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Arnaud Bialecki (Sodexo/CCEF): "La Thaïlande garde un fort pouvoir d’attractivité"

La Tout Mahanakorn à BangkokLa Tout Mahanakorn à Bangkok
Pierre QUEFFELEC (archives) - La Thaïlande garde un fort pouvoir d’attractivité pour les touristes ou les investisseurs, estime Arnaud Bialecki
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 17 décembre 2021, mis à jour le 30 décembre 2021

Alors que 2022 est présentée comme l’année du redressement économique en Thaïlande, lepetitjournal.com a demandé son avis à l’un des Conseillers du Commerce Extérieur de la France, Arnaud Bialecki

Avec la diminution du nombre de cas d’infection au Sars-CoV-2, l’accélération de la couverture vaccinale et le retour progressif des touristes, la Thaïlande observe ces dernières semaines un réchauffement de son activité économique. Le gouvernement s’attend à un taux de croissance entre 3,5 et 4,5% en 2022 et la Banque mondiale table sur 3,9%, prédisant le retour de l’activité économique à son rythme pré-pandémique vers la fin 2022.  

Toutefois, les craintes de nouvelles épidémies et donc de nouvelles restrictions font que les consommateurs et certains acteurs économiques restent prudents, ce qui risque de freiner la reprise de l’activité durant encore quelques semaines ou mois.

C’est une réalité avec laquelle il va bien falloir apprendre à vivre, estime Arnaud Bialecki, président de Sodexo pour la Thaïlande et président par intérim du comité des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CCEF) en Thaïlande.

Installé en Thaïlande depuis 26 ans, Arnaud Bialecki reste positif sur la reprise économique grâce au tourisme, aux exportations et au nomadisme numérique, même s’il invite à suivre attentivement la situation politique en Thaïlande et l’inflation.

A quelques jours de la fin d’une année extrêmement éprouvante pour beaucoup d’entreprises en Thaïlande, Lepetitjournal.com a souhaité recueillir son avis sur ce qui nous attend en 2022.

 

Arnaud Bialecki, president de Sodexo Thailand
Arnaud Bialecki, président de Sodexo Thailand

Selon vous, à quoi doit-on s’attendre en termes de reprise économique en 2022 ?

Nous allons vers un lent retour à la normale avec de temps en temps des alertes de nouveaux variants ou de nouvelles vagues du coronavirus qui auront des effets sur la bourse. Il faut en être conscient sans pour autant paniquer. Si au début de l’année 2021, il y avait des inquiétudes au niveau de la vaccination, ce n’est plus le cas aujourd’hui, il y a désormais assez de vaccins. Il faut également s’habituer à vivre avec le virus. 

L’un des grands enjeux pour la Thaïlande reste le tourisme qui représentait avant le Covid-19 entre 15 et 20% du PIB. Le retour des voyageurs, principalement venant d’Amérique ou d’Europe, va être graduel et progressif. L’interrogation vient du tourisme de Chine, je pense que vers le milieu de 2022, les conditions de voyages devraient s’assouplir pour les Chinois. Par contre, si un nouveau variant devait émerger, je pense que la Thaïlande n’opterait pour de nouvelles restrictions qu’en dernier recours. 

En attendant, la levée des restrictions suscite également des questions au niveau de la stabilité politique. Une éventuelle reprise des manifestations et la tenue des prochaines élections sont à surveiller.

Les exportations de la Thaïlande se portent très bien, mais il y a de gros problèmes au niveau logistique. Il devient problématique d’affréter des bateaux pour l’Europe ou ailleurs, de plus les coûts de transports ont fortement augmenté. Il y a une inquiétude là-dessus.

Parmi les tendances, dont la Thaïlande pourrait être l’un des grands bénéficiaires, c’est le développement de l’économie digitale et nomade. De plus en plus de personnes de la Silicon Valley ou ailleurs, spécialisés dans les hautes technologies ont décidé de s’éloigner de leur lieu de travail. Et donc, certains se disent : pourquoi ne pas travailler depuis Phuket ou Koh Samui? D’autant plus que le gouvernement planche sur des facilités en termes de visas et de permis de travail. On peut s’attendre à voir de plus en plus de nomades numériques en Thaïlande, en particulier dans les zones touristiques.

Quels sont les défis pour la communauté d’affaires et les entrepreneurs pour l'année à venir ?

Je note trois défis principaux : 

Le premier est qu’il va falloir s’adapter aux incertitudes de voir arriver un nouveau variant ou une nouvelle vague. Il faut intégrer qu’il y aura des coups de chaud, mais il ne faut pas paniquer. La troisième vague a été plus facile à gérer que la première, où le monde du travail avait été pris au dépourvu. Cette fois-ci nous sommes mieux préparés, beaucoup d’entreprises ont accéléré leur transition digitale.

Ensuite, le travail à distance ou ‘Work from home’ est devenu la norme, de nombreuses entreprises ont fait les adaptations technologiques nécessaires et c’est un mode de travail qui offre beaucoup d’avantage à Bangkok puisqu’on libère du temps en évitant les trajets entre le domicile et le lieu de travail par exemple. Après, nous ne pouvons pas passer au 100% online. Il manque le lien, les relations informelles à la machine à café, etc. Trouver un équilibre entre contacts directs et virtuels va constituer un défi pour beaucoup d'entreprises en termes de gestion du personnel. 

Troisièmement, l’inflation va être un sujet d’inquiétude. Les prévisions annoncent une inflation de 3% pour 2022 que l’on peut expliquer par une augmentation des frais logistiques, une augmentation des coûts des matières premières (carburant, alimentaire) et un problème de main d'œuvre, il devient très difficile de recruter, paradoxalement. Par exemple dans l’hôtellerie, beaucoup de gens qui ont perdu leur emploi en 2020, ne reviennent pas travailler dans ce secteur parce qu’ils se sont reconvertis ou sont réticents, donc cela induit une inflation des salaires qui conduit à une inflation générale. 

Néanmoins, la Thaïlande garde un fort pouvoir d’attractivité pour les touristes ou les investisseurs. En 2022, nous ne retrouverons pas encore les jours glorieux d’avant le Covid-19, mais nous serons sur la bonne route. 

Quels conseils donneriez-vous à un entrepreneur qui souhaiterait se lancer en Thaïlande ?

En Thaïlande, il y a encore beaucoup d’opportunités et de choses à faire, je le pensais déjà il y a 26 ans quand je suis arrivé en Thaïlande et je le pense toujours malgré la situation actuelle.

Si vous avez une bonne idée, c’est toujours le bon moment pour se lancer. Bien sûr, il faut établir un ‘business plan’ solide et avoir une volonté de s’intégrer à la culture du pays, d’essayer d’avoir une bonne compréhension de la Thaïlande. L’un des premiers conseils que je donne aux jeunes entrepreneurs, et moins jeunes aussi, qui me contactent, c’est d’apprendre le thaïlandais. Il ne faut pas arriver ici en se disant qu’on est en territoire conquis. 

Je recommande également d’utiliser les réseaux disponibles, en particulier la ‘Team France’ qui comprend les services de l’ambassade de France en Thaïlande, Business France, la Chambre de Commerce Franco Thaï (FTCC), les Conseillers du Commerce Extérieur (CCE). Avec ces différentes institutions, nous pouvons répondre à presque tous les besoins des jeunes entrepreneurs, donc il ne faut pas hésiter à les solliciter. 

Je suis positif, il y a des opportunités en Thaïlande, il y a beaucoup de domaines où les entreprises françaises sont connues et reconnues et où le savoir-faire français a de la valeur : l’agrotech, les transports, la santé. La Thaïlande a une population vieillissante, il y a beaucoup de possibilités dans ce domaine ici. Avec les CCE, nous venons de publier un guide “Les Français face au marché de l’emploi en Asie du Sud-est” dans lequel nous détaillons la situation économique et le marché de l’emploi pays par pays. 

Propos recueillis par Catherine VANESSE

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