Sandrine Gelin-Lamrani est une expatriée au long cours. "J'ai vécu pendant des années dans une valise!", s'exclame-t-elle en riant. Consultante puis chef d'entreprise, cette "serial entrepreneuse internationale" accompagne ses clients dans leurs problématiques, en les aidant à prendre du recul et trouver en eux les réponses par rapport à des situations complexes.
La passion pour l'international et l'interculturalité font presque partie de son ADN. Sandrine Gelin-Lamrani attrape d'ailleurs très jeune le virus du voyage. À 15 ans elle convainc ses parents de partir seule faire ses deux premières années de lycée successivement au lycée français de Munich puis de Londres. Après de brillantes études à l'IEP de Strasbourg, puis à l'ESSEC, Sandrine choisit le secteur du conseil où le travail s'effectue sous forme de projets et, bien sûr, "parce qu'il fallait beaucoup voyager".
Un premier métier de consultant
Elle qui avait au départ un profil plutôt littéraire va se spécialiser dans des missions de conseil d’optimisation du besoin en fond de roulement (Working Capital) pour de grandes multinationales en Europe et aux États-Unis. "Pendant cinq ans, j'ai vécu dans une valise! – se souvient Sandrine Gelin-Lamrani, fondatrice et directrice de G&L Shift. En fait, en France j’étais considérée comme une non-résidente puisque je passais plus de la moitié de mon temps à l'étranger. C'est exténuant, mais le métier de consultant te permet d'apprendre énormément".
Je suis surprise de constater qu'encore aujourd'hui, et malgré la profusion d'informations disponibles, les gens ne se préparent pas suffisamment à leur expatriation
Une passion: la transmission de connaissances
Forte de cette expérience, et avec l'envie de poser un peu ses valises, Sandrine s’associe et co-dirige une entreprise de formation professionnelle. Elle n'a à l'époque que 29 ans. "Je me suis lancée dans l’aventure entrepreneuriale, parce que c’était un projet exaltant et intéressant. Intéressant parce qu'il s'agissait de formation professionnelle continue et, ça, c’était la partie que je préférais dans mon métier de consultante: la communication, le contact avec les gens, la transmission de connaissances ; Ensuite, je trouvais cela exaltant de devenir le capitaine de ma propre barque. Ça ne m’avait jamais trop plu d'avoir un chef, d’autant que j’ai expérimenté le meilleur … comme le pire!"
Un consultant donne les solutions. Le coach, lui, amène son interlocuteur à se rendre compte qu'il possède la solution ou des éléments de solution
Une chef d'entreprise aux multiples casquettes
Pendant onze ans, Sandrine va co-développer son cabinet, spécialisé dans la formation sur-mesure, et dans de nombreux domaines d'actions, tels que le management d’équipe, la communication interpersonnelle, la gestion du temps, du stress et des conflits, l’organisation et la structuration du travail ou la prise de parole en public. "Cela m’a permis de développer énormément de contenus de formation - explique Sandrine Gelin-Lamrani- et j’ai ainsi délivré des formations à des centaines de personnes (formateurs inclus) dans une grande variété de secteurs, de la PME aux grands groupes. Et bien sûr, en tant qu'entrepreneure, je portais toutes les casquettes et tous les métiers de l’entreprise". Encore une particularité qui lui est désormais fort utile pour ses coachings.
On ne parle pas assez de la solitude de l’entrepreneur
Publication de livres didactiques
Les journées n'ont que 24 heures, mais Sandrine Gelin-Lamrani, qui doit certainement suivre ses propres conseils en gestion du temps, arrive en parallèle à publier des livres! "J'avais commencé à écrire quand j’étais étudiante -se rappelle-t-elle. A l'époque, il s'agissait de livres destinés à des étudiants qui passaient des concours, alors c’était des QCM, de la culture générale, etc. Plus tard, j’ai publié des ouvrages traitant d’efficacité professionnelle – conduite de réunion, entretiens professionnels, prise de parole en public".
Être officiellement certifiée coach par l'ICF est un gage de professionnalisme, compte tenu, en plus, de la quantité de coaches qui pullulent sur le marché
Pendant ces années plus "tranquilles" à Paris, Sandrine s'était mariée avec son compagnon connu sur les bancs d'école de l'ESSEC et avait eu une fille. Le temps était venu de repartir! "Notre projet familial était de quitter la France et de partir au Maroc, mon mari étant marocain. En plus, notre fille avait alors 6 ans, c'était le bon moment".
Se fixer des objectifs de vie tous les dix ans
Coach avant l'heure, Sandrine Gelin-Lamrani avait bien tout calculé, avec un projet de vie mûrement médité. "Tous les 10 ans, avec mon mari, on se fixe des objectifs de vie -signale Sandrine Gelin-Lamrani-. Nous en sommes au troisième cycle. Ça a commencé quand on était étudiant à l’ESSEC. Concrètement, ça veut dire qu’on pose chacun nos objectifs pour les 10 ans à venir. Ça prend du temps car il faut une certaine introspection, penser vraiment à tout ce que l’on veut, les moyens qu’on a pour y arriver et, une fois qu’on est prêt, on regarde les objectifs de l’autre et c’est intéressant de comparer, de voir les différences. Cela permet aussi d'engager un dialogue génératif de nouveaux possibles."
Le coaching, une évidence
Son mari, qui travaille dans une grande multinationale, obtient sa mutation à Casablanca et ils y restent pratiquement six ans. Après avoir créé et mis en place tous les programmes de formation "executive" de l’Emlyon Business School Africa, Sandrine est rattrapée par sa soif de nouveauté et de création, loin du pilotage opérationnel de programmes de formation dorénavant sur les rails. C’est à ce moment-là qu’elle décide de créer sa propre entreprise de coaching professionnel. Une sage décision puisque son mari sera ensuite muté en Turquie, puis à Barcelone.
Tous les 10 ans, avec mon mari, on se fixe des objectifs de vie. Une fois qu’on est prêt, on regarde les objectifs de l’autre et c’est intéressant de comparer, de voir les différences
Mais pourquoi coach? "C’était vraiment complémentaire – affirme Sandrine -, une troisième corde naturelle à mon arc! J’avais déjà travaillé avec de nombreux formateurs qui étaient eux-mêmes souvent coaches. J’avais donc déjà été en contact avec cette profession, encore plus centrée sur l’humain. Alors, comme j’avais fait le tour de l’univers de la formation, le moment était bien choisi".
Officiellement certifiée coach par l'ICF
Mais pour bien faire les choses, Sandrine Gelin-Lamrani décide de se former au coaching dans une école prestigieuse de Genève. Elle est d'ailleurs officiellement certifiée au métier de Coach. Elle poursuit aussi son parcours de coach professionnelle internationale en intégrant l’ICF – International Coaching Federation - et en recevant une première accréditation de niveau mondial. Compte tenu de la quantité de coaches qui pullulent sur le marché, c'est un "détail " important. "L'ICF, l’International Coaching Fédération, -explique Sandrine- existe depuis 25 ans et c'est une référence mondiale du métier de coach. L'ICF accrédite les coaches avec trois niveaux et j'ai obtenu le premier niveau, le plus important. Je suis actuellement en cours de préparation du second niveau. C’est un gage de professionnalisme. Ce n’est pas suffisant en soi, mais c’est nécessaire".
Il y a des situations fortes de heurts liés à la méconnaissance de l’expatrié et parfois à son manque de curiosité, qui peut même se transformer en jugement
Cela lui permet d'accompagner ses clients -équipes, managers, dirigeants ou chefs d'entreprises- dans leurs différentes problématiques. Sandrine fait beaucoup de coaching de carrière, c’est-à-dire l'accompagnement des personnes dans leur évolution ou repositionnement professionnels. Elle accompagne aussi les entrepreneurs, qu'il s'agisse d'un chef d'entreprise ou d'un PDG, un sujet qu'elle connait bien! "On ne parle pas assez de la solitude de l’entrepreneur -souligne Sandrine Gelin-Lamrani-. Celui-ci n’a pas forcément le réflexe de s’entourer, or c’est capital qu'il soit accompagné d’experts mais aussi de personnes à qui il puisse parler de manière neutre. Il s’établit une relation de confiance et d’alliance, sur un pied d’égalité. Il s’agit de lui montrer le chemin à faire, en optimisant son potentiel et ce qui a le plus de sens pour lui".
Un coach n'est pas un consultant!
Il ne faut en effet pas confondre les métiers de coach et consultant. Sandrine Gelin-Lamrani le résume parfaitement: "Un consultant donne les solutions. Le coach, lui, ne les donne pas; il amène son interlocuteur à se rendre compte qu'il possède la solution ou des éléments de solution, en posant des questions et en le guidant à travers sa réflexion. C’est un chemin d’exploration".
Sandrine, cette Socrate des temps modernes, utilise donc l’art de la maïeutique, comme le faisait le philosophe grec avec ses disciples, en leur faisant découvrir les vérités qu’ils avaient en eux-mêmes par le biais de questionnements. C’est le cœur essentiel de son métier de coach.
Accompagner les expatriés
Sandrine accompagne également les expatriés dans un contexte international et multiculturel, ce qui l'a précisément guidé toute sa vie. "J’ai travaillé dans huit pays et ça m’a permis d'apprendre à me servir des différences culturelles pour en faire une force. Il existe des périodes très difficiles dans le processus d’expatriation et l’un des plus gros problèmes pour les expatriés, c’est l’adaptation interculturelle. Il y a des situations fortes de heurts liés à la méconnaissance de l’expatrié et parfois à son manque de curiosité, qui peut même se transformer en jugement. Ce choc culturel peut évoluer parfois en dépression et ce, d'autant plus aisément si l’expatrié est isolé". Après avoir coaché des Français, des Marocains, des Américains, des Espagnols, des Belges, des Turcs, Sandrine est surprise de constater qu'encore aujourd'hui, et malgré la profusion d'informations disponibles, les gens ne se préparent pas suffisamment à leur expatriation.
Ça ne m’avait jamais trop plu d'avoir un chef, d’autant que j’ai expérimenté le meilleur … comme le pire!
Après Istanbul, son mari est muté à Barcelone. "Nous sommes arrivés en septembre dernier et nous avons découvert une ville formidable et profondément internationale. Mais ce qui est fantastique, c’est de voir la différence entre vivre à l'intérieur ou à l’extérieur de l’Union européenne. Pour moi qui suis Française, je peux ici mesurer toute la portée de ma citoyenneté européenne en y retrouvant des codes qui me sont familiers – la monnaie, la langue, l’espace et les règles communes. Cette expérience 'inclusive' est une belle étape sur mon chemin de vie globale".
La flexibilité du coaching 3.0
Quant à son entreprise G&L Shift, changer de pays n'a supposé aucun problème. "J'ai simplement emporté mon entreprise sur mon dos, un peu comme une tortue! À Istanbul, j'avais digitalisé ma pratique de coaching, parce que j’avais des clients dans d’autres pays et donc c'est comme ça que j’ai commencé à faire du coaching on line, en présentiel et en hybride".
Le métier de consultant est exténuant, mais il permet d'apprendre énormément
Ce "coaching 3.0" représente pour Sandrine Gelin-Lamrani le prolongement naturel de la pratique du coaching. "Ce qu’il faut bien penser, c'est que le coaching est né aux États-Unis dans les années 60 et s’est notamment développé ces vingt dernières années ailleurs dans le monde. Mais les États-Unis, c’est un pays très étendu, sur de multiples fuseaux horaires. C'est la raison pour laquelle les Américains ont très vite fait du coaching 2.0, mais à l'époque c’était par téléphone et par mail, et avec l’avènement d’Internet et des technologies de l’information, on arrive au coaching 3.0, avec des plates-formes technologiques qui permettent de créer des espaces particuliers pour la personne coachée, avec des articles, des vidéos, des modules d’e-learning, des tests, etc. On peut ainsi faire des séances de coaching à distance, c’est donc beaucoup plus flexible". Le pouvoir de la technologie au service exclusif de la personne.