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Ouvert à Bangkok au début du Covid, le combat du restaurant gastronomique Clara

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Catherine VANESSE - Christian Martena et Clara Del Corso dans leur restaurant Clara, situé dans le quartier Yenakart dans le centre de Bangkok
Écrit par Produits français en Thaïlande avec El Mercado
Publié le 19 novembre 2021, mis à jour le 2 septembre 2022

Le chef Christian Martena et son épouse Clara Del Corso ont ouvert leur restaurant ‘Clara’ en janvier 2020 au cœur de Bangkok. Malgré la crise, ils continuent de croire avec passion en leur projet. 

Transformer une ancienne galerie d’art aux volumes spacieux et à l’architecture un peu froide pour en faire un restaurant gastronomique invitant à un voyage artistique tout en saveurs, tel était le pari du chef italien Christian Martena et de son épouse française Clara Del Corso. 

Après avoir effectué de nombreux aménagements pour offrir un espace plus chaleureux grâce à une mezzanine, un éclairage tamisé et une cuisine ouverte, la maison connue sous le nom de Yenakart Villa est devenue le restaurant Clara en janvier 2020. 

À l’époque, le couple était loin de s’imaginer qu’une pandémie allait leur poser autant de défis et leur faire vivre un démarrage en forme de montagnes russes, comme l’explique la jeune française de 30 ans et mère de deux enfants. Alors qu’une troisième vague d’épidémie paralysait la Thaïlande un peu plus tôt cette année, le couple avait même envisagé la possibilité de rentrer quelques mois en France pour scolariser leurs filles en présentiel, revoir la famille et éventuellement travailler une saison. 

Il faut dire que sur un peu moins de deux ans d’activité, Clara a dû fermer huit mois au total à cause des restrictions pour lutter contre l’épidémie. 

Mais Clara et Christian ont pris leur courage à deux mains, puisant dans leur naturel optimiste et leur attachement à leur restaurant, pour s'accrocher et relancer l’affaire.

Aujourd’hui, ils espèrent avoir passé le plus difficile et croisent les doigts pour que l’avenir soit plus serein que les deux ans écoulés. Lepetitjournal.com les a rencontrés pour recueillir leur témoignage.

 

Devanture Restaurant Clara Bangkok
La maison connue sous le nom de Yenakart Villa est devenue le restaurant Clara en janvier 2020. Photo Catherine VANESSE

Lepetitjournal.com: Vous avez ouvert peu de temps avant l’épidémie du coronavirus, quels impacts ont eu les restrictions successives sur votre activité ? 

Clara : Sur bientôt deux ans d’activité, nous avons dû fermer le restaurant sur une période totale de 8 mois! Nous sommes dans une situation de défis permanents. À chaque réouverture, les clients reviennent doucement et quand nous atteignons un rythme de croisière, il y a quelque chose qui se passe : l’interdiction de la vente d’alcool, un couvre-feu ou l’obligation de fermer. La dernière fermeture, la plus longue, a duré trois mois et demi jusqu’au 15 octobre 2021. Financièrement c’est compliqué de tenir le coup. Jusqu’à maintenant, nous avons eu la chance de pouvoir le faire, et sommes heureux d’avoir pu rouvrir nos portes!

Quelles sont les aides dont vous avez pu bénéficier ? 

Clara : Sans nos fournisseurs, nous ne serions plus ici! Ce sont eux qui nous ont permis de survivre en acceptant de reporter certaines factures. Nous leur devons énormément et l’on voit toute l’importance des bonnes relations avec eux, certains travaillent avec Christian depuis 10 ans quand il était chef à l’Opus ou encore quand nous avons lancé Sensi. 

Ensuite, notre personnel a accepté de réduire le salaire et les horaires. Bien sûr, certains nous ont quittés, sont rentrés auprès de leur famille et de nouveaux sont arrivés. Actuellement, nous avons 15 employés alors qu’à l’ouverture en janvier 2020, ils étaient 25. 

En juillet, nous avons dû demander à nos investisseurs de nous aider financièrement. Nous n’aurions jamais imaginé devoir faire cette demande à peine un an et demi après l’ouverture parce que notre projet s’annonçait bien, les débuts étaient prometteurs.

Psychologiquement, nous passons vraiment par des hauts et des bas, ce sont les montagnes russes! Nous essayons de rester positifs, nous croyons toujours en notre projet et nous nous disons que cela ne pourrait aller que mieux après. 

 

Salle du restaurant Clara Bangkok
Christian et Clara ont réussi le pari de transformer une ancienne galerie d’art aux volumes spacieux et à l’architecture froide pour en faire un élégant restaurant gastronomique. Photo Catherine VANESSE

Avez-vous fait des adaptations dans les plats pour toucher un public plus large ou pour vous adapter à la livraison ? 

Clara : En 2020, nous n'avons rien changé. Nous avons juste fermé pendant le premier confinement et puis quand l’activité a pu reprendre, tout était plus ou moins normal jusqu’en janvier 2021. Au mois de mai 2021, nous avons lancé ‘La Bomba’, des sandwichs italiens gourmets avec un service de livraison assuré par nos soins. La formule a pris un petit peu auprès de nos clients réguliers, mais ce n’était pas suffisant pour survivre. Quand nous avons pu ouvrir en juin 2021, nous proposions des formules pour le déjeuner, le dîner jusqu’à 21h en raison du couvre-feu. Mais là aussi, ce n’était pas suffisant pour couvrir nos dépenses. Notre établissement à des coûts importants au niveau du personnel, du bâtiment, des produits alimentaires. Dès lors, nous avons fermé le 26 juin en nous disant que nous attendions la levée de l’interdiction de l’alcool pour reprendre. Sans l’alcool, c’est difficile de ne pas perdre d’argent car nos clients viennent pour une experience globale. Il est difficile de suivre un menu degustation sans au moins un verre de vins ! 

Christian : Néanmoins, nous avons finalement rouvert, pour de bon j’espère, le 15 octobre, même si l’alcool était toujours interdit (la vente d’alcool est de nouveau autorisée pour certains établissements depuis le 1er novembre, NDLR). En plus d’un menu “découverte” en 5 ou 7 Régions qui invite les clients à un voyage gastronomique dans les différentes régions d’Italie, nous avons lancé une formule “à la carte”. Initialement, nous n’avions pas prévu d’avoir un menu à la carte, cela permet aux clients de venir sans se sentir obligés de prendre un menu complet, en espérant qu’ils reviennent plus régulièrement et pas seulement pour des occasions un peu spéciales. 

N’avez-vous jamais eu peur de fermer définitivement ?

Clara : Plus d’une fois, nous nous sommes dit que nous avions ouvert au mauvais moment. Le démarrage en janvier 2020 était correct, ça s’annonçait bien, très bien même. Là, je vois les dettes s’accumuler, le ‘staff’ qu’il faut continuer à payer, c’est dur. finalement lorsque nous avons fermé le 26 juin, nous sommes descendus dans la maison de mes parents à Hua Hin. Là-bas, nous avons eu la chance de pouvoir organiser des dîners privés histoire de mettre un peu de beurre dans les épinards pour continuer à payer les écoles parce que même si les cours sont en ligne, elles sont toujours payantes. 

Vous vous êtes installés dans une ancienne galerie d’art, avez-vous cherché ce lieu pour correspondre à votre concept ou est-ce le lieu qui a défini le concept ? 

Christian : Nous avions déjà le concept avant de trouver le lieu, mais quand nous avons eu l’opportunité de nous installer ici, nous avons un peu adapté notre idée. En fait, au début, je n’étais pas convaincu par l’endroit parce que c’est un peu caché, les grands volumes m’effrayaient un peu, je ne voyais pas comment créer un restaurant chaleureux et cosy dans un espace vide conçu à la base pour exposer des œuvres d’art. J’ai toujours adoré cette maison, j’ai toujours trouvé que c’était l’une des plus belles bâtisses du quartier, mais je ne l’imaginais pas en restaurant. 
Mais finalement nous avons réussi à créer un lieu qui nous ressemble et qui mélange modernité, chaleur et art.

Clara : Nous exposons en ce moment des œuvres de l’artiste français Aurèle Ricard et de la Franco-Cambodgienne Adana Mam Legros. Dans le jardin, il y a également des sculptures de l’artiste française Val, les lumières ont été réalisées par Matteo Masservi, une partie des meubles vient du studio de design P. Tendercool et certains éléments de décoration de ToineinBangkok. Le côté artistique du restaurant est vraiment venu avec l’histoire de la maison, nous avons voulu garder l’idée de la galerie d’art tout en aménageant la salle et en réduisant certains volumes en construisant une mezzanine.

Propos recueillis par Catherine Vanesse

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