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HISTOIRE - Les événements du 9 avril 1938

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Écrit par Lepetitjournal Tunis
Publié le 9 avril 2019, mis à jour le 9 avril 2019

Les événements du 9 avril 1938, liés aux revendications de réformes politiques, et notamment l'institution d'un parlement, aboutirent à une sanglante fusillade qui marquera le mouvement national tunisien

L'accès au pouvoir en France du Front populaire et sa volonté d'engager le dialogue avec les chefs nationalistes permet le retour des exilés. Un vent d'espoir se lève alors en Tunisie lorsque Pierre Viénot débarque le 1er mars 1937 et évoque la possibilité d'accorder aux Tunisiens une certaine forme d'autonomie interne. Le Néo-Destour accorde un préjugé favorable aux nouvelles autorités françaises.

Chute du Front populaire
Le 21 juin 1937, le gouvernement Blum qui avait mené une politique d'ouverture envers les colonies est poussé à la démission en raison de la crise économique qui secoue la France. Les colons installés en Tunisie, qui avaient tout fait pour saboter les réformes du Front populaire, s'en réjouissent. Dès le retour de Viénot en France, la résidence générale durcit sa politique de répression dans les régions minières. La chute du Front populaire et le durcissement de la politique de la résidence générale amènent le Néo-Destour à retirer sa confiance au gouvernement français.

Rivalités entre partis nationalistes
Une véritable rivalité s'installe alors entre les partisans de Thâalbi (Destour) et ceux du jeune Habib Bourguiba (Néo Destour). Le bureau politique du Néo-Destour appelle à une grève générale pour le 20 novembre 1937. Ce durcissement amène le président du Néo-Destour, El Materi, à présenter sa démission le 3 janvier 1938.

À Bizerte, dans le nord du pays, une manifestation s'oppose le 8 janvier à l'interdiction de territoire frappant le leader destourien local, le militant syndicaliste Hassan Nouri ; elle est durement réprimée et fait six morts et des dizaines de blessés. Celle-ci n'entame en rien la détermination de Bourguiba et des autres membres du parti à mobiliser les masses populaires face à l'escalade de la répression. Les étudiants de l'Université Zitouna sont incités à faire grève, ce qui provoque le renvoi de 108 d'entre eux pour activités au sein du Néo-Destour, formation de comités estudiantins liés au Néo-Destour et associations illégales.

L'affaire Ali Belhouane
Le 10 mars, Ali Belhouane, surnommé "leader de la jeunesse", donne une conférence sur le "rôle de la jeunesse dans la bataille de libération nationale" à laquelle 700 élèves de différents établissements scolaires assistent. Le Conseil national du Néo-Destour, réuni les 13 et 14 mars, adopte une motion appelant à la poursuite des manifestations, au non paiement des impôts et au boycott du service militaire. Belhouane est congédié du Collège Sadiki où il enseigne.

Les autorités du protectorat anticipent alors en procédant à l'arrestation de Youssef Rouissi, Hédi Nouira, Salah Ben Youssef et Slimane Ben Slimane accusés d'incitation à la haine raciale et d'atteinte aux intérêts de la France en Tunisie. En représailles, le Néo-Destour organise, le 7 avril, une manifestation principalement formée d'étudiants et drainant 2 500 personnes devant le palais beylical d'Hammam Lif. Mongi Slim, membre du Conseil national du Néo-Destour, parvient à rencontrer le bey et sollicite son intervention en vue d'obtenir la libération des responsables emprisonnés. Ne voyant rien venir, le Néo-Destour décide d'appeler à une grève générale le 8 avril.

Une autre manifestation, dirigée par El Materi, part de Bab Menara et Bab Jedid et fait sa jonction avec la première à Bab El Bhar. Devant une foule de 10 000 personnes, Belhouane harangue les manifestants : "Nous sommes venus aujourd'hui démontrer notre force [...] celle de la jeunesse qui ébranlera le colonialisme [...] Le parlement tunisien ne sera créé que par le martyr des militants et les sacrifices de la jeunesse... "

Emeutes du 9 avril
Le 9 avril, à 11 heures, les étudiants de l'Université Zitouna se rassemblent à nouveau à la kasbah de Tunis, où une délégation va à la rencontre du grand vizir alors que le reste des manifestants se rassemble devant Dar El Bey. À l'issue de la rencontre, Ali Dargouth se lance dans un discours incitant les manifestants à passer à l'action. Ces derniers se dirigent vers la maison de Bourguiba pour y recevoir des instructions. Entre temps, Belhouane est convoqué par le juge d'instruction en début d'après-midi : il doit arriver à 14 heures au tribunal pour être interrogé à propos du discours prononcé la veille. Une foule immense se rassemble alors devant le Palais de justice où les forces de l'ordre accourent.

Les forces de l'ordre commencent d'abord par disperser la foule à coups de bâton pour frayer un passage à la voiture cellulaire qui doit emmener Belhouane. Les manifestants se retirent dans un premier temps vers la médina d'où ils reviennent plus nombreux. Les femmes sur les terrasses poussent des youyous qui sonnent comme un appel au martyr et jettent aux manifestants tous les instruments qui peuvent servir d'armes. La foule s'amasse en deux points de la médina, les places de Bab Souika et de Bab Menara, alors que les forces de l'ordre tentent de protéger le Palais de justice à la kasbah et la prison civile de Tunis.

Les heurts sanglants se soldent par 22 morts et près de 150 blessés. Le résident général se rend auprès du bey et promulgue une loi instaurant l'état de siège à Tunis, Sousse et dans le cap Bon.

Le lendemain, Bourguiba et Slim sont arrêtés et traduits, avec le reste des dirigeants du Néo-Destour, devant le Tribunal militaire pour complot contre la sûreté de l'État.

Un film a été tiré de ces événements. Il s'agit de "Bousculades 9 avril 1938" de Mohamed Maghraoui.

Commémorations

Depuis l'indépendance du pays, le 9 avril fait partie des jours fériés. Des cérémonies sont organisées chaque année à la mémoire des martyrs, notamment au monument des martyrs de Séjoumi.

En 2019,  Ala Khatrek Tounsi (AKT) marque le coup avec un concert avenue Habib Bourguiba (Tunis).
AKT, créée en 2016 par des jeunes tunisiens, est une initiative citoyenne dont la mission est de donner une voix à la jeunesse afin qu’elle puisse consolider son identité.  Misant sur la bonté et l’empathie des tunisiennes et des tunisiens pour leurs semblables, les actions réalisées depuis le début du mouvement illustrent la tolérance et la diversité des tunisiens, mettant ainsi en avant nos valeurs tunisiennes et notre diversité.

La célébration du 9 avril s’inscrit dans la volonté de consolider les dates nationales tunisiennes. Le but recherché par les membres de l’AKT est de fédérer tous les tunisiens, particulièrement les jeunes, autour de cette date, en lui redonnant un sens fort. Rendre hommage à tous les martyrs de Tunisie, à tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour voir naître la Tunisie d’aujourd’hui, pour que nous puissions bénéficier de tous nos acquis, permettra une prise de conscience afin que le 9 avril ne soit plus considéré comme un simple jour férié. Tout en espérant que d’autres initiatives emboîteront le pas de ce mouvement en célébrant d’autres dates nationales à l’instar du 25 juillet, du 20 mars, etc….

Ce devoir de mémoire sera célébré à travers une fête en plein coeur de Tunis, à l’avenue Habib Bourguiba, à partir de 15h30. Djappa Man, Armasta, Yasser Jeradi, Khawla Tawess et le slameur Walid Slama seront sur scène et interpréteront leurs dernières créations. Zeineb Melki, Najet Ounis, Amir Salem Monsieur, Amine Limem seront les ambassadeurs de cet événement dont le maitre de cérémonie sera Midox.

A l’initiative de AKT, le concert est organisé en partenariat avec Mosaïque FM, British Council et M & M Events.
 

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