Un ministre thaïlandais a admis mardi que l’Etat utilisait un logiciel de surveillance sur certains individus, après la sortie d’un rapport faisant état de militants politiques ciblés par Pegasus
Le ministre thaïlandais de l'Economie et de la Société numériques, Chaiwut Thanakamanusorn, a admis mardi que certaines agences de l’Etat utilisaient bien un logiciel de surveillance sur des individus impliqués dans des affaires de sécurité nationale ou de drogue, alors que plusieurs ONG dénoncent dans un rapport le piratage par le logiciel espion Pegasus des téléphones de plusieurs dizaines de militants politiques en Thaïlande.
Le ministre a déclaré devant le Parlement mardi soir qu'il savait que les autorités thaïlandaises utilisaient des logiciels espions dans des cas "limités", mais il n'a pas précisé quelle agence gouvernementale recourait à de telles pratiques, quel programme était utilisé ni quelles personnes étaient ciblées.
Les ONG de défense des droits humains accusent régulièrement les gouvernements thaïlandais successifs d'invoquer la sécurité nationale dans sa définition la plus large afin d'oppresser leurs principaux rivaux.
"Seulement dans des cas spéciaux"
Lundi, des ONG thaïlandaises et internationales ont diffusé un rapport d’enquête citant au moins 30 activistes politiques en Thaïlande dont les téléphones ont été piratés entre octobre 2020 et novembre 2021 à l'aide du logiciel espion de fabrication israélienne Pegasus.
L'enquête avait été déclenchée après que la firme d'Apple Inc. avait averti en novembre des milliers d'utilisateurs de ses iPhones qu'ils étaient la cible de "pirates informatiques liés à un Etat".
Mardi, Chaiwut Thanakamanusorn n'a pas nommé Pegasus mais a déclaré être au courant de l'utilisation de logiciels espions pour "écouter ou accéder à un téléphone portable afin d’afficher l'écran, surveiller les conversations et les messages". Il a précisé que son ministère n'avait pas l'autorité légale nécessaire pour mettre en œuvre un tel logiciel et n'a pas précisé quelle agence gouvernementale disposait de cette autorité.
"Il est utilisé pour des questions de sécurité nationale ou de drogue. Si vous devez arrêter un trafiquant de drogue, il vous faut le mettre sur écoute pour savoir où l’échange doit se faire", a-t-il déclaré, soulignant que ce genre de pratiques "est très limité et seulement dans des cas spéciaux".
Son ministère avait jusque-là nié toute connaissance de cette question.
La police thaïlandaise a nié dans un communiqué l'utilisation de Pegasus à des fins de surveillance ou quelconque atteinte à la vie privée.
Pegasus a été utilisé par plusieurs gouvernements pour espionner des journalistes, des militants et des dissidents. Apple a engagé des poursuites contre la société israélienne derrière le logiciel, NSO Group, qui a également été placée sur la liste noire par le département du commerce des Etats-Unis.
Le groupe NSO n'a pas répondu aux demandes de commentaires de Reuters lundi ou mercredi.