Alors que les appels se multiplient pour que le nouveau gouvernement interdise le cannabis à usage récréatif en Thaïlande, une étude indique une forte augmentation de la consommation chez les jeunes.
Selon les enquêtes annuelles du Centre d’Etudes sur l’Addiction (CADS) attaché à l’Université Chulalongkorn menées depuis 2019 auprès de la population thaïlandaise âgée de 18 à 65 ans, la prévalence estimée du cannabis au cours de l'année écoulée aurait été multipliée par dix l’an dernier, lorsque le gouvernement a dépénalisé l’usage du cannabis.
Cette même progression est observée chez les adolescents de 18 et 19 ans, ce qui alimente les appels à un retour en arrière strict en matière de prohibition de la plante dès lors qu’il s’agit d’accès public et d’usage récréatif.
Alors qu’elle était de 2,3% en 2019, elle est passée à 2,5%-4,3% durant la pandémie de coronavirus (2020-2021) pour atteindre 25% en 2022, l’année du retrait du cannabis de la liste des narcotiques.
Le CADS note que la consommation de méthamphétamine (0,1%-0,5% de la population), d'alcool (36,8%-51,0%) et de tabac (22,1%-28,5%) n'a pas changé voire a diminué entre 2019 et 2022.
Interdire de nouveau le cannabis en Thaïlande ?
Peu de temps après son intronisation, le nouveau Premier ministre thaïlandais, Srettha Thavisin, n’a pas tardé à faire connaître son avis négatif sur la consommation du cannabis à usage récréatif et sur la nécessité de légiférer pour permettre aux autorités de récupérer le dérapage non contrôlé de la dépénalisation survenue l’an dernier sans cadre légal adéquat.
"La politique [thaïlandaise] en matière de cannabis portera sur le cannabis médical. En ce qui concerne l'usage récréatif, je ne suis pas d'accord avec cela", a déclaré le 15 septembre aux journalistes le magnat de l’immobilier, qui occupe également le poste de ministre des Finances.
La semaine dernière, son ministre de la Santé, Cholnan Srikaew, a déclaré qu’il ferait en sorte de limiter l'usage du cannabis à l’utilisation médicale et d’interdire l’usage récréatif.
"La consommation de cannabis à des fins récréatives doit être interdite. Une utilisation inappropriée du cannabis entraînera des dangers pour les consommateurs", a-t-il déclaré au Bangkok Post.
Un secteur florissant de plus d'un milliard de dollars
Son prédécesseur, Anutin Charnvirakul, avait fait dépénaliser le cannabis en juin 2022 sans qu’un cadre légal approprié n’ait été posé au préalable, suscitant une grande confusion tant au sein de la population que des autorités, lesquelles ont colmaté tant bien que mal les vides juridiques les plus importants en imposant dans l'urgence de règles fragmentaires.
Dans les mois qui ont suivi, les parlementaires de l’époque n’ont pas été en mesure de s’entendre pour légiférer avant la tenue des élections législatives de mai dernier.
Entre temps, le secteur du cannabis a prospéré. Plusieurs milliers de commerces spécialisés dans la fumette ont ouvert un peu partout dans le royaume proposant toutes sortes de variétés y compris celles importées, principalement sur les sites touristiques.
Il est estimé que le secteur devrait rapporter jusqu'à 1,2 milliard de dollars par an au cours des prochaines années, ce qui devrait rendre l'idée d'une prohibition totale de l'usage recréatif difficile à faire passer.
Saritpong Kiewkong, député du parti Bhumjaithai qui avait mené la procédure de dépénalisation du cannabis s’est défendu ces derniers jours d’avoir cherché à ouvrir la voie à une politique pour l'usage récréatif.
"Le cannabis restera - je le souligne doublement - destiné à des fins médicales et à la recherche", a déclaré aux journalistes le parlementaire du parti sorti troisième des dernières élections législatives et aujourd’hui membre du gouvernement de coalition.
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