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Des policiers thaïlandais arrêtés pour avoir torturé à mort un suspect au poste

Interrogatoire du colonel thailandais accuse du meurtre d'un suspectInterrogatoire du colonel thailandais accuse du meurtre d'un suspect
Police royale thaïlandaise via REUTERS - Le colonel de police Thitisan Uttanapol (à gauche) est interrogé le 26 août 2021 après avoir été accusé d'avoir torturé et tué un suspect dans son commissariat de Nakhon Sawan.

Un nouveau scandale de corruption policière en Thaïlande a émergé ces jours-ci avec une vidéo virale montrant un suspect torturé à mort par des policiers qui semblent vouloir lui extorquer de l’argent

Sept policiers de la province de Nakhon Sawan ont été arrêtés cette semaine, dont deux se sont rendus jeudi soir après une intense chasse à l’homme.

En cause, le meurtre d’un suspect lors d’un interrogatoire au commissariat dont une vidéo diffusée mardi sur les réseaux sociaux a suscité l’effroi dans tout le pays, et dont les premiers éléments d’enquête laissent à penser qu’il ne s’agit que du début d’un nouveau scandale d’abus de pouvoir et de corruption au sein du système judiciaire thaïlandais.

La vidéo, publiée par l'avocate Sittra Biabungkerd sur sa page Facebook, montre des policiers dans le commissariat de Nakhon Sawan restreindre un homme assis et lui couvrir la tête de plusieurs sacs plastique.

 

Train de vie princier

Ce dernier, qui avait arrêté pour trafic de drogue, est officiellement décédé le 5 août. Un document officiel de la police stipulait qu’il était mort d'une overdose de drogue.

Mais depuis la publication de la vidéo, une enquête a été ouverte et le commissaire, le colonel Thitisan Uttanapol, a été démis de ses fonctions mercredi.

 

Image extraite de la video du meurtre d'un suspect dans le commissariat de Nakhon Sawan
Une vidéo publiée sur Facebook montre un policier mettre un sac en plastique sur la tête d'un suspect dans le commissariat de Nakhon Sawan, le 5 août 2021. Copie d’écran via REUTERS

 

Une perquisition chez celui qui se faisait appeler "Commissaire Joe" a mis en évidence un train de vie bien supérieur à ce que son salaire mensuel de 40.000 bahts (un peu moins de 1.000 euros) pouvait lui permettre. Le Bangkok Post relève notamment une collection de voitures de luxe d’une valeur estimée à 100 millions de bahts (2,6 millions d’euros) et une villa de 60 millions (1,6 millions d’euros). Le journal en langue anglaise souligne toutefois que l’officier aurait touché un certain nombre de "primes" plus ou moins substantielles dans le cadre de certaines affaires.

Maître Sittra Biabungkerd, qui dirige une fondation vouée à l’assistance juridique, a déclaré avoir reçu la vidéo d'un officier subalterne du commissariat de Nakhon Sawan. Ce dernier lui aurait demandé de transmettre le document au chef de la police nationale, affirmant que les images montraient le "commissaire Joe" essayant d'extorquer de l'argent à un trafiquant de drogue. L’avocate a manifestement jugé préférable de rendre elle-même la chose publique sans avoir à s’en remettre au plus haut échelon de la police.

La police thaïlandaise a la réputation de souffrir d’une corruption structurelle aux plus hauts niveaux et d’étouffer les affaires embarrassantes, selon les analystes, et le gouvernement a d’ailleurs promis des réformes pour changer cela.

 

"Rien à voir avec l'argent"

Selon certains médias locaux, les actes de torture auraient eu lieu car les policiers cherchaient à obtenir du suspect qu'il double un pot-de-vin dont le montant avait été prélablement accepté par les deux parties pour sa libération et celle de sa petite amie.

Le colonel Thitisan Uttanapol, l'un des deux fugitifs qui s'est livré aux autorités jeudi, s’est soumis à un interrogatoire. Il a déclaré qu'il avait ordonné à ses hommes de soutirer des informations au suspect sans intention de le tuer. Il a nié toute tentative d'extorsion.

"J'admets que ce que j'ai fait était mal, mais je voulais obtenir des informations pour lutter contre le problème de la drogue qui nuit aux habitants de Nakohn Sawan", a déclaré l’officier supérieur aux journalistes par téléphone jeudi.

"J'ai ordonné à mes hommes de le faire dans le cadre de notre travail, rien à voir avec l'argent."

Le chef de la police thaïlandaise, Suwat Jangyodsuk, a déclaré aux journalistes que personne n’échapperait à la justice.

"Au nom de la police, je voudrais m'excuser auprès du public pour ce qui s'est passé, mais je tiens également à souligner que notre organisation peut être examinée de près", a-t-il déclaré, promettant que les policiers qui ont commis des actes répréhensibles ne seront pas protégés.

"L'affaire promet d'être un véritable test pour le système judiciaire thaïlandais qui a été confronté à des questions par certains sur sa capacité à demander des comptes à ses fonctionnaires tels que les policiers", a déclaré Thitipol Phakdeewanich, doyen de la faculté de sciences politiques de l'Université d'Ubon Ratchathani.

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