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VOIX & SAVEURS DE FEMMES D’ISRAËL - Anna Amiel: le tissu, trame de vie

Anna AmielAnna Amiel
Crédit photo : Gal Shukroon
Écrit par Raphaëlle Choël
Publié le 29 novembre 2020

Volubile, tonique, saine et enjouée, ce qui vient à l’esprit quand on rencontre Anna ce sont les caractéristiques  de la chic fille qui respire la simplicité et l’intelligence du cœur. D’une mère suédoise et d’un père français, elle garde, à l’image des meubles qu’elle façonne, ce chic épuré des lignes nordiques.

Pantacourt, basket et chemisier féminin, Anna nous reçoit tout sourire dans le sud de Tel-Aviv, dans son domaine de Kyriat Ha Melakha, le quartier des artisans en hébreu, où elle est installée depuis 2015. Un coin de Tel Aviv bouillonnant et créatif, particulièrement prisé par les architectes, designers et les bobos de la ville.

Née en Ardèche à Lablachère, elle quitte la France à neuf ans pour la Suède à Lund près de Malmö, où elle restera jusqu’à ses quinze ans avant de retrouver sa France natale et la capitale parisienne. Anna est une passionnée et voue un amour incommensurable pour le meuble, le « beau meuble » aime-t-elle à préciser, elle qui a grandi dans une famille et dans le monde des antiquaires, des ébénistes et des chineurs inépuisables. Une école de mode à Paris au Studio Bercot et l’école d’art Nathalia Nesterova plus tard à Moscou en poche, Anna multiplie les expériences dès le plus jeune âge : intermittente du spectacle, elle conçoit des costumes et décors pour le théâtre et la Comédie française, travaille pour la Maison Thierry Mugler, réalise de nombreuses sérigraphies pour tissus et confectionne des marionnettes pour les parades de Disney.

Aujourd’hui, dans son atelier-showroom-boutique-bureau de Tel-Aviv, elle propose une gamme de tissus et de coussins et quelques pièces de mobilier faites sur-mesure afin que les architectes et les clients qu’elle reçoit puissent se faire une idée des trésors qu’elle a à offrir. Ce qu’elle aime avant tout, c’est l’idée de partir de zéro. « Je suis une assemblière et fabricante de meubles ». Sa spécialité, c’est le canapé design, mais elle excelle tout autant dans la création de tapis, rideaux, tables et autres coussins et accessoires. Elle propose également un service de « furniture hunting », ce qui signifie que les clients passent commande d’une belle pièce dont ils rêvent et elle se met en ébullition pour le dénicher. Anna a également une âme de voyageuse, elle affectionne tout particulièrement l’Italie pour ses beaux tissus, des tissus rares, des tissus qui ont du corps et du caractère qu’elle aime rapporter dans sa besace. Matériaux texturés, tons purs et naturels, camaïeux de bleus, lignes simples et élégantes, Anna aime jouer avec l’espace et les contraintes parfois imposées par un projet : « les projets les plus excitants sont souvent ceux où il n’y a pas beaucoup de moyens ou quand on me confie un espace restreint qu’il s’agit d’optimiser au mieux tout en conservant une exigence d’esthétique ».

Et à l’image d’une bague que l’on créée en association avec un joaillier, Anna aime réfléchir avec ses clients, les faire toucher les matières, décrire leur univers et ce qu’ils aiment. Anna n’est pas une designer d’intérieur car elle ne touche pas aux murs, précise-t-elle ; elle se décrit plus volontiers comme décoratrice et designer de meubles. Elle confie vouer une affection toute particulière pour les canapés avec pied, « c’est mon côté scandinave que j’aimerais d’ailleurs développer ici. Mon rêve serait de faire du meuble scandinave israélien ». Mais ici, les repères et la culture sont si différents que cela nécessitera un temps d’éducation de la population pour l’inviter à apprécier les finitions, et la délicatesse du travail d’artisan. « J’aime le travail fait main et j’aime mettre en valeur le travail d’artisan. Mon vrai défi ici est de faire passer cet amour pour le travail raffiné ».

Entrepreneure et Maman

Anna a 47 ans mais en paraît une bonne dizaine de moins tant elle respire la fraîcheur de vivre. Elle aime à dire qu’elle a commencé sa carrière à quarante ans : avant cela elle se consacrait surtout à sa famille et à sa vie d’expatriée. Avec Sam, son mari américain rencontré à 24 ans à l’oulpan# alors qu’ils faisaient tous les deux leur alya, ils ont trois enfants adolescents, Eli, Raphaël et Clara. Sam travaille pour l’ONG Joint, qui a pour mission de subvenir aux besoins de tout Juif en difficulté, où qu’il soit dans le monde. Il peut s’agir de formation, d’assistance médicale, de création d’une maison de retraite ou tout autre aide dont pourrait avoir besoin un membre de la communauté. C’est dans ce cadre qu’il a été envoyé à Kiev et à Moscou en 2001 pour apporter une aide alimentaire à une population en détresse. Leur benjamine y est née, les grands ont été scolarisés à l’école locale russe, la famille est ensuite partie à Washington pour le MBA de Sam, avant de rentrer définitivement au pays.

La passion des tissus fait voyager Anna qui conserve une affection très particulière pour la Russie. « A chaque endroit où je vais je cherche la culture du tissu du pays. J’ai découvert en Russie que c’était le lin ». C’est ainsi qu’à côté de Moscou elle découvre une petite usine de confection qui coud du lin tissé en Biélorussie. Pleine d’une énergie qui lui ressemble, Anna se lance avec passion dans la production et la commercialisation d’une ligne de linge maison secondée de petites datchas qui opèrent dans leur atelier affublé de posters soviétiques, piano et autres objets caractéristiques de la culture russe. La collection de draps en lin fait fureur et est immédiatement vendue avec succès aux Etats-Unis. « Partout où je vais je trouve toujours un moyen de travailler avec le tissu. La trame de ma vie et de mes voyages, c’est le tissu ». Pas évident d’avoir une activité professionnelle quand on est Maman à Moscou car il existe peu de structures pour accueillir les enfants de moins de trois ans. Avec deux petits alors âgés de 6 mois et 1 an et demi, Anna avait donc embauché une nounou afin de pouvoir rester active et surtout assouvir sa soif de culture locale. Artiste à toute heure, Anna a immédiatement l’idée de créer et d’animer un groupe avec d’autres mères. « Tous les lundis, on se retrouvait et on allait dessiner dans la rue. Nos rencontres se faisaient toujours autour du tissu et du dessin ». Grâce à ces initiatives, Anna et ses amies arpentent les rues de la ville et parcourent le pays à la recherche d’usines de lin ou d’expériences locales chez l’habitant. « J’aime aller chez les gens, on apprend beaucoup quand on a la chance de pénétrer l’intimité des Russes, au-delà des institutions. »

 

Aujourd’hui, entre sa famille et sa vie d’entrepreneure, Anna est une femme comblée qui vit à mille à l’heure puisqu’elle doit mener de front sa vie familiale et une vie professionnelle dans laquelle elle est seule à assumer toutes les tâches de création, de production, le lien entre le client et l’artisan, le développement commercial, tout en assurant sa communication. « Mes enfants sont fiers de moi et de l’image que je leur renvoie de devoir toujours se surpasser et foncer pour accomplir son rêve. Je pense que je suis un bon exemple pour eux, les vertus de l’entrepreneur c’est d’aller au bout de ses idées et de créer même quand les choses n’existent pas. Je suis une «pusheuse » et je crois que c’est ce qu’il faut pour survivre dans le monde actuel. Je crois aussi qu’ils sont ravis que je ne sois pas tout le temps à la maison moi qui y étais en permanence pendant leurs jeunes années ! »

Une vie internationale, riche et intense qui bouillonne, à l’image des trois langues parlées au sein du foyer, l’anglais, le français et l’hébreu. « C’est du tutti frutti chez nous : on parle tous toutes les langues. Je sais que ce n’est pas forcément recommandé mais c’est comme ça qu’on fonctionne et cette vie nous ressemble ! »

Anna incarne une belle force de vie et de créativité qui font d’elle une femme énergique et pétillante qui déborde autant de curiosité que d’une authentique générosité. Un exemple de femme qui inspire et donne envie de s’ouvrir et d’apprendre chaque jour un peu plus.

NDLR : L’oulpan signifie studio en hébreu, il s’agit d’un lieu de formation et d’apprentissage de l’hébreu offert à tout Juif arrivant en Israël pour y faire son alya. L’oulpan est également ouvert à un expatrié non Juif qui devra alors le financer à titre personnel.

 

La Recette d'Anna : les Kanelbullar

Si Anna n’a pas reçu de réel héritage culinaire de sa Maman, elle conserve néanmoins dans son cœur et dans ses tablettes de bonne cuisinière ces brioches suédoises à la cannelle. Un petit gâteau très affectif que sa Maman lui faisait et qu’elle a transmis à ses enfants. Véritable madeleine de Proust, elle leur prépare dès qu’ils ont besoin de réconfort ou lorsqu’ils sont malades.

Ingrédients :

Pâte à pain : 2.5 tasses de lait, 1.5 tasse de beurre fondu, 1 tasse de sucre, 1 cuillère à café de sel, 2 cuillères à café de cardamome fraîchement moulue (obtenues à partir d’environ 25 capsules de cardamome), 2 paquets de levure sèche active (4.5 cuillères à café), 8 à 9 tasses de farine.

Remplissage : 2 cuillères à soupe de cannelle, 2 ou 3 tasses de sucre, un tiers de tasse de beurre fondu.

Finition : 1 œuf plus 2 cuillères à soupe d'eau, le tout légèrement battu.

 

Préparation :

Préparez votre pâte à pain cardamome en mélangeant tous les ingrédients de la pâte à pain puis recouvrir d’un linge humide et laisser reposer environ 1h30.

Retirer la pâte du bol et pétrissez-la légèrement sur le comptoir fariné jusqu'à ce qu'elle soit lisse et brillante. Diviser la pâte en deux moitiés.

Rouler chaque moitié de pâte dans un rectangle. Badigeonner chaque rectangle avec du beurre fondu. Mélanger 2 tasses de sucre et 2 cuillères à soupe de cannelle. Saupoudrer uniformément sur les deux rectangles. Rouler chaque rectangle pour former un long cylindre.

À l'aide d'un couteau tranchant ou dentelé, couper chaque cylindre en 20 tranches égales. Disposer chaque tranche dans un emballage en papier cupcake et déposer sur une plaque à pâtisserie. Couvrir avec une serviette et laisser doubler de taille, environ 45 minutes. Préchauffer le four à 220°.

Badigeonner les roulés de cannelle avec le bain d'œuf et saupoudrer de sucre perlé et / ou d'amandes.

Placer au milieu d'un four préchauffé et cuire pendant 7 minutes ou jusqu'à cuisson complète.

Recette

INFORMATIONS :

www.annahome.co.il 

www.facebook.com/annafabricsandfurniture/

www.instagram.com/annaamiel/

Showroom : Shvil Ha Meretz 2 – Tel Aviv

Tél : 054 567 0752- annaamiel@yahoo.com

 

 

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