Khoo Swee Chiow est un personnage de légende pour les férus d’alpinisme et d’aventure en Asie du Sud-Est. Il a gravi les sept plus hauts sommets du monde : trois fois l’Everest mais aussi « la montagne sans pitié » : le K2 au Pakistan… Il a battu le record mondial de plongée sous-marine en 2005, restant sous l’eau 220 heures et celui du plus long voyage en rollers en 2007-2008, réalisant en 94 jours, un parcours entre Hanoï et Singapour de 6 088 km. Il est devenu depuis 2001, un aventurier à plein temps en organisant des voyages de rêve pour les « mordus » d’aventure et de sports extrêmes.
Quel parcours vous a mené à devenir un professionnel de l’aventure ?
Khoo Swee Chiow : Après avoir passé mon enfance en Malaisie, j’ai étudié l’informatique à Melbourne. Je me suis installé à Singapour pour y démarrer ma carrière professionnelle. Cinq ans plus tard, j’ai commencé à escalader des montagnes en Malaisie, en Indonésie, jusqu’à ce que je gravisse l’Everest en 1998. Cette ascension a changé ma vie. A ce moment-là pour moi le rêve a commencé. En 1999, j’ai préparé une équipe à une expédition au pôle Sud et ce succès m’a donné le déclic. J’ai décidé en 2000 de quitter mon poste dans l’IT chez Singapore Airlines pour faire de l’aventure mon emploi à plein temps.
En quoi consiste votre activité?
En janvier 2001, j’ai créé ma société Dare to Dream dont l’objet est d’organiser des voyages d’aventure. L’alpinisme représente une majeure partie de ces excursions. Le concept est d’aiguiller le client-voyageur dans tout le processus du circuit : l’entraîner, l’aider dans ses achats de matériel, le guider sur place lors de l’exploit sportif, le coacher….
Je pratique plusieurs sortes d’entrainement, dont le trekking et l’escalade. Ces entraînements peuvent se faire à Singapour, en extérieur ou en intérieur, mais aussi dans d’autres pays comme la Malaisie. En une année, je prépare six à sept voyages. Cela va de l’ascension du Kilimandjaro à l’Everest. J’entraîne aussi des groupes ayant des demandes spécifiques en escalade ou autre sport spécifique. Je transmets également mon expérience par le biais de conférences, j’aime partager mes rêves et aider les autres à réaliser les leurs. Ma clientèle venant de Singapour, de Malaisie, de Thaïlande, d’Indonésie, du Vietnam, du Cambodge, des Etats-Unis, de France… est composée à 50% d’hommes et à 50% de femmes. Ils sont, pour la plupart, âgés de 40, 50 ans et parfois retraités. Pour réaliser ce type de voyages : il faut de l’argent, du temps (suffisamment de congés) et des enfants assez grands.
Quels sont vos principaux exploits sportifs ?
J’ai gravi l’Everest pour la première fois en 1998. Une deuxième fois en 2006 et une troisième fois en 2011, en passant cette fois-ci par la voie Nord du sommet : le côté Tibet (l’autre voie très empruntée étant la voie Sud, côté Népal).
Je suis allé en expédition au pôle Sud en 1999.
En 2000, j’ai terminé mon ascension des sept plus hauts sommets du monde.
En 2001-2002, j’ai fait une expédition au pôle Nord.
L’accomplissement de ces divers exploits m’a classé parmi le cercle restreint des Explorers Grand Slam.
De 2003 à 2009, je me suis focalisé sur des exploits autres que ceux de la montagne :
En 2003, j’ai réalisé à vélo la distance de 8 066 km entre Singapour et Pékin en 73 jours.
En 2004, j’ai traversé à la nage le détroit de Malacca soit 40 km en 22 heures.
En 2005, j’ai réalisé le record mondial de plongée sous-marine de 220 heures.
En 2007-2008, j’ai réalisé le record mondial du plus long trajet en rollers de 6 088 km entre Hanoï et Singapour.
En 2008-2009, j’ai parcouru en kayak les Philippines du Nord au Sud de Sarangani à Pagudpud.
En 2012, j’ai gravi le K2 au Pakistan, certainement le sommet le plus technique et le plus difficile du monde à atteindre.
Quelle est votre motivation pour réaliser tous ces défis et quels sont les prochains ?
J’aime le sport, j’aime les voyages, j’aime les challenges combinant ces deux éléments. Les sports extrêmes sont tellement excitants. Les montagnes sont magnifiques, l’air y est pur, les paysages somptueux. C’est l’occasion de partager des moments exceptionnels entre amis ou avec une équipe.
Je vais à nouveau gravir l’Everest en 2020, avec une équipe que je prépare. Il y a, par ailleurs, encore beaucoup de montagnes à explorer. J’aimerais traverser un désert, un océan…
J’aimerais également parcourir à vélo la distance Pékin-Paris.
Cette activité est-elle conciliable avec une vie de famille ?
Mon épouse est alpiniste également. Elle comprend mon activité et l’ardeur qui me motive. Elle a confiance en mon jugement et elle sait que si j’identifie un danger, je saurai prendre la décision de faire demi-tour. J’ai deux enfants : un garçon de 16 ans et une fille de 13 ans. Ils aiment tous les sports, mais pas l’alpinisme.
Suivez-vous un régime particulier et pensez-vous continuer longtemps cette activité ?
Non, je mange de tout. Je ne bois pas et ne fume pas, pas parce que je me l’interdis, mais parce que mes parents ne le faisaient pas et j’ai adopté ce même comportement. Je ne recommande pas de régime particulier à mes clients : une alimentation équilibrée est parfaite.
L’escalade est un sport d’endurance. Il n’est pas question de vitesse ou de puissance. C’est l’apprentissage de rester en vie en montagne, d’éviter, de contourner le danger. Il s’agit pour moi d’un style de vie. Je pense donc pratiquer cette activité encore longtemps.
Quelle est votre plus grande fierté ?
J’ai réussi à me reconvertir professionnellement. Prendre la décision de quitter mon emploi pour créer ma société fut une décision très importante dans ma vie. Financièrement, c’était un pari sur l’avenir.
Je suis également très fier d’avoir mené mes différentes expéditions dans la sécurité. Je suis fier d’aider les autres à réaliser leurs rêves et de les guider dans leurs préparations.
Etes-vous investi dans des causes humanitaires ?
Je ne suis pas spécialement investi dans une cause, mais je m’intéresse beaucoup au réchauffement de la planète. Mes voyages réguliers me permettent d’observer l’évolution des glaciers. Je me rends, par exemple, chaque année au Kilimandjaro, la fonte des glaciers y est évidente. Ils deviennent de plus en plus petits. La mer de glace à Chamonix connait le même phénomène. J’aime partager ces constats avec les médias et mettre en alerte l’opinion sur ces dégradations climatiques.