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STÉPHANE ATTALI : "Les Libanais ont l’entrepreneuriat dans le sang !"

Stéphane AttaliStéphane Attali
Stéphane ATTALI
Écrit par Juliette Vincent
Publié le 3 juillet 2019

Créée à la suite d’un accord intergouvernemental entre la France et le Liban, l’École Supérieure des Affaires (ESA) de Beyrouth va bientôt souffler ses 22 bougies. Plus qu’une “Business School”, l’ESA constitue un pôle régional de formation. Son nouvel incubateur/accélérateur de startups, Smart ESA, en fait également le nouveau centre de l’entrepreneuriat au Liban. Nous avons rencontré Stéphane Attali, le directeur général de l’ESA depuis 2009.

 

L’ESA fêtera ses 22 ans l’année prochaine. Pourriez-vous retracer l’histoire de cette école ?
L’école a été fondée en 1996 dans le cadre d’un accord de coopération intergouvernementale entre la France et le Liban. Elle naît dans un contexte particulier de croissance économique et d’espoir, suscité par la fin de la guerre civile.

Pendant la guerre, il était de tradition, pour les étudiants libanais, de continuer leurs études à l’étranger. Pour l’ambassadeur de France de l’époque, Jean Pierre Lafon, ce phénomène représentait une énorme perte pour le pays. De ce constat naquit l’idée de créer localement une grande école de commerce et de management pour permettre aux élèves de poursuivre leurs études au Liban, tout en bénéficiant de l’expertise et de la qualité des institutions académiques européennes.

 

Il y a donc un lien très fort entre l’ESA et la France ?
Dès l’origine, il y a une volonté de création commune entre la France et le Liban. Très vite, la gestion et le développement de l’ESA ont été confiés à la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de la Région Paris Île-de-France. L’idée était de faire venir les professeurs européens à Beyrouth pour des missions pédagogiques. La France est donc présente dès l’origine dans l’ADN de l’ESA. Les bâtiments et le terrain dans lequel l’ESA est installée appartiennent d’ailleurs à la France et hébergeaient le campus diplomatique français, de 1946 jusqu’à la guerre civile.

 

Comment êtes-vous devenu le Directeur Général de l’ESA ?
C’est la CCI Paris Île-de-France qui m’a proposé, en 2009, de prendre la direction de l’école. Avant cette nomination, je travaillais à la CCI en tant que responsable de projet à l’international. J’avais déjà tissé des liens étroits avec l’ESA puisque j’y ai travaillé de 2002 à 2007.

 

Quels sont les programmes proposés par l’école ?
L’ESA propose une palette de huit formations diplômantes, du niveau post-bac (Bachelor) au niveau Bac +8 (Doctorat). Toutes les formations ont en commun le management et la formation au leadership.

Le Master in Business Administration (MBA) a été le premier développé à l’ESA, en 1996, et continue d’attirer de nombreux candidats chaque année. Notre MBA demeure par ailleurs le seul au Liban et un des deux seuls au Moyen-Orient à avoir reçu la prestigieuse accréditation internationale AMBA (Association of MBAs).

Chaque programme est développé en partenariat avec une institution académique française ou européenne. Par exemple, notre Executive MBA est développé en partenariat avec ESCP Europe. Les diplômés suivent donc une partie de la formation sur le campus Paris de ESCP Europe et reçoivent un double diplôme à l’issu de leur formation. La qualité et le renom de nos partenaires académiques sont très appréciés par nos étudiants. A la rentrée 2018, nous pourrons leur proposer le prestigieux Master Entrepreneurs, en partenariat avec HEC Paris.

L’autre volet de formation proposé à l’ESA est l’Executive Education, ou la formation continue destinée aux entreprises du Liban et de la région. Nous pensons à l’ESA que, dans un monde en constante évolution, il est indispensable de pouvoir acquérir de nouveaux outils de compréhension, et ce tout au long de la vie.

Pour répondre à ce besoin, nous proposons des formations courtes sur-mesure et une palette de de certificats qui répondent aux demandes spécifiques des professionnels et aux besoins du marché local et régional. A ce titre, nous avons dernièrement lancé le certificat « Women in Leadership », qui s’adresse aux femmes désirant se reconvertir, évoluer dans leur carrière ou retourner dans le monde de l’entreprise après s’être consacrées à leur famille. 

 

Quels sont les critères pour être admis dans vos programmes de formation ? Quel est le profil de vos étudiants ?
Chaque programme est très sélectif. Il y a un examen de dossier, puis un entretien, lors duquel le jury évalue la motivation, l’expérience et la personnalité du candidat.

Les origines de nos étudiants sont assez variées, mais nous avons en majorité des Libanais et des binationaux franco-libanais. Nous avons également des Syriens, des Jordaniens…

L’ESA a pour ambition de contribuer à refaire de Beyrouth et du Liban un pôle régional de formation. Par ailleurs, plus de 50 % des étudiants de notre MBA sont libanais et résident à l’étranger, majoritairement dans les pays du Golfe et en Afrique.

 

Et pour les heureux diplômés, quels sont les débouchés ?
Dans leur grande majorité, ils sont embauchés rapidement après l’obtention de leur diplôme. Parfois, certains décident de quitter le pays.

L’ESA a créé il y a plusieurs années un dispositif d’aide à la recherche d’emplois à l’attention des étudiants et diplômés. Nous travaillons activement avec les entreprises libanaises à la recherche de nouveaux profils et de jeunes cadres. Par exemple, nous collaborons avec le groupe CMA CGM, leader mondial du transport maritime, qui est très friand de diplômés libanais.

L’ESA s’engage à accompagner et à orienter ses étudiants et anciens étudiants, quel que soit leur âge et leur parcours. Nous venons par ailleurs d’inaugurer notre nouveau restaurant d’entreprise, que nous avons appelé La Boussole, en référence au rôle de conseiller d’orientation que nous jouons et que nous prenons très au sérieux.

 

Quel est le « plus » de l’ESA ?
La force de l’ESA, c’est son lien avec le tissu économique local et régional. L’école entretient depuis longtemps des relations avec un grand nombre d’entreprises et se définit de plus en plus comme une plateforme de rencontre entre hommes d’affaires français et libanais.

Ces liens se sont renforcés grâce au travail du Mouvement des Entreprises et Représentations Économiques Françaises au Liban (MEREF). Il s’agit d’un club d’affaires réunissant les dirigeants économiques français et libanais qui ont pour objectif commun de développer les relations économiques entre la France et le Liban. Le MEREF est devenu membre du réseau des Chambres de Commerce et d’Industrie à l’Etranger (CCI France-Liban), et sa présidence est assurée par l’ESA.

 

Smart ESA, votre incubateur/accélérateur de stratups, est un de vos plus grands projets. Quelle est sa vocation ?
Depuis longtemps à l’ESA, nous faisons travailler nos étudiants sur des problématiques liées à l’entrepreneuriat.
L’idée de créer un incubateur/accélérateur d’entreprise est née avec la mise en place par la Banque du Liban de la circulaire 331, un mécanisme de financement dont la vocation était d’inciter les banques à investir dans les start ups et incubateurs/accélérateurs d’entreprise. Nous avons saisi cette opportunité pour créer Smart ESA, relais de l’expertise française en entrepreneuriat, et dont les programmes d’accompagnement aux start ups ont commencé au printemps dernier. Smart ESA a déjà permis d’accompagner 25 start ups prometteuses, et offrira bientôt à ses jeunes entrepreneurs un centre de 3000 m2, entièrement rénové, en lieu et place des locaux de l’ancien consulat de France, au cœur du campus de l’ESA.   

 

Avez-vous d’autres idées et projets pour votre école ?
L’Institut Charles de Gaulle du Liban fait partie de nos autres grands projets, en partenariat avec l’ambassade de France au Liban, la Fondation Charles de Gaulle et la Fondation pour la Sauvegarde du Patrimoine de Charles de gaulle au Liban (FPSCGL)

Au-delà du militaire et du personnage politique, Charles de Gaulle était un homme visionnaire qui savait faire preuve à la fois de charisme, d’éloquence et d’autorité. Ce sont ces qualités que l’ESA a souhaité valoriser à travers son exemple. Nous voulons faire de l’Institut un véritable laboratoire de formation en leadership basé sur le modèle gaullien, à l’attention des étudiants et des professionnels du Liban et de la région.

Une autre facette du personnage que nous avons souhaité mettre en valeur, dans un espace mémoriel, est la relation si particulière qu’il a entretenue avec les Libanais. Charles de Gaulle a même arpenté le campus de l’ESA a plusieurs reprises !  Toutefois, loin de nous figer dans le passé, nous souhaitons faire appel à des outils 100% numériques. L’hologramme fait partie des techniques qui seront déployées à l’Institut :  vous pourrez bientôt vous retrouver nez à nez avec Charles de Gaulle, comme s’il était en face de vous.

 

Publié le 29 septembre 2017

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