Retour sur l’actualité de la semaine en Grèce

Regards sur la Grèce et la Méditerranée

 

Chypre–Liban : la carte maritime qui rebat les équilibres

Dans un contexte énergétique tendu en Méditerranée orientale, Chypre a franchi une étape décisive : l’accord de délimitation maritime signé avec le Liban met fin à un feuilleton diplomatique entamé en 2007. Alors que le Parlement libanais s’opposait jusque-là à la ratification, la détermination conjointe des deux gouvernements a enfin permis d’aboutir. Cette normalisation ouvre une voie claire vers l’exploration de ressources en mer. Elle s’inscrit surtout dans une stratégie chypriote de longue haleine : délimiter ses zones économiques avec tous ses voisins, à l’exception notable de la Turquie. Après l’Égypte et Israël, le Liban rejoint donc ce réseau énergétique régional.

À Ankara, la réaction ne s’est pas fait attendre. Le ministre turc de la Défense, Yasar Guler, a dénoncé une « démarche unilatérale » susceptible d’alimenter les tensions, estimant que Nicosie cherche à s’appuyer sur des partenariats militaires extérieurs pour renforcer son autonomie. La diplomatie turque a ensuite pris le relais, accusant l’accord de marginaliser les droits des Chypriotes turcs.

Loin d’une escalade verbale, le président Nikos Christodoulides adopte un ton conciliant : il se dit prêt à voir Ankara revenir à la table des discussions et ouvert à un dialogue avec la communauté turco-chypriote — une invitation significative dans un climat géopolitique crispé.

 

SAFE : un projet européen sans la Turquie… pour l’instant

Alors que Bruxelles cherche à bâtir une souveraineté industrielle militaire à l’échelle du continent, le mécanisme de prêts SAFE (150 milliards d’euros) ne comptera ni la Turquie ni la Corée du Sud parmi ses membres fondateurs. Leur candidature n’a pas été validée dans les délais.

Le paradoxe est que l’Europe ne souhaite pas se couper de ces partenaires : jusqu’à 35 % des projets financés pourront associer des pays tiers. En creux, un message : la défense européenne ne sera pas autarcique, mais construite autour d’un cœur politique — l’UE — auquel les autres doivent s’adosser, non l’inverse.

 

Tsipras, la mémoire comme tremplin politique

Ithaca, les mémoires d’Alexis Tsipras, ne sont pas seulement le récit personnel d’un ancien Premier ministre. Elles sont aussi une tentative de clarification idéologique — voire de repositionnement stratégique.

Tsipras y revisite la crise de 2015, le bras de fer avec l’Eurogroupe, le référendum, les désillusions, puis la scission interne débouchant sur sa démission après la déroute électorale de 2023.
Le livre, vendu à plus de 30 000 exemplaires en quelques heures, s’apparente à un manifeste — un argumentaire pour expliquer pourquoi ses choix divergeaient profondément de ceux de Yanis Varoufakis ou de Zoï Konstantopoulou. Les réactions de ses anciens alliés sont cinglantes, mais elles révèlent surtout une chose : la gauche grecque demeure fragmentée, et l’ombre d’un retour de Tsipras plane déjà sur elle.

 

OPEKEPE : l’agriculture grecque à la croisée du scandale et de la colère sociale

Pendant que l’enquête parlementaire sur OPEKEPE, l’agence de paiements agricoles, se poursuit, le terrain gronde. Des agriculteurs se préparent à bloquer des axes autoroutiers pour protester contre le retard des subventions.

Le témoignage refusé de Giorgos Xylouris, figure syndicale crétoise citée dans le dossier, a provoqué un séisme politique. PASOK réclame sa comparution forcée, accusant la majorité d’abriter ses réseaux. Le gouvernement nie.
Malgré 14 condamnations confirmées cette semaine, les fonds détournés n’ont toujours pas été restitués — un symbole d’un malaise plus profond : méfiance envers l’administration et sentiment d’injustice chez les producteurs.

 

Elargissement historique des conventions collectives

Droit du travail : accord historique entre syndicats et employeurs pour étendre les conventions collectives à 80 % des salariés du privé (contre 20 % aujourd’hui).

 

Les dates importantes de la semaine à venir

2–3 décembre 2025 : grève des taxis en Attique

Les chauffeurs demandent :

1. un report de l’obligation de passer aux véhicules électriques,
2. une renégociation de l’usage des voies de bus.

 

2 décembre 2025: Greek Economic Summit

L’American-Hellenic Chamber of Commerce réunit décideurs politiques et industriels. L’occasion de prendre la température économique d’un pays entre reprise boursière et inquiétudes structurelles.

 

3 décembre 2025 : lancement national de Ithaca

Alexis Tsipras présentera son ouvrage et devrait clarifier son avenir politique.
Tous les regards seront tournés vers le message qu’il adressera à l’électorat progressiste.

 

4 décembre 2025 :la flamme olympique vers l’Italie

Athènes remettra la flamme des Jeux d’hiver à Milano-Cortina 2026.
Moment protocolaire mais aussi diplomatique : Italie et Grèce affichent une proximité discrète autour du tourisme et du sport.