En Inde, 15 % des 1,4 milliard d’habitants se réclament de confession musulmane, représentant 204 millions d’Indiens, qui sont, d’une manière ou d’une autre, de plus en plus fréquemment stigmatisés à cause de leur religion. Une application appelée Bulli Bai, lancée le 1er Janvier 2022, semble n’être qu’une nouvelle preuve du contrôle que les groupes Hindous extrémistes veulent avoir sur les musulmans et particulièrement sur les femmes musulmanes.
Qu'est ce que l'application Bulli Bai ?
L’application Bulli Bai dont le nom renvoie à des termes péjoratifs envers les femmes, met en ligne de fausses mises aux enchères de femmes musulmanes indiennes.
Journalistes, activistes, Prix Nobel, artistes, politiques ou encore actrice Bollywood, une centaine de femmes indiennes ont trouvé leur photo détournée sur l’application sans leur consentement. Ces femmes faisaient partie de voix s’exprimant contre les tendances grandissantes des mouvements anti musulmans et hindous nationalistes et se sont retrouvées humiliées et sexuellement dégradées en ligne.
#India: RSF denounces women journalists being offered for sale on @github #Bullibai app. @IsmatAraa (@TheWire_in), @khanthefatima (@ThePrintIndia), @_sayema (#RadioMirchi), @HibaBeg (@thequint) and @ainulrhbr delivered their chilling testimonies.?https://t.co/cb9AJ2CuT4
— RSF (@RSF_inter) January 5, 2022
D’où ce mouvement d’humiliation des Indiennes musulmanes a commencé ?
C’est en mai 2021, que ce mouvement contre les femmes musulmanes débute en Inde. C’est d’abord un youtuber nommé Liberal Dodge qui met aux enchères des femmes Pakistanaises dans ses directs.
Par la suite, des groupes anonymes harcèlent d’autres femmes en ligne de la même manière.
En juillet 2021, un nouveau scandale éclate lorsque plusieurs photos de femmes musulmanes sont postées sur twitter avec la mention « Your deal of the day » (l'affaire du jour), via une application appelée Sulli Deal.
Au-delà des Sulli Deals, le journal Article 14 rapporte également avoir découvert plusieurs comptes issus de réseaux sociaux et créés par des nationalistes hindous publiant images et histoires pornographiques sur des femmes musulmanes tout en encourageant la violence sexuelle.
Quelles réactions en Inde face à ces comptes et applications qui visent à humilier ?
Après plusieurs plaintes contre les Sulli Deals et son objectivisation de femmes musulmanes, la plateforme hébergeant l’application (Github) l’a retirée. Au-delà de la réaction de la plateforme, certaines femmes regrettent que, malgré leurs plaintes enregistrées auprès de la police, peu voire pas d’actions ont été prises, dénonçant la lenteur d’un système qui a pu enhardir les créateurs de l’application Bulli Bai.
En 2022, et après les plaintes déposées contre Bulli Bai, les polices de Mumbai, de Delhi et de l'Uttarakhand ont lancé des investigations.
Le travail de la police s’est concentré sur les groupes influencés par l’idéologie hindoue d’extrême droite qui se dénomment les traditionnalistes.
#UPDATE | 'Bulli Bai' app case: The 21-year-old man arrested by Mumbai Police Cyber Cell has been identified as Vishal Kumar. Main accused in the case is a woman detained from Uttarakhand. Both of the accused know each other: Mumbai Police https://t.co/GcjJRj0xaF
— ANI (@ANI) January 4, 2022
Dans le cadre de Bulli Bai, quatre personnes ont été arrêtées : Vishal Kumar, Shweta Singh, Mayank Rawal et Niraj Bishnoi. Tous les quatre sont étudiants et ont entre 18 et 21 ans. Selon la police, le cerveau de l’opération est Schweta Singh qui, à 18 ans, a admis que ses actions étaient influencées par les groupes hindous extrémistes.
Peu de temps après, la police arrête également Aumkareshwar Thakur, créateur de l’application Sulli Deals.
Un enjeu plus global pour les Indiennes musulmanes ?
Certains témoignages de femmes mises aux enchères sur l’application Bulli Bai rapportent ne même pas être surprises, à cause de discriminations et harcèlements constants auxquels elles font déjà face au quotidien.
Au vu de l’augmentation des crimes de haine envers cette minorité en Inde, la peur d’un harcèlement, de violences voire d’un viol fait de plus en plus partie du quotidien des femmes musulmanes en Inde.