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Un vieux bus bidouillé sous un joli vernis derrière le drame de Pathum Thani

Les premiers résultats de l’enquête sur l’incendie meurtrier dans un bus transportant des écoliers en Thaïlande révèlent que le véhicule avait subi des modifications pouvant être à l’origine du drame

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Les premiers résultats de l’enquête révèlent plusieurs négligences en termes de sécurité. Copie d'écran
Écrit par La rédaction de Bangkok
Publié le 3 octobre 2024, mis à jour le 3 octobre 2024

Un vieux bus relifté dont la structure et le moyen de propulsion ont été modifiés sans contrôle adéquat : voilà ce qui semble être à l’origine de l’horrible drame qui a coûté la vie, mardi, à 20 écoliers et trois de leurs instituteurs lors d’une sortie scolaire, lorsque le véhicule qui les transportait a subitement pris feu sur la route à hauteur de Pathum Thani, près de Bangkok.

Le bus transportait 39 élèves d'écoles primaires et secondaires et six enseignants de l’école Wat Khao Phraya Sangharam, située dans la province d'Uthai Thani, pour un voyage scolaire à environ 260 km dans les provinces d'Ayutthaya et de Nonthaburi.

Alors que le bus roulait sur une voie express, un incendie s'est déclaré et s'est propagé très rapidement dans l’habitacle piégeant la plupart des occupants. 

Vieux bus modifié

Les premières conclusions de l’enquête, toujours en cours, ont révélé que le bus cachait derrière une apparence rajeunie et trompeuse un certain nombre de transformations structurelles dont une partie effectuée sans le contrôle ni l’approbation des autorités compétentes.

Le véhicule, de marque Isuzu et appartenant à une compagnie privée de la province de Sing Buri, était selon le registre officiel immatriculé depuis 1970. Mais son apparence extérieure avant le drame était celle d’un bus moderne flanqué de l’insigne Mercedes-Benz et du nom du constructeur allemand écrit en grandes lettres.

Selon la télévision thaïlandaise, le moteur diesel d’origine aurait été remplacé par un moteur Mercedes fonctionnant au gaz naturel comprimé (GNC). Le journal The Nation rapporte également que le bus aurait été ré-enregistré, en raison de modifications apportées à son châssis et ses nouvelles dimensions.

Bouteilles de gaz en surnombre

Le journal Khaosod English note que les propriétaires n’auraient pas informé les autorités de la modification du système de propulsion pour faire fonctionner le bus au GNC, bien que cette transformation ait été rapportée auprès de la compagnie d'assurance.

Là-dessus, le chef de la police thaïlandaise par intérim, le General Kitrat Phanphet, a déclaré mercredi lors d'un point de presse que le dispositif d’alimentation du moteur comportait pas moins de 11 bouteilles de gaz selon les enquêteurs, alors que seulement six étaient déclarées auprès des autorités.

Selon le bureau des transports de la province de Sing Buri, les bouteilles de gaz étaient en service depuis 15 ans et devaient arriver à expiration en 2026.

Marteaux brise-vitre introuvables

La porte de secours, inspectée pour la dernière fois le 23 mai dernier, semblait en bon état de fonctionnement, selon les enquêteurs, même si des incertitudes persistent au regard des conditions particulières qui prévalaient au moment du drame et qui pourraient expliquer pourquoi elle ne s’est pas ouverte, souligne Khaosod English.

Les enquêteurs ont également noté l'absence dans la carcasse du bus de marteaux brise-vitre devant permettre aux personnes piégées de créer des ouvertures et de sortir par les fenêtres.

En ce qui concerne la version du chauffeur, qui a invoqué lors de son interrogatoire l’explosion d’un pneu comme cause initiale de l’accident, les enquêteurs, mercredi, ont dit n’avoir relevé aucun signe pouvant indiquer une quelconque crevaison précédant l’incendie, selon le Bangkok Post.

Inculpation du chauffeur

"Des enquêtes médico-légales supplémentaires vont être menées pour examiner les détails. Si des individus ou entreprises sont impliqués dans des actes répréhensibles, la police royale thaïlandaise fera le nécessaire pour qu’ils soient dument poursuivis en justice", a déclaré le General Kitrat Phanphet.

Le chef de la police thaïlandaise a ajouté que le chauffeur du bus avait été appréhendé mardi soir, quelques heures après avoir fui le lieu du drame.

L’homme de 48 ans a dit avoir été pris de panique après avoir tenté en vain d’éteindre le brasier. Il a été accusé de "conduite imprudente ou négligente pouvant mettre en danger des personnes ou des biens, entraînant la mort ou des blessures, et de fuite des lieux sans porter assistance à des personnes en danger, sans s'identifier et sans signaler l'incident aux autorités, entraînant la mort d’autrui".

L'application des normes de sécurité et les contrôles en cause

Cet horrible drame qui a ébranlé l’opinion, suscite des réactions contrastées au sein du gouvernement. Certains, comme le ministre de l’Education, remettent en cause les sorties scolaires, tandis que d’autres appellent à resserrer les normes de sécurité et leur mise en application, des notions souvent mises à mal dans un pays où la culture de l’à-peu-près va malheureusement souvent de pair avec un certain laxisme ambiant en matière de prévention.

La Première ministre Paetongtarn Shinawatra a clairement exprimé son désaccord avec l’idée de suspendre les sorties scolaires, affirmant qu’une telle mesure ne solutionnait pas le problème de fond.

Les sorties scolaires ne constituent pas en soi un danger pour les enfants, mais des transports publics mal entretenus le sont, a déclaré à la chaine ThaiPBS la jeune cheffe du gouvernement thaïlandais, elle-même mère de famille, appelant à un renforcement des contrôles sur tous les transports utilisés pour les sorties scolaires, en particulier pour les longs trajets. 

La question de la sécurité des transports de passagers n’est pas nouvelle en Thaïlande, pays dont les routes figurent depuis longtemps parmi les plus meurtrières au monde.

En 2017, une polémique avait éclaté autour des mini-vans, incriminant notamment la modification et l’exploitation des véhicules à des fins lucratives et contraires à la notion de prévention.

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