La Thaïlande est devenue le premier pays asiatique à éliminer la transmission du sida (VIH) et de la syphilis de la mère à l'enfant, et le deuxième au monde après Cuba, a annoncé mercredi l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
L’élimination en Thaïlande de la transmission du sida (VIH) de la mère à l'enfant est une "réussite remarquable dans un pays où des milliers de personnes vivent avec le VIH", a déclaré mercredi Poonam Khetrapal Singh, responsable de l'Asie du Sud-Est à l'OMS, soulignant que "la Thaïlande était le premier (pays) à forte contagion au VIH à s’assurer une génération non infectée".
L’annonce est un encouragement pour toute une génération de professionnels médicaux qui ont transformé l’un des pays d’Asie les plus touchés par le Sida en un exemple dans la lutte contre ce fléau.
La Thaïlande joue d'ailleurs un rôle de premier plan dans ce combat, illustré notamment par le travail de recherche mené par l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD) de Thaïlande depuis 1999 (lire aussi notre article L’IRD Thaïlande, fer de lance du combat contre la transmission mère-enfant du VIH).
Avant mercredi, Cuba était le seul pays au monde à avoir éliminé en 2015 la transmission du virus de la mère à l’enfant selon les critères onusiens.
De l'exemple du pire au symbole de l’espoir
Il s’agit d’un nouvel accomplissement pour la Thaïlande après une remarquable campagne anti-sida au milieu des années 90 menée par fameux Mechai Viravaidya (connu depuis sous le nom Mister condom) alors ministre du tourisme et des Sports et qui a notamment fondé depuis les hôtels restaurants "Cabbage and Condoms" (lire notre article Quand Mr Condom développe l’esprit critique dans les campagnes).
Le royaume, qui comptait 100.000 personnes infectées en 1990 et avait vu le chiffre décupler en trois ans, avait ainsi pu grâce à cette campagne et d’autres mesures qui s’en sont suivies, faire baisser de manière drastique le nombre de nouvelles infections.
L'ONU estime aujourd’hui qu'environ 500.000 personnes vivent avec le virus en Thaïlande pour une population totale de 68 millions d'habitants.
En 25 ans, le royaume a donc réalisé des progrès considérables, même si une augmentation du taux d’infections a été observée ces dernières années notamment au sein de la population gay.
"La Thaïlande a montré au monde que le VIH peut être vaincu", a ajouté Poonam Khetrapal Singh dans le communiqué, alors que tous les ans, en Asie-Pacifique, 21.000 nouveau-nés viennent au monde porteurs du VIH et plus de 200.000 enfants grandissent avec.
En 2000, la Thaïlande est devenue l'un des premiers pays au monde à fournir gratuitement des traitements à toutes les femmes enceintes séropositives, ce qui permet de réduire considérablement les chances de transmission.
Le dépistage pendant la grossesse y est également pratiqué de façon automatique, même dans les régions éloignées du pays, a ajouté l'OMS.
Selon les chiffres du gouvernement thaïlandais, le nombre de bébés nés avec le VIH est passé de 1.000 en l'an 2000 à seulement 85 l'an dernier, un niveau suffisamment bas pour que l’OMS déclare la transmission de la mère à l’enfant éradiquée.
"Les progrès de la Thaïlande montrent tout ce que l'on peut réaliser quand la science et la médecine sont soutenues par une action politique", a estimé Michel Sidibé, le directeur exécutif de l'Onusida.
Selon l'OMS, environ 1,4 million de femmes infectées par le VIH tombent enceintes chaque année dans le monde, pour la plupart dans les pays en développement et notamment en Afrique subsaharienne.
Le nombre d’enfants nés chaque année avec le VIH était de 400.000 en 2009. En 2013, le nombre était descendu à 240.000.
Sans traitement avec des antirétroviraux, elles ont de 15 à 45% de risques de transmettre le VIH à leur enfant pendant la grossesse, l'accouchement ou en donnant le sein.
Ce risque est quasiment éliminé et tombe à un peu plus de 1% si la mère prend des antirétroviraux pendant la grossesse, ainsi que l'enfant juste après sa naissance.
Le ministre thaïlandais de la Santé, Piyasakol Sakolsatayadorn, a déclaré que la nouvelle "appartient à tous" mais a ajouté: "un défi persiste est de faire en sorte de pérenniser ce succès".
Avec AFP mercredi 8 juin 2016