Jusqu'au dimanche 25 février, le célèbre Musée de l'Art Yamatane à Ebisu accueille en ses murs une exposition sensationnelle sur l'univers du peintre japonais Yokoyama Taikan (1868-1958). Quarante et une œuvres nihonga ponctuent la visite dans la chaleureuse pièce principale du musée, laissant le public inventer son propre voyage à travers les peintures du maître, entre Mont Fuji majestueux, délicates fleurs de cerisiers et scènes de vies nippones. Le visiteur en ressort conquis, l'esprit vagabondant dans les paysages japonais d’antan.
Yokohama Taikan, peintre nihonga
A Ebisu, le Musée de l'Art Yamatane est le pèlerinage incontournable des amoureux de nihonga, littéralement peinture japonaise (ga se traduisant par peinture et nihon, par Japon ou japonais). Ce terme pictural englobe ainsi tout un pan de l'art de la peinture nippone, des sujets représentés aux techniques de dessin en passant par les matériaux dont les peintres se servaient pour créer des œuvres toujours plus magiques à contempler. Considéré comme l'un des pionniers du nihonga, Yokoyama Taikan est un artiste reconnu dans son pays, en particulier pour ses peintures féeriques à la gloire du Fujisan, qui aime jouer à un jeu de cache-cache onirique avec la brume et le soleil rouge sang. Les thématiques récurrentes des peintres nihonga font partie des éléments clés du succès de ce courant pictural. Comme les impressionnistes en leur temps, les peintres nihonga immortalisent des scènes de vie à l'atmosphère captivante (Sakuemon's House, 1916), des détails d'une nature embellie (Bamboo, 1918) ou des animaux dans leur environnement propre (Horned Owl, 1926).
Taikan était d'ailleurs un ami proche du fondateur du musée de l'Art Yamatane, Yamazaki Taneji. Leur collaboration et leur amitié ont permis à Taneji de se composer une belle collection d'œuvres du peintre nihonga de son vivant. L'exposition en cours offre la toute première opportunité, depuis l'ouverture du musée en 1966, de contempler l'entière collection de Taneji, en une seule visite. Découpée en trois parties, elle permet au public d'appréhender le travail artistique de Taikan selon des axes évolutifs : Taikan, pionnier du nihonga, essence de l'art de Taikan et élite de l'art tokyoïte. La collection de quarante et une œuvres n'offre pas seulement un voyage dans l'imaginaire du peintre ou une aventure dans un Japon ancien qui hypnotise le visiteur du 21ème siècle, elle offre également un voyage parmi les quatre saisons du pays, que ce soit grâce à de délicats flocons de neige sur un paysage de campagne ou de somptueuses fleurs de cerisiers fraîchement écloses.
Exposition d'un Japon fascinant
Les techniques et les pigments utilisés pour les peintures traditionnelles japonaises permettent à l'artiste de peindre des œuvres envoûtantes et immersives. Les pigments aident le dessin à prendre vie et le support en soie ou en papier apporte la touche finale à la poésie de l'ensemble. Avec de l'encre ou des pigments de couleurs, les peintures de Taikan sont de véritables voyages dans un Japon d’autrefois, de l'ère Meiji à l'ère Showa. Son geste fin et précis, mêlé à son grand talent, a permis de représenter aux yeux du monde des "photographies" d'instants uniques : Lakeside in the Evening (au bord du lac le soir), Mt. Kisen (la montagne Kisen), Snow-covered Mountain (montagne enneigée), Spring morning (un matin de printemps), Peonies (pivoines)... La collection de l'exposition est une ode à la beauté de l'instant. Que dire de son œuvre Bamboo, faite de doux pigments sombres sur de la soie, enduite de feuilles d'or. Sa simple contemplation entraîne chez le visiteur un bien-être zen réjouissant. On s'imagine traverser cette forêt de bambous, à travers laquelle la lumière matinale se glisse, chatoyante et rassurante. L'atmosphère est unique et quitter l'œuvre des yeux est un effort.
Le Musée de l'Art Yamatane est un écrin de velours pour les peintures, mais aussi pour les amateurs d'art qui le visitent. La boutique du lieu fourmille d'achats plaisir et de petites attentions en lien avec l'exposition en cours. Mais le point final à l'heure et demi passée à contempler les peintures de Taikan est donné par le Café Tsubaki (Camélia), à l'entrée du musée, où l'art fusionne littéralement avec la gastronomie gourmande et délicate japonaise (wagashi). A chaque exposition du musée (tous les deux mois environ, un rythme justifié par la fragilité des peintures nihonga, mises à mal par l'agression des lumières et de l'humidité), le Café Tsubaki compose un menu de sucreries traditionnelles inspirées de plusieurs œuvres exposées. Chaque gourmandise épouse une forme unique et un design authentique, en référence à une peinture. Jusqu'à dimanche, le gourmet amateur d'art pourra se délecter de six nouveaux wagashi : le Fujisan dans une mer de nuage, un arbre de cerisiers en fleurs ou encore un camélia en hiver. On hésite à croquer dans son wagashi, chagriné à l'idée d'annihiler d'un coup de dent cette œuvre sucrée. La prochaine exposition, qui démarre le 10 mars, aura pour thème le nihonga et les sakura. La vue et le goût seront encore une fois bien satisfaits.
Informations sur l'exposition :
Dates :
Jusqu'au 25 février 2018
Horaires :
10h-17h
Adresse :
3-12-36 Hiroo, Shibuya-ku, Tokyo 150-0012
Tarification :
1000 yens pour un adulte