte à la fois de la couleur et des saveurs intéressantes.

 

Quelle est votre clientèle, y-a-t-il plus de Français que de Roumains ?

Ça fait un mois que l’on a rénové ce restaurant dans ce quartier historique, un endroit de passage pour les touristes. Il s’agissait d’un pub-restaurant, on a gardé une partie du  nom «  Harbour », le décor était en bois, c’était assez chargé, un vrai bar de marine. Et quand on a appris que ce lieu était en vente, on a voulu le reprendre car il incarnait parfaitement l’esprit de la crêperie telle qu’on la concevait en France. Il y a donc beaucoup de touristes, le quartier est très vivant, il y a beaucoup de Roumains, on a donc conservé la carte traditionnelle qui fonctionnait bien pour ne pas perdre la clientèle des habitués. Les Roumains se font peu à peu à la galette salée, ce qui était compliqué au départ car la crêpe est surtout connue en Roumanie comme étant un dessert pour les enfants, la fameuse crêpe sucrée vendue un peu partout dans les rues. La galette, elle, est bretonne et ce concept devait donc trouver ses amateurs mais aujourd’hui les Roumains représentent environ 70% de notre clientèle.

 

Comment avez-vous adapté vos produits au marché roumain ?

On ne les a pas adaptés, bien au contraire, on recherchait avant tout l’authenticité, l’emmental est donc importé de France, le jambon également, du jambon de Paris de porc. Le jambon roumain est très différent, il est très bon mais les saveurs ne sont pas les mêmes. On désirait ramener un petit bout de Bretagne en plein cœur de Bucarest, le pari est un peu risqué mais on en rêvait avec Philippe. Mettre en place un lieu de convivialité aux couleurs de la mer avec des saveurs oubliées.

 

Le côté « Made in France » attire-t-il toujours autant ?

En termes de gastronomie, la France reste un gage de qualité. Les Roumains sont très curieux, il y a de plus en plus d’émissions de cuisine, certains ont voyagé en France. Ce label attire, oui, les liens entre nos deux cultures ne remontent pas d'hier.

 

Quelles différences avez-vous remarquées entre les habitudes alimentaires des Roumains et celles des Français ?

Les Roumains désirent en général des portions plus importantes. Les Français essayent de manger plus léger, en termes de diététique, ils sont souvent plus pointilleux. Après je généralise largement. L’assiette roumaine est donc plus copieuse. La galette les séduit car elle « nourrit son homme » comme on dit, ils peuvent ensuite passer à la sucrée et là je peux vous dire qu’ils ont du mal à se lever ensuite (rires).

 

En tant qu’acteur économique quelles sont, selon vous, les perspectives économiques du pays ?

Il y a un très fort dynamisme économique en Roumanie, une forte activité du marché. Il n’y pas la protection sociale qu’il peut y avoir en France, c’est certain, mais le pays permet à de jeunes entrepreneurs roumains ou étrangers de créer leurs sociétés et d’avoir un succès rapidement. Ca va même plus vite qu’en France ! J’essaye de m’impliquer en représentant mes compatriotes, et malgré le manque de stabilité politique, je tente à ma petite échelle de faire en sorte que les Français ne se détournent pas de la politique. Le manque de visibilité fiscale fait encore du tort aux investisseurs et j’aimerais que cela change pour le bien de tous. Ce pays est surprenant car il est plein de contrastes. La Roumanie s’est réformée à un rythme accéléré, c’est l’un des pays d’Europe qui a le moins d’endettement au niveau national. Cela a ses avantages bien sûr mais aussi ses inconvénients, il manque certes l’infrastructure, mais la réactivité est là. En période de crise vous sentez la crise, en période de croissance, vous sentez la croissance. Je suis plutôt optimiste sur la suite…

 

Pour toute information sur la crêperie le Harbour veuillez suivre ce lien


 

Propos recueillis par :

 

gregory-rateau

 

 

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Publié le 1 octobre 2018, mis à jour le 1 octobre 2018

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