Des lycéens thaïlandais ont défilé dans Bangkok vendredi à bord d’un camion décoré et équipé d’une sono pour exiger des reformes ainsi que la démission du ministre de l'Education Nataphol Teepsuwan.
"Sortez, sortez, sortez!" ont scandé les jeunes militants du mouvement "Bad Student" (mauvais élèves) depuis une bétaillère aménagée qui venait de s’arrêter devant les marches du ministère thaïlandais de l'Éducation.
Les manifestants lycéens, qui font partie du mouvement protestataire étudiant appelant à faire de la Thaïlande une vraie démocratie, ont également jeté en l’air des milliers d'exemplaires d'une fausse lettre de démission du ministre.
"C'est un homme sans aucune qualification", a lancé Laponpat Wangpaisit, un activiste du groupe.
Le ministre n'était pas à Bangkok, mais des hauts fonctionnaires ont rencontré les étudiants.
"Nous avons reçu la pétition des étudiants et allons l’examiner", a déclaré le secrétaire permanent à l'éducation, Supatra Champathong. La lettre de démission, qui comporte un espace laissé pour la signature de Nataphol Teepsuwan, sera transmise au ministre, a-t-il ajouté.
Avant d’arriver au ministère, le groupe de manifestants avait fait le tour de plusieurs établissements scolaires de la capitale, sous les acclamations de nombreux élèves qui soutiennent les demandes de réformes du système éducatif et ses règles qu’ils jugent archaïques et néfastes au développement de l’intelligence.
Derrière les portes de leur école, les élèves ont applaudi les manifestants et chanté des chansons moquant le règlement, sans manquer de faire salut à trois doigts, symbole de ce mouvement pro-démocratie inédit depuis plusieurs décennies. Dans l’un des établissements, les jeunes ont apposé une pancarte sur le portail disant: "Les enseignants de cette école persécutent les élèves".
Les "Bad students" dénoncent le fait que le système scolaire thaïlandais classique vise davantage à fabriquer des citoyens dociles qu’à offrir un vrai enseignement digne de ce nom.
Les incidents impliquant des violences ou des humiliations sur des écoliers en Thaïlande alimentent régulièrement la rubrique des faits divers des journaux locaux et sont de plus en plus repris sur les réseaux sociaux, reflétant une défiance croissante vis-à-vis de l’école classique thaïlandaise.
L’un des derniers faits en date est une affaire de maltraitance dans un jardin d’enfant, révélée vidéo à l’appui montrant des responsables s’acharnant sur des tous petits. Les multiples abus pris par les caméras de surveillance de l’école Sarasas de Nonthaburi -l’un des 49 établissements du groupe qui compte 90.000 élèves- ont provoqué l'indignation dans tout le royaume et suscité des appels à prendre des mesures contre les écoles.
Début septembre, un collégien a perdu la vie après avoir été forcé par un enseignant à faire 100 flexions pour n’avoir pas rendu un devoir à temps.
Les manifestations étudiantes démarrées dans les campus du royaume en février ont repris dans la rue en juillet, après l’interruption en raison de la crise du Covid-19, prenant de plus en plus d’ampleur au fur et à mesure des rassemblements. Les protestataires demandent dans leur majorité la démission du Premier ministre, la dissolution du Parlement et une nouvelle Constitution. Mais certains militants ont également ajouté des demandes de réformes concernant la puissante monarchie, brisant un tabou vieux de plusieurs décennies.
Une grande manifestation est prévue le 14 octobre, jour anniversaire du soulèvement étudiant de 1973 qui avait débouché sur la démission du dictateur Thanom Kittikachorn.