Une avenue, de nouveaux logements pour en chasser "les maux" : voilà la motivation de la mairie de Valence pour changer le visage du Cabanyal. Quand les débuts de démolition sont niés, les habitants de ce quartier classé Bien de Interes Cultural montent au créneau, soutenus par la ministre de la Culture
La semana santa n'a pas effacé la polémique au Cabanyal. Dans ce quartier historique de Valence, la municipalité s'affronte avec le gouvernement, le parti socialiste avec le parti populaire, et les riverains commencent à être eux-même divisés. La ministre de la culture Ángeles González Sinde a même participé à une procession aux côté des membres de la plateforme Salvem El Cabanyal. Un message fort, qui lui a valu d'être convié par la maire PP Rita Barberá à expier ses péchés en public, selon le rituel du Via Crucis.
Une avenue pour trancher le problème de la réhabilitation
Ce quartier de pêcheur a vu le jour au XIIIème siècle, quand Jaime I, désireux de voir croitre leur activité, finance la construction des "barracas", ces maisons typiques aux façades colorées.
Ce qui est aujourd'hui le Cabanyal a constitué jusqu'en 1897 une municipalité indépendante, connue sous le nom d'El Poble Nou de la Mar. Autant dire que ces ruelles parallèles à la Méditerranée possèdent une identité bien affirmée. C'est celle-ci que Salvem el Cabanyal veut défendre : une réhabilitation est nécessaire. Au contraire, Rita Barberá rêve de prolonger l'avenue Blasco Ibáñez jusqu'à la mer, ce qui entrainerait la démolition de 1651 bâtiments classés BIC depuis 1998. Mais aussi l'éradication des populations marginales d'okupas, "les maux" du quartier.
Le 4 janvier dernier, le Ministère de la Culture a passé un ordre pour freiner le plan de la mairie, considéré comme une "spoliation". La Generalitat a alors contre-attaqué avec un décret-loi pour tenter d'éviter ce mandat.
Une barraca comme symbole de la lutte actuelle
Au matin du 31 mars dernier, une entreprise de démolition est entrée au numéro 131, calle de la Reina pour la rendre inutilisable aux squatteurs et la faire passer sous le contrôle de Cabanyal 2010, la société privée responsable du Plan municipal. Le collectif Salvem a aussitôt multiplié les actions pour dénoncer ce qu'il considère comme un "délit". La portevoix Maribel Doménech a souligné que malgré les déclarations, "la politique de démolitions continue d'avancer". Barbera a elle rejeté les invitations aux négociations, considérant les membres de la plateforme comme "violents". Et voilà que l'affaire commence à faire parler d'elle dans le reste de l'Europe. La ARD, chaîne publique allemande, a récemment dénoncé ce qu'elle considère comme une "barbarie culturelle" dans un reportage intitulé "Trop de ciment pour Valence".
Maintenant que les socialistes ont fait du quartier leur cheval de bataille politique, le conflit enraciné depuis des dizaines d'années ne semble pas prêt de se calmer.
Sarah BOSQUET (www.lepetitjournal.com - Espagne) jeudi 8 avril 2010