Face au Cambodge, la Thaïlande s’agite sur les fronts militaire et diplomatique

« L’objectif de l’armée, suite aux derniers affrontements frontaliers avec le Cambodge, est de paralyser les capacités militaires du Cambodge pendant longtemps, afin d’assurer la sécurité des générations futures de Thaïlandais. » Celui qui s’exprime de manière aussi claire est le chef d’état-major de l’armée thaïlandaise, Chayiaphreuk Duangpraphat. De son côté, le porte-parole de la Première Armée a déclaré qu’une opération militaire avait été lancée « pour reprendre le territoire souverain thaïlandais le long de la frontière, dans la province de Sa Kaeo ». Parmi les cibles visées par les avions thaïlandais en territoire cambodgien, un casino a été détruit. Il aurait été utilisé comme centre de contrôle de drones. L’armée thaïlandaise vise à présent les bases de roquettes. « L’objectif est de détruire autant de systèmes de tir d’appui cambodgiens que possible », a déclaré le porte-parole de l’armée.

Le nationalisme de la rue thaïlandaise

Dans la rue, le nationalisme thaïlandais, comme souvent, s’exprime sans masque. Déjà, lorsqu’au printemps dernier, la Birmanie était secouée par un violent tremblement de terre, une plaie de plus pour une population qui n’avait pas besoin de ça, on ne sentait pas un profond désir de lui venir en aide. Une restauratrice de Chiang Mai, d’une cinquantaine d’années, avait exprimé son indifférence, trop préoccupée qu’elle est par les soucis que rencontre son propre pays. Dans les lieux d’aide aux réfugiés, ou lors des soirées caritatives qui leur sont dédiées, on ne voit pour ainsi pas de Thaïlandais. La même restauratrice, lundi 8 décembre, nous confiait qu’elle espérait que l’armée thaïlandaise ferait le plus de mal possible au Cambodge car elle déteste les Cambodgiens.

Le ministère thaïlandais des Affaires étrangères a réuni le corps diplomatique

Pour s’assurer le soutien des pays étrangers, le ministre thaïlandais des Affaires étrangères a réuni, lundi 8 décembre, 70 représentants diplomatiques pour leur exposer et leur commenter la situation. Le Cambodge a clairement été désigné comme l’agresseur, une liste de 14 incidents détaillés à l’appui. Sihasak Phuangketkeow a présenté au corps diplomatique les cinq points essentiels qui, selon lui, éclairent la situation :

• le Cambodge provoque et attaque le premier,
• la Thaïlande est déterminée à protéger sa souveraineté et son intégrité territoriale, ce qui nécessite la poursuite des opérations militaires,
• le peuple thaïlandais a épuisé sa patience et s’inquiète des menaces pour sa sécurité,
• les opérations militaires se poursuivront jusqu’à ce que le Cambodge change de position et choisisse la voix d’une paix véritable,
• le Cambodge a violé tous les accords précédents, y compris le dernier, celui de Kuala Lumpur d’octobre dernier.

La Thaïlande accuse le Cambodge de désinformation

Le ministre thaïlandais des Affaires étrangères a justifié la réponse aérienne par la présence de mines au sol. Il a réaffirmé que les opérations ont été menées en légitime défense, conformément aux règles internationales sur l’usage de la force et qu’elles ne ciblent que des objectifs militaires. La Thaïlande accuse également le Cambodge de désinformation et de s’appuyer sur elle pour justifier ses agissements. Quant à savoir si  d’autres mesures seront prochainement prises, Nikorndej Balankura, porte-parole du ministère, a botté en touche. « Je ne peux pas répondre à la question de savoir si cela ira plus loin. Cela dépend aussi de la partie cambodgienne. »

Message de prudence de l’ambassade de France

De son côté, l’ambassade de France en Thaïlande réitère ses messages de prudence.

« Thaïlande/ Cambodge – Suite des affrontements armés le long de la frontière

Des affrontements armés ont touché l’ensemble de la zone frontalière avec le Cambodge, fin juillet et début août 2025. Les points de passage ont été fermés par les autorités thaïlandaises.

En raison, notamment, du risque posé par la présence de mines et d’engins explosifs et l’éventualité de frappes aériennes, les déplacements dans ces zones (jusqu’à 50 km de la frontière) sont très fortement déconseillés.

De plus, les zones des villages de Ban Nong Chan et Ban Nong Ya Keo, dans le district de Khok Sung, et le village de Ban Ta Phraya, dans le district de Ta Phraya, sont également fortement déconseillées en raison des tensions autour de ces villages.

Les ressortissants français qui s’y trouveraient sont invités à s’en éloigner dans les meilleurs délais.
Ils peuvent le cas échéant se signaler auprès de l’Ambassade de France à Bangkok (admin-francais.bangkok-amba@diplomatie.gouv.fr).

Les ressortissants français sont invités à se tenir informés auprès des autorités locales et à se conformer aux consignes que celles-ci pourraient donner. »