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PORTRAIT- Adit LAADAN, une grande âme d’artiste céramiste

Adit LaadanAdit Laadan
Écrit par Raphaëlle Choël
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 15 octobre 2017

Enigmatique, magnétique, d’un mysticisme envoûtant, la belle israélienne au regard franc et à la crinière ébène reçoit dans sa maison où elle vit depuis 25 ans. Elle évolue entourée de ses œuvres d’art : vases et céramiques colorés affublés de tissus et de pompons qui rappellent ses origines iraniennes, statues et sculptures d’animaux et galets gravés de mots choisis à l’or fin.

Une enfance israélienne

Aujourd’hui âgée de 54 ans, la belle Adit est née en Israël à Herzliya non loin de sa demeure actuelle. Calme, volupté, contemplation, douceur et joie de vivre, voici ce qui se dégage de cette maison haute en couleurs et à l’âme vive dont on sent la richesse de l’histoire. De ses parents, tous deux nés en Iran à Machhad et Ispahan, et arrivés en Terre Sainte à l’âge de 4 et 15 ans respectivement, elle garde ce charme mystérieux et une indéniable force intérieure. Elle connaît une enfance relativement heureuse, entourée de ses deux frères Udi et Amit Bechor et de ses parents avec lesquels ils ne parlent que l’hébreu. Ses origines iraniennes, pays dont elle n’a jamais foulé la terre, restent timidement assumées en société : « je refusais d’être différente, je ne voulais ni écouter, ni parler iranien ».

A l’âge de 11 ans, période généralement marquée par l’insouciance, la maman d’Adit tombe gravement malade. Atteinte d’un cancer, elle décèdera 7 ans plus tard, laissant néanmoins derrière elle un riche héritage artistique. « Ma mère peignait, cousait et faisait mille choses à partir de textiles, elle travaillait également le cuivre ; elle était très soignée et féminine, c’était aussi une excellente cuisinière. Enfant, je l’aidais beaucoup : je coupais et je cousais à ses côtés, c’est là que mon âme d’artiste s’est peu à peu dessinée puis affirmée et affinée. »

De son enfance, Adit évoque un monde intérieur riche et actif dès le plus jeune âge.       « Je parlais avec les animaux, les fées, la nature… je lisais beaucoup d’histoires originales ou décalées. Je me souviens d’ailleurs que pour me présenter à l’Université et dire devant la classe qui j’étais, j’ai pris tous les livres insolites que je lisais enfant : une autobiographie d’Einstein, un manuel de psychiatrie ou de psychologie sur l’éducation des enfants. Très précoce, je lisais ces ouvrages depuis l’âge de 8 ans, je me souviens même avoir donné des conseils à ma mère sur la façon de nous élever ! ».

Adit a conservé cette vie intérieure et une grande spiritualité. Elle s’est d’ailleurs formée au human design, cette discipline humaniste qui propose une cartographie de l’être psychique, psychologique et émotionnel d’une personne afin de la guider vers ses bons choix de vie. Thérapeute à ses heures, elle reçoit  ses patients en consultation dans son petit cabinet aux tons bleutés.

Portrait

Inspiration, création et réappropriation du corps

Les journées d’Adit ne se ressemblent pas. L’artiste voyage régulièrement et quand elle est en Israël, elle vit à son rythme biologique, toujours à l’écoute de son corps. Réveil au petit matin vers sept heures, elle s’installe à sa table dehors pour un instant de méditation et de prières. Elle pratique l’oponopono, une technique de méditation hawaïenne qui repose sur les concepts de réconciliation et de pardon ; ces instants lui permettent de se ressourcer, de se reconnecter et de se régénérer. Elle boit de l’eau citronnée puis part marcher une heure le long de la plage, dans la rue ou plus naturellement là où la guident ses pas. Tout comme elle a décidé de ne plus consommer de viande ni de lait, Adit a choisi d’arrêter d’écouter les informations et d’allumer la télévision. « Je décide de ce que je mange, et donc également de ce que je souhaite écouter et entendre et des personnes avec lesquelles je souhaite passer du temps », explique-t-elle avec un naturel désarmant.

Adit se laisse guider par son corps, un allié de choix qui lui dicte tout et en lequel elle puise sa confiance. C’est d’ailleurs le message qu’elle cherche à transmettre aux élèves qui suivent ses cours. « Ma mission est d’essayer d’inspirer et d’éveiller les gens à la pleine conscience, les faire toucher et sentir la beauté, la joie et l’amour qui les entoure. En un mot, les inviter à vivre une vie meilleure. » Connecter les gens à leur corps, et non uniquement à leur esprit car « travailler exclusivement avec son esprit ne peut que mener au désastre. En revanche, si l’on s’entraîne à écouter son corps, on obtient toutes ses réponses. Le talent, c’est d’affiner cette acuité. » Et c’est cette finesse d’appréhension du corps et de ses besoins qui lui permet de trouver son inspiration et de créer. C’est d’ailleurs l’expérience qu’elle a faite en Slovénie en 2016 lorsqu’elle a laissé son corps parler et que ses mains l’ont amenée à dessiner et utiliser la peinture, une technique qu’elle avait délaissée depuis plus de 20 ans. « Je n’avais aucun agenda pour ce séjour, j’ai laissé mon corps me guider. Un jour c’est sorti tout d’un coup, c’est ainsi que chaque matin je me suis mise à peindre tout en prenant mon café : un chien, un oiseau, un loup… je me suis ainsi laissée porter avec délice pendant plusieurs jours avec une infinie douceur. »

Adi a commencé à travailler tardivement la terre cuite, il y a tout juste 17 ans. Lors de ses études d’art à la Midracha Art school de Ramat Hasharon, elle avait surtout étudié la peinture car elle n’affectionnait pas particulièrement la 3D. Mariée à 22 ans, deux enfants, et une vie de femme au foyer qui lui laisse peu de temps pour une vraie carrière, Adit se met à travailler en freelance pour la mode, en tant que scénographe, design d’intérieur et consultante en colorimétrie. C’est à ce moment-là qu’elle découvre et apprivoise la 3D et laisse peu à peu pénétrer en elle le monde de la terre cuite et de la céramique.

Plus récemment, elle s’est découvert une passion pour les animaux ; elle les travaille en les accessoirisant de petits tapis, pompons ou or fin selon l’inspiration du moment. Toujours en prise avec son monde intérieur, Adit rappelle volontiers le caractère thérapeutique de la céramique et note avec joie la fascinante évolution des étudiants qu’elle suit depuis bientôt 15 ans.

Une vie de voyages et de projets

Si le but ultime d’Adit est de voyager pour s’inspirer et créer, au rythme de ses rencontres et de ses visites, l’artiste n’en conserve pas moins une magnifique facette philanthropique. Son prochain projet se situe dans le village de Kefar Karmia, à 70 kilomètres de Tel-Aviv : elle participe à mettre en place une structure pour des jeunes filles âgées de 12 à 18 ans ayant subi des violences sexuelles. Dans un idéal humaniste et thérapeutique qui lui ressemble, elle y offrira un projet autour de la céramique pour aider ces jeunes femmes abîmées par la vie à s’exprimer avec leurs mains et leurs corps, plutôt qu’avec le verbe. « C’est un excellent point de départ pour amorcer un travail de guérison, cela les encourage à évoquer leur monde intérieur tout en renforçant leur confiance en soi. »

Son grand rêve serait de s’offrir le luxe de ne se concentrer que sur la création : exposer, vivre avec et de son art, voyager, explorer, continuer de se nourrir de nouveaux horizons spatiaux et humains. Et puis, toujours, aller à la rencontre de l’Autre pour se reconnecter encore davantage avec elle-même…

Symbolique et lâcher-prise

Dans sa maison, les œuvres se racontent tout comme elles racontent symboliquement l’histoire de leur créatrice. Côté jardin, deux statues à taille humaine : un homme et une femme. Mais à l’origine, s’il s’agit bien de cette même femme, il y avait un autre homme. Cet homme, Adit l’avait créé avec son ex-mari il y a de nombreuses années. Le couple de céramique avait alors toute sa place à l’intérieur, côté salon. Et puis un jour Adit décida de les sortir sur la terrasse. A la première intempérie la version masculine fut prise d’un coup de vent tel, que la statue ne résista pas. La femme, elle, avait tenu le choc. Peu de temps après, le mari d’Adit quitta la maison, laissant derrière lui femme et enfants. Ce n’est que rétrospectivement qu’elle identifia le caractère ultra-symbolique de l’événement. Depuis, elle a ressorti la femme, et puis récemment, ne trouvant pas de relation durable avec laquelle s’épanouir, elle a décidé de créer son « âme sœur », un homme qui tient en ses mains un bol indiquant 428 Hz, la fréquence de l’amour. « J’ai créé cet homme en attendant celui qui viendra sur ma route. »

Adit ne travaille qu’à l’intuition. « Si j’ai l’image d’un oiseau, je le laisse s’exprimer. Je pétris la terre et la laisse elle aussi s’exprimer. La terre a quelque chose à dire. Dans la vie c’est pareil, on a beau avoir des projets, il faut savoir rester à l’écoute et être réceptif. Ainsi, un oiseau imaginé peut finalement donner forme à un chien pendant le processus de création. C’est exactement ce message que j’essaie de transmettre à mes élèves. Je les invite à ne pas rester bloqués avec une idée qui les enferme. »

Let it be, just let it be, répète-elle dans la langue de Shakespeare avant de prendre congé avec cette douceur, cette sincérité et cette grâce qu’on lui envie secrètement.

 

LA RECETTE d’ADIT: le Gondi, une version iranienne du Tchulent juif

Adit est aujourd’hui végétarienne, elle nous livre cependant sans hésiter cette recette qui lui rappelle son enfance et qui évoque de tendres moments passés en famille.

Ingrédients : 1 kilo de viande hachée, un verre de riz préalablement rincé. Un verre de haricots blancs, un verre de pois chiches. 10 œufs, 4 oignons, 6 pommes de terre, 8 ailes et cuisses de poulet. Epices : curcuma, cumin, sel et poivre.

Préparation : mélanger la viande hachée avec le riz et les épices et en faire des boules. Mettre au réfrigérateur une nuit. Faire également tremper à les haricots blancs et les pois chiches pendant 12 heures. Le matin suivant, faire frire les oignons, y ajouter le poulet avec la peau, les pois chiches, les haricots blancs, les boulettes de viande, les pommes de terre épluchées et les œufs avec leur coquille.

Couvrir avec de l’eau, ajouter du cumin, du curcuma, du sel et du poivre. Laisser mijoter une heure dans la casserole puis enfourner à 150 degrés pendant une nuit entière (baisser à 100 degrés au moment de se coucher). Servir avec  du riz et une salade verte.

Portrait

INFORMATIONS :

www.aditlaadan.com / adit3886@gmail.com - Téléphone : 054 560 50 88

Raphaëlle CHOËL (www.lepetitjournal.com/tel-aviv)

raphaelle choel
Publié le 15 octobre 2017, mis à jour le 15 octobre 2017

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