Dans la perspective des prochaines élections législatives, lepetitjournal.com est allé à la rencontre des candidats. Yael Lerer, candidate de la NUPES pour la 8e circonscription, a répondu à nos questions.
Après de nombreuses réclamations de la candidate LREM Deborah Abisror-de Lieme, l'élection de Meyer Habib (LR) a finalement été annulée par le Conseil constitutionnel. Les Français résidant en Israël, Italie, Grèce, Turquie ou Malte voteront donc sur place au premier tour le dimanche 2 avril et le deuxième le dimanche 16 avril. En ligne, les votes se dérouleront plus tôt, du 24 au 29 mars pour le 1er tour et du 7 au 12 avril pour le 2e.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots?
Je suis née et j'ai grandi à Tel Aviv, puis j'ai été naturalisée française en 2016. Engagée, depuis l'âge de 12 ans, dans la lutte contre les inégalités, je suis une militante de terrain et d'action, issue de la société civile. Je suis, comme beaucoup de Français à l'étranger, cosmopolite et polyglotte. Je maîtrise le français, l'hébreu, l'arabe et l'anglais. Ce cosmopolitisme définit également mon mode de militantisme. J'ai en effet porté ma lutte contre les inégalités au sein de deux mondes. D'une part, au sein du monde de la culture, en créant la maison d'édition Andalus (qui vise à rendre accessible la littérature arabe en hébreu). Et d'autre part, au sein du monde de la politique, entre autres, en tant que cofondatrice du parti Balad, pour lequel j'ai été porte-parole et collaboratrice parlementaire. Du fait même de ce perpétuel mouvement entre différents espaces géographiques, sociaux, professionnels et politiques, je pense donc refléter les parcours de vie des Français à l'étranger.
Pourquoi avez-vous souhaité vous présenter aux prochaines élections législatives ?
Je veux me présenter pour deux principales raisons.
La première est que, en tant que personne ayant été naturalisée française il y a quelques années, je sais à quel point les parcours de migrations, d'hybridations territoriales et culturelles sont lourds à porter administrativement. Il y a toujours de nouveaux défis à relever. Je veux donc proposer une candidature binationale innovante : celle d'une personne concernée proposant un regard nouveau sur les problématiques d'immigration, d'intégration et de solidarité internationale.
La seconde, c'est que la 8ème circonscription est une circonscription qui a été "kidnappée", depuis le début de son existence, par les précédents élus. Le plus souvent, les précédents élus à la 8ème circonscription se sont faits les portes paroles de gouvernements israéliens d'extrême droite. Je veux donc porter et appliquer les valeurs de la République - d'égalité, de liberté et de justice - là où les Français se trouvent : qu'ils résident au sein du territoire national français, ou en dehors.
Quel est votre rapport avec cette circonscription ?
J'ai toujours été sensible aux problématiques de justice sociale, environnementale et migratoire relatives aux sociétés méditerranéennes. J'ai en effet beaucoup d'amis, de connaissances et de partenaires de luttes issus de milieux différents, et vivant dans les pays de la 8ème circonscription. Particulièrement en Italie, Grèce et Turquie.
En quoi votre parcours est-il marqué par les préoccupations des Français de l'étranger ?
J'ai moi aussi été confrontée - du fait de mon propre parcours migratoire - à la multiplicité des allers et retours administratifs marquant la vie d'une personne située dans cet entre-deux politico-administratif, social, et culturel. Je sais à quel point il peut être difficile et drainant d'être plongé-e dans l'incertitude, les non-réponses, et la sensation de parfois se situer dans un long tunnel sans horizon. Ayant moi-même vécu cette expérience, je veux investir mon temps et énergie, mon expérience personnelle et professionnelle, au profit des personnes se trouvant dans une situation semblable à la mienne. Plus globalement, je veux lutter pour la liberté de circulation des personnes, et non seulement des marchandises. Je veux que chacun puisse exercer son droit de s'installer ailleurs et d'y revenir sans obstacles administratifs.
Comment voyez-vous le mandat de député ?
Pour moi, le rôle d'une députée est d'être au service des citoyens de sa circonscription - quelles que soient leurs appartenances - tout en défendant les convictions politiques pour lesquelles elle est élue. Ma candidature propose donc aux citoyen-ne-s français d'œuvrer ensemble pour l'égalité, la liberté, la justice. Je considère qu'il est de la responsabilité d'une députée (plus particulièrement des Français-es à l'étranger) de persévérer à faire appliquer le modèle français de l'État de droit, de la culture, de la terre d'asile, de la sécurité sociale, de la retraite, du logement social et de l'insertion à l'ensemble des Français ; et ce, où qu'ils se situent. Enfin, la députée des Français à l'étranger se devra, tout particulièrement, de garder en tête la spécificité de la position interstitielle dans laquelle se trouvent ses électeurs. Situés entre plusieurs réglementations nationales, et souvent désemparés en raison même de ces zones d'ombres administratives, la députée des Français à l'étranger se devra d'être spécifiquement à l'écoute des défis uniques auxquels se confrontent les citoyens qu'elle représente.
Quels sont, selon vous, les défis qui attendent les Français de votre circonscription ?
Les Français de la 8ème circonscription doivent s'attendre à faire face à de solides enjeux sociaux, écologiques, et migratoires. Et ce, en raison du carrefour d'échanges et de circulations qu'ont historiquement constitué les espaces Méditerranéens. Du fait même de ces défis, les citoyens de cette circonscription méritent une députée qui saura prendre à bras le corps, et porter avec résilience, la fidélité au droit international, aux mouvements de solidarité transnationaux. du modèle social français (et ce, en dépit des attaques répétées du gouvernement). Plus que tout, les citoyen-ne-s de la 8ème circonscription méritent une députée qui saura se battre pour une République sociale, incorporant parmi ses priorités le droit au bien-être et au bonheur de tous-tes.
Comment est organisée votre campagne et qui sont vos soutiens ?
La campagne se déroule dans un contexte politique marqué par le débat sur les retraites en France et qui mobilise naturellement et à juste titre l’opinion au regard de l’importance de l’enjeu.
L’autre difficulté est évidemment de mener une campagne “non territoriale” et dans plusieurs pays de la circonscription qui présentent des enjeux assez communs pour les français qui y vivent mais souvent très spécifiques.
Il faut dans ces conditions être bien organisé tout en redoublant de créativité. J’ai la chance d’avoir autour de moi une équipe soudée, répartie dans les différents pays de la circo, multiculturelle, formée par des jeunes très engagés et d'autres qui ont une expérience inestimable.
Par ailleurs, très rapidement beaucoup d’ami-e-s ont compris le sens de mon engagement dans cette campagne et m’ont apporté leur soutien et je suis fière aujourd’hui de compter parmi mes soutiens : Annie Ernaux, Christiane Taubira, Naomi Klein, Ken Loach, Leila Shahid, Eva Illouz, ou encore Razmig Keucheyan.
Quels sont les axes de travail que vous souhaitez mener à bien si vous êtes élue ?
Une fois élue, je m'engagerai à lutter pour la facilitation de l'amélioration des conditions de vie des Français à l'étranger.
Je lutterai en faveur d'une facilitation de l'accès aux écoles françaises, et à tout autre service administratif, depuis les pays de la circonscription. Je travaillerai à améliorer les services consulaires, et à fluidifier les démarches de retour en France. Consciente des multiples réformes d'imposition en cours, je travaillerai pour la justice fiscale, en particulier à l’accélération de la ratification par la France de la convention fiscale avec la Grèce, pour les droits à la retraite, pour l'augmentation du budget et le renforcement de la protection sociale. Je m'engagerai, quoi qu'il en soit, à être à l'écoute de tous les sujets du quotidien qui concernent les Français à l'étranger.
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