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Aubin Huret – Du Port Parfumé à la Cité du Lion, en passant par le pays d’Annam

Aubin HuretAubin Huret
@ Anne Valluy
Écrit par Dominique Langlois
Publié le 9 juin 2021, mis à jour le 11 juin 2021

Arrivé en Asie avec ses parents à l’âge de 2 ans, Aubin Huret a passé 15 années à Hong Kong jusqu’au Bac au Lycée Français International, avant de poursuivre ses études supérieures à Londres, à SOAS puis LSE. Passionné de Chinois il fait un crochet universitaire par Pékin, du volontariat au sein de PN aux Philippines, des stages à l’ADB et à l'IFC au Vietnam. Après l’OCDE à Paris, il répond à l’appel de l’Asie en rejoignant la société IIX à Singapour, spécialisée en Impact Investment. Il retourne aujourd’hui dans sa ville d’enfance, Hong Kong, pour Vigeo Eiris, division ESG (Environmental Social Governance) de Moody’s.

 

Aubin, quel est votre parcours ? Qu'est ce qui vous a amené en Asie ?

Ce qui m’a amené en Asie ?… Un landau dans un vol Air France vers Hong Kong ! J’avais 2 ans, alors je crois vraiment que je n’y suis pour rien ; ça devait être mon Karma ! C’était en décembre 1996, 6 mois avant la rétrocession à la Chine, mes parents ont emménagé à Hong Kong, Discovery Bay. Ce sont mes premiers souvenirs avec des gens qui se déplacent en golf cart, prennent le ferry pour aller à Central. J’ai commencé ma scolarité dans une école anglo-cantonaise, puis j’ai rejoint le Hong Kong French International School (HKFIS) et j’y suis resté jusqu’au Bac, section orientale. Mes 3 petites sœurs, Philippine, Léonore et Marguerite, sont nées durant notre séjour à Hong-Kong.

Après le Bac obtenu en juin 2012 sur cet ancien îlot britannique d’Asie, je suis naturellement parti en Angleterre... J’ai rejoint SOAS (School of Oriental & African Studies) à Londres, l’école de Lord Wilson ancien gouverneur de Hong-Kong et de Aung San Suu Kyi. Ce fut une expérience exceptionnelle, où j’ai pu étudier le business management, approfondir mon Chinois et surtout m’éveiller à la politique internationale. SOAS est très engagée et je garderai toujours le souvenir du bruit des tambours et des chants des élèves marchant dans les rues pour manifester contre certaines injustices. Plus tard, je suis parti en Master à LSE (London School of Economics and Political Sciences), où j’ai énormément travaillé, mais je n’ai pas retrouvé l’âme de SOAS.

Pendant ces années universitaires, il y a eu aussi des séjours en Asie. Un an à Pékin, où j’ai passé mon HSK5. Une expérience à Cebu aux Philippines, pour l’ONG Passerelles Numériques (PN) qui enseigne la programmation informatique à des enfants défavorisés. Cela a été décisif dans ma volonté de travailler dans un domaine où je pourrais contribuer à l’amélioration de vie des communautés dans le besoin et rendre le monde meilleur de façon générale.

 

Aubin Huret
Avec mes parents à Singapour, Thierry & Laurence Huret, lors d'un dîner des Mousquetaires d'Armagnac (oct 2018)

 

Après un parcours éducatif tourné vers l’international, comment avez-vous choisi votre parcours professionnel ?

J’ai toujours fait des stages durant l’été et j’ai eu la chance de travailler à la Banque Asiatique de Développement (ADB) à Hanoi puis à la Banque Mondiale (IFC) à Saigon. J’ai adoré l’Asie du Sud-Est en général et le Vietnam, le pays d'Annam, en particulier. J’ai vraiment eu une connexion avec ce pays et j’ai été impressionné par l’énergie et le dynamisme des Vietnamiens. Plus tard j’ai travaillé aussi à l’Organisation for Economic Co-operation and Development (OCDE) à Paris, ce fut ma seule expérience de vie en France. J’en garde un bon souvenir, mais déjà l’Asie me manquait.

A Paris, j’ai découvert le milieu de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS), c’est à dire l’entreprenariat ou la finance au service du développement social ou de l’Environnement. J’ai décroché une opportunité de travail en juin 2018 chez Impact Investment Exchange (IIX) à Singapour. L’heure du retour avait sonné ! En route pour la Cité du Lion !

 

Aubin Huret
Au Sri Lanka, lors d'une Impact Assessment Field Visit pour IIX (mars 2019)

 

Racontez-nous votre arrivée à Singapour. Comment s'est passée votre expérience chez IIX ?

Cette étape a été un véritable tournant pour moi. Ce fut un privilège de travailler aux côtés du Professeur Durreen Shahnaz, en tant qu’Analyste puis Associate Vice-president. J’ai travaillé sur des projets fantastiques, comme la création sur le Singapore Exchange d’obligations financières pour le Women Livelihood Bond ; afin d’aider les femmes en Asie à travers la micro-finance, l’agriculture durable, l’énergie renouvelable parmi d’autre secteurs.

Sur un plan technique ce fut très formateur, mais mes meilleurs souvenirs restent des rencontres humaines lors des études d’impact aux Philippines, au Cambodge ou au Sri Lanka. Chaque voyage et rencontre étaient uniques. Il arrivait que les bénéficiaires nous invitent chez eux pour nous montrer leur maison et nous présentent leur famille. Les activités de ces femmes varient énormément : certaines élèvent des cochons, vendent des produits de première nécessité ou du poisson, selon qu’elles font partie de communautés de pêcheurs, de vendeurs de fruits et bien d’autres. La pandémie a touché durement ces femmes qui vivaient de leurs petites activités, elles n’ont pas pu l’exercer à cause du confinement. Avec le temps, j’espère que la situation s’améliorera. 

Quant à Singapour, J’ai pu y découvrir un nouvel aspect de l’Asie. J’adore la cuisine asiatique ! Je travaillais à Little India, et tous les jours je me régalais de chicken rice, de soupe laksa, de pepper crab ou de pad thai… La richesse de choix dans les food courts est extraordinaire ! Cerise sur le gâteau dans cette nouvelle expatriation, j’ai retrouvé à Singapour mes parents qui avaient quitté Hong-Kong entre temps et ma petite sœur revenue faire un stage de 6 mois  au mythique Raffles Hotel !

 

Aubin Huret
Au Myanmar, périple en moto dans le Chin State avec mes amis François-Guillaume et Arjuna (fev 2020)

 

Comment avez-vous vécu le contexte de la pandémie à Singapour ?

Durant les deux mois du circuit breaker à Singapour, il a bien fallu trouver de quoi m’occuper. Je me suis alors donné pour objectif de grimper la hauteur du Mont-Blanc dans les escaliers de mon immeuble (avec une veste de 10kg) ! Après 14 sessions, 1.600 étages et 4.800 mètres, j’étais au sommet ! Cela m’a stimulé d’avoir un objectif sportif à boucler avant la fin du lock down. A côté de mon challenge sportif, j'en ai profité pour faire une formation en ligne de modélisation financière qui m'a bien aidé pour mon travail.

 

Aubin Huret
A Hong Kong, lors de la comédie musicale "Dracula", Face Productions (juillet 2010)

 

Vous avez 26 ans. Quels souvenirs gardez-vous de vos 20 années passées en Asie?

Des souvenirs d’enfance à Hong Kong avec les aigles volant à hauteur de nos fenêtres au 32ème étage, lorsque nous avions quitté Discovery Bay pour Mid-levels ! Le nouvel an chinois avec les rues pleines de bruits de tambour et de dragons dansants ! Et surtout le théâtre ! Mes sœurs et moi faisions partie d’une troupe de théâtre, Faust International Youth Theatre. A l’âge de 9 ans, j’ai intégré ma première comédie musicale « Peter Pan », j’y jouais un « Lost Boy » se battant à coups d’épée contre des pirates devant une audience de 1.200 personnes. 8 ans plus tard, j’ai décroché le 1er rôle dans le spectacle « Dracula » produit par Face Productions ! A l’époque je ne savais pas encore que cette passion pour le théâtre deviendrait quelque chose d’aussi important. J’y ai rencontré des amis pour la vie.  Je suis ensuite devenu prof de théâtre pendant mes loisirs.

Une fois adolescent, j’ai découvert un autre aspect de Hong Kong. La montagne, les coins cachés dans la nature, découvrir des toits d’immeuble et les petites ruelles cachées avec mon meilleur ami Victor... C’était un réel labyrinthe urbain. Hong Kong nous a permis de devenir autonomes à un très jeune âge - notamment grâce à la sécurité et la petite taille de l’ile. J’ai gardé ce sens de l’autonomie par la suite.

Lorsque j’ai vécu un an à Pékin en co-location avec des Chinois dans le cadre de mes études, j’ai eu l’impression de suivre les traces de mes parents dans les années 90 (dans un Pékin grandement changé bien sur). J’en ai profité pour explorer le pays. J’y ai rencontré des supers amis et ce fut une période très importante dans ma vie. Un de mes souvenirs préférés de Pékin a été lorsque je marchais seul dans les Hu Tongs près de An Ding Men. Un vieux monsieur a tapé sur sa vitre et m’a fait signe de rentrer dans sa maison. Il m’a invité à m’asseoir, il voulait simplement que je prenne le thé avec lui et sa femme. Ravi que je lui parle en chinois, il m’a raconté sa vie dans les Hu Tongs. Ce fut une rencontre rare.

Mes années à Singapour resteront marquées par la boxe à The Ring. J’ai toujours pratiqué les arts martiaux, j’ai démarré par le Karate Kyokushin à Impakt Hong Kong, puis je suis passé au Muay Thai. En arrivant à The Ring à Singapour, je savais que ça serait une deuxième maison et que j’allais y faire de belles rencontres ! Le fondateur Ruchdi Hajjar est devenu un bon ami. J’aimais beaucoup son côté entrepreneur et on partageait aussi des passions en commun pour les causes sociales en Asie. Nous avons souvent échangé sur les projets caritatifs aux Philippines avec leur organisme de charité « The Ring Cares ».

 

Aubin Huret
A Singapour, lors du White Collar boxing, pour The Ring (nov 2019)

 

Que faites-vous maintenant ? Comment voyez-vous l’avenir ?

Il y a une phrase du livre Sapiens de Yuval Noah Harari qui est toujours restée dans ma mémoire « Une vie pleine de sens peut être extrêmement satisfaisante même au milieu de difficultés, alors qu'une vie dénuée de sens est une épreuve terrible, aussi confortable soit-elle »

J’ai toujours eu l’envie de me challenger, bouger et évoluer. Après trois ans dans la Cité du Lion, je retourne maintenant vers le Port parfumé où je vais travailler pour Vigeo-Eiris – Moody’s dans l’ESG (Environmental Social Governance). L’idée de retourner dans ma ville d’enfance, avec des yeux de jeune adulte me plait bien. Qui sait, il se peut qu’une de mes sœurs ou les trois me rejoignent en Asie bientôt ! J’ai vraiment l’impression de faire partie d’une nouvelle communauté ou génération de Français d’Asie et c’est passionnant !

 

Aubin Huret
Notre fratrie, Léonore, Aubin, Philippine & Marguerite Huret ?

 

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