Plébiscité par des milliers d’investisseurs étrangers ces dernières années, le programme grec de résidence contre investissement immobilier, dit « Golden Visa », marque un tournant. Face à l’inflation immobilière et aux revendications sociale, Athènes a durci les conditions d’accès. Résultat : les demandes commencent à ralentir, et le système, à vaciller.


Une baisse notable des demandes
Après deux années de croissance soutenue, le programme grec de « Golden Visa » commence à donner des signes d’essoufflement. Selon les données du ministère grec des migrations, les demandes de permis de séjour via l’investissement immobilier ont chuté de 28,5 % en avril 2025 par rapport au même mois de l’année précédente, passant de 790 à 564 dossiers. Il s’agit de la première baisse depuis septembre 2022, date à laquelle le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis avait annoncé une augmentation du seuil d’investissement minimum, provoquant alors une ruée sur les biens immobiliers.
Cette inflexion du rythme des candidatures semble directement liée à la réforme entrée en vigueur le 1er septembre 2024. Depuis cette date, les investisseurs étrangers doivent désormais engager au moins 800 000 euros dans l’immobilier pour obtenir un titre de séjour, dans certaines zones très demandées comme Athènes, Thessalonique ou encore les îles touristiques de Mykonos et Santorin. Dans le reste du pays, le seuil est relevé à 400 000 euros. Le gouvernement impose également que les biens achetés fassent au minimum 120 m² et qu’un seul bien soit pris en compte dans le calcul du montant total.
Entre 2023 et 2024, plus de 17 900 biens ont été acquis via le programme, un chiffre supérieur à la totalité des acquisitions réalisées lors de la décennie précédente. L’ampleur de cette vague d’investissement, évaluée à plus de 4,47 milliards d’euros, a profondément déséquilibré le marché immobilier, provoquant une flambée des prix dans plusieurs régions, notamment dans les centres urbains et les îles prisées. Le volume de dossiers a atteint un record en 2024 avec 9 411 demandes déposées, contre 8 477 en 2023.
Des effets sociaux de plus en plus contestés
Face à cet afflux massif, les services de l’immigration ont été saturés. À ce jour, plus de 16 000 demandes seraient encore en attente d’examen. Malgré la baisse observée en avril, le début de l’année 2025 reste dynamique : 3 477 demandes ont été enregistrées sur les quatre premiers mois, soit une augmentation de 25 % par rapport à la même période de 2024. Ce rebond s’explique en grande partie par un dernier sursaut d’investisseurs profitant de la période transitoire prolongée.
Le dispositif, longtemps considéré comme l’un des plus accessibles de l’Union européenne, avec un ticket d’entrée fixé à 250 000 euros jusqu’en 2023, a pourtant suscité de vives critiques internes. L’acquisition massive de logements par des investisseurs étrangers a contribué à retirer du marché une part importante de l’offre locative, notamment dans les quartiers populaires des grandes villes, aggravant la crise du logement pour la population locale.
Une remise en question au niveau européen
Par ailleurs, la Commission européenne continue de surveiller les programmes de visas dorés mis en place dans plusieurs États membres, les jugeant potentiellement contraires aux principes de justice sociale et de transparence. Les accusations de spéculation immobilière, de déracinement des résidents permanents et de distorsion du marché se multiplient. En réponse, le gouvernement grec tente de rééquilibrer son dispositif, en limitant les effets pervers sur l’économie réelle tout en continuant à attirer des capitaux étrangers.
































