

Nicolas Sarkozy à la une du Taz le 7 mai 2007
Indépendance et salaire unique
A la fin des années 1970, l'Allemagne de l'Ouest est secouée par la violence de la Rote Armee Fraktion. A l'automne 1977, les attentats s´intensifient. L'Etat allemand, qui peine à stopper le mouvement malgré l'arrestation de ses cadres, craint la contagion. De nouvelles lois sont alors décrétées qui élargissent les pouvoirs de la police et réduisent la liberté de la presse. Mais ces mesures sont mal vécues par une partie de la population allemande. La Sponti-Szene, en particulier, qui rassemble les successeurs des étudiants révoltés de 1968, proteste contre ces atteintes à la liberté civile. En réaction à cette situation, elle décide de créer un "journal indépendant". Pour l´élaboration de la maquette, les initiateurs du projet prennent conseil auprès des "grands frères"français de "Libération", fondé en 1973. Pour des raisons financières, le siège est fixé à Berlin : les subventions de la ville y sont plus élevées qu´ailleurs. La première édition sort le 17 avril 1979 et sera vendue à 20.000 exemplaires.
Dans les années 1980, la rédaction du TAZ fonctionne comme une communauté. Le salaire est unique et ne dépasse pas les 800 DM (400 euros). Les décisions se prennent de manière collégiale et lors de débats parfois longs et houleux. A deux reprises, les femmes de la rédaction feront grève en réaction à des articles pornographiques jugés sexistes parus dans le journal.
Courses contre la faillite
En 1991, la ville de Berlin est face au défi coûteux de la réunification et le TAZ se voit retirer les aides qui assuraient jusque-là son existence. Une course contre la faillite s'engage alors. Plusieurs fois au pied du mur, le journal décide de lancer des campagnes "choc"pour récolter les abonnements nécessaires à sa subsistance. Une semaine durant, la rédaction menace ses électeurs de faire paraître une édition tabloïd, dénuée de critiques, si le nombre d'abonnements nécessaire n'est pas atteint.
Finalement, le journal est restructuré. Le salaire unique est abrogé et la rédaction est divisée en départements. Afin d´assurer un capital propre au quotidien sans avoir recours à un investisseur, on décide de créer une coopérative. Aujourd'hui, le TAZ clame le succès de ce modèle. Le principe : chacun peut devenir membre en apportant une participation fixée entre 500 et 25.000 euros. Un acte politique, un investissement dans la liberté de la presse, selon le quotidien. Les membres de la coopérative désignent en assemblée générale le directoire du journal.

Nouvelle jeunesse ?
Du 17 au 18 avril dernier, le TAZ a fêté son anniversaire en grande pompe lors d'un congrès berlinois "Liberté et Utopie". Plus de 80 manifestations et des têtes d'affiche comme Daniel Cohn-Bendit, Tariq Ramadan et Klaus Wowereit ont assuré le succès de cette petite sauterie entre amis. Klimax de l´événement : la sortie d'une édition relookée et d'un supplément pour le week-end intitulé "Sonntaz". Une folie des grandeurs moquée par le reste de la presse allemande. Pari réussi : trente ans après, le TAZ sait toujours créer la polémique.
Marina Touilliez (www.lepetitjournal.com/berlin.html) jeudi 14 mai 2009
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