

Le chanteur de Noir Désir est libre. Sept ans et deux jours après avoir porté les coups fatals à Marie Trintignant, Bertrand Cantat, en liberté conditionnelle depuis 2007, peut reprendre une vie normale. Si possible
Depuis le jeudi 29 juillet 2010, Bertrand Cantat (AFP) est libre de tout engagement envers la justice. Ses fans l'imaginent reprendre la tête du groupe, sortir un nouvel album, et pourquoi pas remonter sur scène. Car Noir Désir, c'est avant tout le groupe rock cultissime des jeunes et des moins jeunes, qui prend racine à Bordeaux et qui enregistre son premier véritable album en 1989, Veuillez rendre l'âme (à qui elle appartient). Toujours mystérieuses, jamais sombres, les paroles écrites par Bertrand Cantat reflètent bien une personnalité énigmatique, mais pas encore tourmentée. Depuis 2004, le Bordelais ressemble davantage à un homme brisé, qui a bien tenté de se reconstruire, mais que l'adversité poursuit.
Le vent l'emportera
Condamné par la justice lituanienne à huit ans de prison le 24 mars 2004, pour ''meurtre commis en cas d'intention indirecte indéterminée'', perpétré à l'encontre de Marie Trintignant, Bertrand Cantat passe trois ans au centre de détention de Muret, près de Toulouse. Sa demande de liberté conditionnelle est acceptée en octobre 2007 pour bonne conduite, il sort donc de prison mais doit respecter certaines exigences : ne pas sortir du territoire français, accepter un suivi psychologique, et surtout, ne pas évoquer les circonstances de la mort de Marie Trintignant en public. Il met fin à son aventure de dix-huit mois avec l'actrice le 27 juillet 2003, à Vilnius, en Lituanie, où il l'a rejointe sur le tournage d'un téléfilm. Après une soirée arrosée à la vodka, une dispute éclate entre les deux amants, et Bertrand Cantat assénera au moins quatre coups au visage de Marie Trintignant, provoquant une hémorragie cérébrale à laquelle elle succombera, trois jours plus tard en France. Le chanteur de Noir Désir avait plaidé coupable lors de son jugement. ''J'aimais Marie de tout mon être, je l'aime et je l'aimerai toujours. Je pense chaque seconde à la famille de Marie, à ses enfants, parce que je les aime. Je sais dans quel désespoir je les ai plongés'', avait-il murmuré avant le verdict.
Les écorchés
Avant Marie, Bertrand Cantat partageait la vie de Kristina Rady, cette littéraire polyglotte hongroise, qu'il rencontra en 1993 et avec qui il eut deux enfants, Milo en 1997 et Alice en 2002. Même s'il la quitte pour une autre, la laissant assumer deux enfants, Kristina ne l'a jamais laissé tomber. Elle a joué l'avocat du diable au procès du drame de Vilnius, lorsque Bertrand Cantat devait faire face à la haine de toute une famille détruite. Elle prend la défense de son ex-mari, pour le ''soutenir, sans juger, sans prendre part''. ''Je n'ai jamais subi de violence de la part de Bertrand. Au contraire, dans ses rapports privés comme publics, il privilégiait la discussion, le fait de comprendre certaines choses dans la vie d'un couple'', avait-elle notamment déclaré à l'époque lors d'une conférence de presse dans le studio d'enregistrement du groupe à Bègles, dans la banlieue bordelaise. Lorsque leur maison dans les Landes se trouve ravagée par un incendie criminel, Kristina Rady la reconstruit. A sa sortie de prison, Bertrand Cantat revient auprès d'elle, et tous deux tentent de reformer une famille. Mais traquée, menacée, Kristina abandonne tout un dimanche de janvier 2010, et se pend dans leur maison. ''Le contexte était pesant. C'était trop de pression. Kristina [nous racontait] ses angoisses, les coups de fil anonymes sans cesse à la maison, les menaces de mort qu'elle et Bertrand recevaient'', ont expliqué ses parents.
Une vie après la mort ?
Double peine pour le chanteur, qui se serait, selon ses proches, enfermé dans la musique. Depuis 2008, Noir Désir n'a proposé que deux titres en téléchargement sur leur site, Gagnants/Perdants, et une reprise du Temps des Cerises. Militant révolté, à la réputation de rockeur rebelle, difficile d'imaginer que Bertrand Cantat n'ait toutefois pas la plume qui le démange. Le groupe ne s'est jamais officiellement dissous, et se retrouve d'ailleurs fréquemment en studio. Mais aucune certitude quant à la poursuite d'un projet commun, d'autant plus que le batteur et le bassiste de la formation bordelaise sont actuellement en concert avec le groupe Les Hyènes, alors que le guitariste engage sa carrière solo. Seule une apparition sur un disque hommage à Alain Bashung est connue pour le moment.
Lauriane Rialhe (www.lepetitjournal.com) vendredi 30 juillet 2010


































