Relier par le train les pays du vaste continent asiatique. Avec l'apaisement des conflits et le développement économique, ce vieux rêve ferroviaire semble à portée de main, même si l'Asie du Sud-Est reste un maillon faible


Comme l'ancienne route de la Soie, le chemin de fer trans-asiatique transporterait marchandises et touristes de Singapour à Saint-Pétersbourg, de Phnom Penh à Pyongyang, créant le développement là où il entrerait en gare.
Née dans les années 1960, l'idée est longtemps restée paralysée par les décennies de pauvreté et de conflits. Mais la chute de l'Union Soviétique et l'ouverture de la Chine ont changé la donne.
En novembre 2006, 18 nations asiatiques, ont signé un accord visant à créer un réseau unique de voies ferrées à l'échelle du continent. Soutenu par les Nations Unies, ce réseau ferré compte actuellement près de 75.000 kilomètres de voies en service. Desservant 29 pays, il s'étend de la Turquie à la Corée du Sud. Les 6.200 kilomètres de rail manquants devraient coûter 15 milliards de dollars, selon l'ONU.
Relier l'Asie du sud-est à la Russie
La plupart des trous se trouvent en Asie du Sud-Est. La région compte une seule liaison transnationale, Singapour-Malaisie-Thaïlande. Malgré les tensions politiques et les différences d'investissement, des progrès sont à noter. Une nouvelle voie reliant le Nord-Est de la Thaïlande au Laos, via le Mékong, devrait ainsi être ouverte en mars 2009. Pour le Laos, pays enclavé, il s'agira d'une première ouverture vers la mer.
Plus au sud, la Banque Asiatique de Développement finance la restructuration des voies ferrées entre la Thaïlande et le Cambodge, tombées en désuétude. Le projet devrait être achevé d'ici deux ou trois ans. La remise en service de cette liaison ferroviaire relance l'intérêt pour une connexion avec le Vietnam, déjà relié à la Chine par deux voies ferrées. Un tel projet permettrait de relier une grande partie de l'Asie du Sud-Est à la Russie.
Le maillon faible se trouve en Birmanie, l'un des pays les plus pauvres au monde. Les montagnes et le régime isolationniste entravent la connexion avec l'Inde, l'Iran et la Turquie.
Risque de faciliter les trafics
Des problèmes techniques subsistent également. L'écartement des voies et l'espace entre les rails varient d'un pays à l'autre. L'ONU suggère donc de charger les marchandises de train à train.
Les Nations Unies espèrent que le développement du transport par rail permettra l'apparition de bulles de développement, d'emploi, de commerce et d'industrie, dans les endroits où seront échangées les marchandises. Elles visent aussi la diminution de la dépendance aux routes.
Mais de meilleures liaisons ferroviaires pourraient également faciliter les trafics d'êtres humains, de drogue, de faune et de flore, déjà très prospères en Asie du Sud-Est. L'ONU souhaite donc que les pays donateurs et les institutions financières exigent des programmes sociaux en parallèle des financements de chemins de fer.
Les Nations Unies estiment que le réseau ferroviaire trans-asiatique sera achevé d'ici 10 à 15 ans. Un délai considéré comme réaliste par les experts, si les nations asiatiques maintiennent une volonté politique.
Emmanuelle Michel et Adrien Trocmé, avec AFP jeudi 20 novembre 2008
