Nicolas Simarik pose en couverture de La Déroute, détournement du catalogue du vépéciste La Redoute
1236 pages et 1,8 kg. Même poids, même couleur de typo, mêmes poses. Pourtant c'est un homme qui sourit en couverture. "Impossible chez La Redoute", confie Nicolas Simarik, le pasticheur du célèbre catalogue dont il a repris la maquette mais dont la direction n'a pas souhaité participer au projet.
A la place des prix, on lit l'heure des séances photos et les descriptifs sont le nom des 600 mannequins volontaires. A l'origine du pavé, l'association Entrez sans Frapper (dont le président est en première page et la directrice en quatrième de couverture) qui monte des collaborations entre les Toulousains du quartier de l'Empalot et des artistes.
Pour un art populaire
Jovial et timide à la fois, Nicolas Simarik déteste déranger les gens. Pour impliquer les habitants dans la création de cette oeuvre, il s'est appuyé sur l'école et le réseau associatif de la cité durement frappée par l'explosion de l'usine AZF en 2001.
Pendant 18 mois, il a pris 200 photos par jour avec un appareil numérique bon marché, dirigé un atelier d'écriture pour inventer les slogans du catalogue et délègué enfin la mise en page à une graphiste.
"Ce qui m'intéresse, c'est d'être dans la rue au contact des gens et de toucher un public qui ne va pas forcément vers l'art", résume celui qui met en scène, une "exagération du bonheur".
Comme page 48 où Sandra et Fatima font le poirier ? "Ce n'était pas du tout une commande. C'est le genre de choses que je trouve super, le moment où l'on dépasse les codes"explique l'auteur.
Sur place, Nicolas Simarik découvre la très grande souffrance de la population, due à la pauvreté. La déroute fait soudain écho à l'actualité et notamment aux émeutes dans les banlieues. Pour l'auteur, sa démarche répond aussi à un manque de sincérité et un besoin de réel dans une société de consommation au marketing manipulateur.
L'artiste lui-même est indépendant des galeries, système qu'il juge dépassé. Aujourd'hui, il savoure sa tournée de dédicaces dans les librairies de France où son objet est vendu 14?. On vient de lui décerner au Sénat le Prix de la Fraternité.
Claire ROCHER (www.lepetitjournal.com) 18 décembre 2006
www.laderoute.info