L’agence américaine Moody’s vient d’abaisser la perspective de notation de la dette souveraine de Hong Kong, ce qui est contesté par le gouvernement local.
Une notation importante pour Hong Kong
Quand un investisseur prête de l’argent à un Etat, une entreprise ou un établissement financier, il a besoin de connaître la probabilité de se faire rembourser, ce que l’on peut relier au risque de crédit. Dans le monde, trois principales agences, toutes américaines (Moody’s, Standard and Poors, Fitch), se chargent d’évaluer ces risques et d’attribuer des notes d’opinions. Ainsi, pour Moody’s, une note Aaa (AAA pour les deux autres) correspond à un crédit « prime », avec sécurité maximale ; une note entre Aa1 et Aa3 (AA+ et AA-) à du « high grade », avec une qualité haute ou bonne ; une note entre A1 et A3 (A+ et A-) à de « l’upper medium grade », avec qualité moyenne supérieure ; une note entre Baa1 et Baa3 (BBB+ à BBB-) à du « lower medium grade », avec qualité moyenne inférieure. En dessous de ces notations, la dette est considérée comme spéculative.
Seuls une douzaine d’Etats dans le monde sont encore notés Aaa par Moody’s, parmi lesquels un seul « asiatique », Singapour. Avec Aa3, Hong Kong reste dans la catégorie des « high grade », au même niveau que d’autres émetteurs comme le Royaume-Uni, Taiwan, la République tchèque ou la Belgique, juste derrière la France, notée Aa2, et devant le Japon, noté seulement A1. Cependant, cette note est aussi assortie d’une « perspective ». Or, le 6 décembre, en changeant celle de Hong Kong de « stable » (sa situation depuis janvier 2020) à « négative », Moody’s a suscité de nombreuses réactions politiques et économiques.
Des raisons contestées par Hong Kong
L’agence américaine a notamment motivé sa décision par des « signes de réduction de l’autonomie des institutions politiques et judiciaires de Hong Kong », et dit s’attendre « à une nouvelle érosion de l’autonomie (de la ville) en matière de décisions politiques, institutionnelles et économiques ». Pour illustrer ces propos, Moody’s a cité la loi sur la sécurité nationale de 2020 et les changements apportés au système électoral.
Aussitôt, le gouvernement de Hong Kong a réagi à ces commentaires, les jugeant « sans fondement ». Son communiqué a au contraire transformé ce rapprochement en force : « L’approfondissement et l’expansion des liens économiques et financiers entre Hong Kong et le continent ne devraient pas constituer une contrainte de notation », a assuré le gouvernement local, estimant même : « Au contraire, ces liens sont une source de force pour le développement à long terme de Hong Kong ». Sur la question de la loi sur la sécurité nationale, il a ajouté que cela avait « rétabli la stabilité et accru la confiance en Hong Kong ».
La Chine aussi concernée
Pour l’agence Moody’s, les liens avec Pékin sont donc d’autant plus déterminants dans sa décision pour Hong Kong que, la veille, elle avait aussi placé la note de la Chine sous perspective « négative ». Moody’s estime que la hausse de la dette des collectivités locales chinoises « va contraindre les autorités à soutenir financièrement les gouvernements locaux et les entreprises d’Etat endettées ». Autre souci selon l’agence américaine, l’aggravation du secteur immobilier, et notamment d’Evergrande et de Country Garden, nécessitera certainement une intervention coûteuse de Pékin, qui a d’ailleurs augmenté son objectif de déficit budgétaire de 3% à 3,8% du PIB en 2023.
Tout cela s’est immédiatement traduit par une méfiance des investisseurs. Ainsi, le 8 décembre, l’indice CSI 300 des bourses de Shenzhen et de Shanghai tombait à son niveau le plus bas depuis février 2019. Il chutait ainsi de 12% sur l’année, tandis que l’indice Hang Seng de Hong Kong était en repli de 17% sur la même période.
Cette notation va-t-elle réorienter les investisseurs à plus long terme ? Rien n’est moins certain, car cela ne va pas forcément mieux ailleurs. Ainsi, Moody’s a aussi placé les Etats-Unis en perspective négative le 10 novembre dernier. Dans un monde où de moins en moins de placements apparaissent sans aucun risque, la nouvelle perspective de notation de Hong Kong doit donc être relativisée.