Cela valait certainement les quinze heures de bus qui séparent Krabi de la capitale. Une trentaine d’enfants défavorisés de Natacha School ont découvert l’ambassade de France, ses métiers et sa Résidence.


Il fallait voir le plaisir illuminer les visages des 34 élèves âgés de dix à douze ans de Natacha School, à l’heure du goûter, ce lundi 20 octobre, à la Résidence de France, sous le regard tout aussi enjoué de l’ambassadeur de France et de son épouse. Un goûter français qui leur était offert après deux heures de découverte un peu plus sérieuse de la vie d’une ambassade et d’un consulat. Accompagnés de sept de leurs enseignants et de leur directeur, ils avaient passé quinze heures, la veille, à rallier Bangkok depuis Krabi, en bus. Ils avaient bien mérité leurs macarons et leurs paris-brest.
D’une école insalubre à une salle d’informatique


Pour bien comprendre l’importance de cette histoire, il faut rappeler qu’il y a vingt ans, Natacha School était une petite école d’une quinzaine d’élèves, située à Ban Quan Kojan, dans la région de Krabi, presque insalubre, à tel point qu’elle devait être fermée par le gouvernement. Elle doit ce qu’elle est aujourd’hui à la volonté farouche d’une femme, Élisabeth Zana, dont la fille Natacha a été emportée par le tsunami du 26 décembre 2004.

« Elle était une brillante étudiante, une amoureuse des enfants, explique Élisabeth. J’ai juste voulu poursuivre des choses en lesquelles elle croyait, notamment l’instruction qu’elle considérait fondamentale pour accéder à une vie moins difficile. J’ai ainsi essayé de surmonter l’insurmontable. Et au fur et à mesure que ces enfants grandissent et progressent, je réalise à quel point j’ai eu raison. »
200 enfants de maternelle et de primaire
C’est un jeune Thaïlandais francophone qui l’a conduite vers cette école, quelques mois après la catastrophe, alors qu’elle créait, en France, Nat Association, dans le but d’aider les enfants orphelins du tsunami et ceux dont les parents avaient tout perdu. Ils devaient retourner à l’école ! « On a commencé à reconstruire, à boucher les trous, se souvient Élisabeth Zana. De là, nous sommes arrivés aujourd’hui à une école qui valorise l’éducation thaïe, qui accueille 200 enfants de maternelle et de primaire, qui dispose d’une salle d’informatique, d’une salle d’art, où l’on enseigne l’anglais et j’espère bientôt le français, dès que nous aurons trouvé le budget pour embaucher un ou deux enseignants supplémentaires. »
De l’importance de l’apprentissage du français
Élisabeth Zana ne se destinait pas à vivre en Asie. Elle y venait en vacances. Et puis les circonstances… Elle vit aujourd’hui à 45 kilomètres de l’école et parcourt donc ses 90 kilomètres presque tous les jours pour aller voir les enfants. Pour les plus pauvres d’entre eux, elle a créé un réseau de parrainage. Parmi la centaine de filleuls, certains sont aujourd’hui à l’université ou en sortent, pour sa plus grande fierté. Il leur faut maintenant acquérir quelques bases de notre langue pour pouvoir aller découvrir la France et ses nouveaux horizons. « Si vous avez un bon projet, vous pourrez aller en France, a expliqué à ses visiteurs Carole Josse, consule générale de France en Thaïlande. Le mieux pour cela, c’est d’apprendre le français. »
Le plus beau des métiers, ouvert sur le monde et les autres

L’ambassadeur de France, Jean-Claude Poimbœuf, a lui aussi encouragé ses jeunes invités à apprendre le français, s’ils en ont un jour la possibilité. « Comme ce fut le cas en octobre 2022, du temps de mon prédécesseur, je suis ravi de vous faire découvrir un lieu important et de vous présenter notre travail, a-t-il d’abord confié. Nous allons voir quelques images de notre pays, la France, de ses paysages et de ses monuments. Ensuite, mes collaborateurs vous présenteront leurs activités. Nous exerçons le plus beau des métiers parce qu’il est ouvert sur le monde et les autres, il rapproche les peuples. Je vous encourage à apprendre les langues étrangères, l’anglais et le français notamment, pour tisser des liens, pour communiquer entre les peuples. »

Si vous passez près de l’École de Natacha…
S’ensuivront des présentations, des vidéos, des jeux, des quiz… ils se sont bien amusés et ont beaucoup appris. Puis le moment est arrivé de rejoindre la Résidence de France, sur les bords du fleuve Chao Phraya. Le temps d’une danse traditionnelle proposée par quelques jeunes filles de l’école et le goûter tant attendu leur a été servi. Une journée solidement remplie et instructive, à laquelle allait succéder, le lendemain, la journée parc d’attraction. Laquelle restera gravée dans leurs mémoires ? Ils auront eu des heures pour rêver de l’une et de l’autre, le temps de leur long trajet de retour en bus vers leurs villages. Si vous passez près de l’École de Natacha, allez leur dire bonjour. Sachez enfin qu’Élisabeth Zana ne dit jamais non à un nouveau sponsor ou un nouveau parrain. Il y a tant à faire pour ces enfants.
Pour suivre la vie de l’école et de l’association :
À lire :

« Natacha School, les 20 ans »
Soukha éditions
Disponible en format numérique, sur fnac.com, à la librairie Carnets d’Asie de Bangkok
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