Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

RDV ECO - L’économie montre les premiers signes de fatigue

joshua-ness-117255-unsplashjoshua-ness-117255-unsplash
Écrit par Anghel Iulian
Publié le 22 mai 2018, mis à jour le 22 mai 2018

L’économie montre les premiers signes de fatigue après la forte croissance de ces dernières années. Est-ce le début du déclin ?

 


L’économie de la Roumanie a enregistré une croissance de 4% pendant le premier trimestre de cette année par rapport au même trimestre de l’année passée, mais elle a stagné par rapport au 4ème trimestre de 2017. Plusieurs économistes roumains pensent qu’il s’agit du sommet d’un cycle économique qui sera suivi d’une phase descendante.


Les économistes roumains qui ont soutenu au cours des années que l’économie croît « au-delà de son potentiel » et que cela entraînera des « corrections » ont été toutefois surpris par le résultat plus mauvais que prévu, car les plus pessimistes des prévisions annonçaient une avance de 4,5-5% du PIB.


L’année dernière, l’économie a augmenté de 6,9%, après une croissance de 4,9% en 2016 et de 4% en 2015. En 2016 et 2017, la Roumanie a enregistré la plus forte croissance économique de l’UE. Au premier trimestre 2017, avec une croissance économique de 4%, la Roumanie occupait la cinquième place dans l’Union.


Pour quelle raison l’économie n’a pas atteint les prévisions des économistes?


Il n’est pas encore parfaitement clair, mais le rythme de croissance ralentit partout dans l’UE. Le prix du pétrole qui est arrivé à 80 dollars par baril ralentit l’activité économique et produit une inflation en chaîne, la consommation étant ainsi réduite. L’augmentation des intérêts aux Etats-Unis entraîne un retrait du capital des pays émergents et les menaces d’une guerre économique contraignent les entreprises à être plus pessimistes et, très probablement, à mettre certains projets en attente. En Roumanie, la croissance économique inattendue de 6,9% de l’année passée a créé un « effet de base » très fort et, par conséquent, la croissance de cette année sera en tout état de cause inférieure aux prévisions. Par ailleurs, en Roumanie, les intérêts ont déjà commencé à augmenter suite à une inflation très élevée, de plus de 5%, ce qui a conduit à la réduction de la consommation qui a assuré les taux élevés de croissance de ces dernières années.


Or le gouvernement et les économistes misaient sur une autre très bonne année avec des estimations de croissance de 5% en moyenne. Après les résultats du premier trimestre, les analystes ont sérieusement revu les prévisions de croissance à la baisse : ING Bank a réduit sa prévision de croissance économique de 4,7% à 3,5% et Erste Bank a ajusté ses anticipations d’évolution du PIB de 4,7% à 4,1% pour 2018.


Une croissance de 3,5-4% aurait été très bonne à une autre époque, mais à présent elle peut causer de grands problèmes pour toute l’économie. Cette année, le gouvernement attend une croissance de 6,1% et le budget a été construit sur une avance de 5,2% du PIB, ce qui se traduirait par un plus de 36 milliards de lei (8 milliards d’euros) au budget. Cela signifie que le programme de revenus, dépenses et déficit budgétaire a été établi sur la base de ces chiffres-là. Le gouvernement a continué à majorer les salaires et le niveau des dépenses salariales du premier trimestre a dépassé de 18,1% celui de la période similaire de l’année dernière, alors que les dépenses totales de l’état ont augmenté de 22,1%.


En même temps, les revenus de l’état ont augmenté de seulement 11,5% et, dès les premiers mois de l’année, le Ministère des Finances a été obligé d'emprunter de l’argent pour couvrir le déficit.


Si les revenus de l’état n’augmentent pas au niveau préconisé – avec un plus de 14% par rapport à 2017, conformément au programme budgétaire – alors soit il y aura des ajustements, soit le déficit budgétaire établi chaque année à 3% du PIB sera dépassé, mais avec des conséquences pour la capacité de prêt de l’état, car les intérêts du marché sont toujours très hauts pour les pays qui présentent des difficultés.


D’autre part, la marge pour les ajustements (réduire les dépenses) est très réduite. Le gouvernement ne se permet pas de réduire les salaires car il vient de les majorer. Alors, il ne reste plus qu'à réduire les investissements. Mais, l’année dernier, le niveau des investissements de l’état a été le plus bas des 15 dernières années, en contraste frappant avec la croissance économique de 6,9%, la plus élevée des dix dernières années. C'est seulement en sacrifiant les investissements, que le gouvernement a eu de quoi couvrir les augmentations salariales.


C’est là où l’histoire se complique. Car, vu que les dépenses de la consommation – qui ont assuré la forte croissance – sont censées baisser suite à la perte d’intensité des stimulis qui les ont créées (les augmentations salariales et les réductions des taxes), en plus de la hausse des intérêts, les investissements devraient assumer le rôle de moteur de l’économie. Et s’il n’y a pas d’investissements publics - l’état pourrait lancer un programme intensif de construction de l’infrastructure - alors la baisse de la croissance économique déterminée par la chute de la consommation sera encore plus accentuée. En réduisant la croissance économique, les revenus de l’état seront plus faibles. Par la suite, afin de préserver le niveau des dépenses sociales (salaires, pensions) et des investissements publics et pour maintenir le seuil de déficit à 3% du PIB, sur la base de l’engagement à l’égard de l’UE, le gouvernement sera obligé de majorer les taxes.


C’est précisément à cause de cette succession de faits que la croissance économique du premier trimestre, quoique bonne, mais en-dessous des attentes, a créé une certaine crainte parmi les économistes.


Mais, pas tout le monde est inquiet. Par exemple, Cristian Socol, professeur à l’Académie d’Etudes Economiques et proche du gouvernement, fait une remarque tranchante. En s’adressant aux « pessimistes au pouvoir » il soutient : lorsque l’économie enregistrait une forte croissance, vous vous lamentiez qu’elle est trop forte et « au-delà du potentiel », et maintenant qu’elle est plus tempérée et s’approche de son potentiel vous vous plaignez que l’économie est sur le déclin. Quelle est la logique ?

iulian-anghel-economiste
Publié le 22 mai 2018, mis à jour le 22 mai 2018

Flash infos